Flibustiers,boucaniers,pirates... - Corsaire -
Un corsaire est un membre de l'équipage d'un navire civil armé, autorisé par une lettre de marque (également appelée lettre de commission ou lettre de course) à attaquer en temps de guerre, tout navire battant pavillon d'États ennemis, et particulièrement son trafic marchand, laissant à la flotte de guerre le soin de s'attaquer aux objectifs militaires. Les corsaires, ne doivent donc pas être confondus avec les pirates puisqu'ils exercent leur activité selon les lois de la guerre, uniquement en temps de guerre et avec l'autorisation de leur gouvernement. Capturés, ils ont droit au statut de prisonnier de guerre.
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Le Renard, réplique du bateau de corsaire de Surcouf
Cette forme de guerre navale est appelée guerre de course.
Le mot « corsaire » a été emprunté de l'italien corsaro lui même dérivé du latin cursus, « course »
La guerre de course
La guerre de course a souvent été utilisée par un belligérant pour pallier l'insuffisance de ses moyens à l'encontre d'un adversaire disposant de la suprématie navale. Ce système est très avantageux pour l'État : le poids financier de l'armement corsaire est à la charge de l'armateur et le gouvernement touche une part dans la revente des prises opérées par le corsaire. De plus, c'est à l'armateur de payer la rançon des marins corsaires prisonniers. En résumé, l'État ne paie rien mais peut gagner.
C'est ainsi la stratégie des Français contre les Britanniques pendant une grande partie duXVIIIe siècle et pendant les guerres de la Révolution et de l'Empire après le départ en exil des officiers de marine (pour la plupart nobles et donc menacés par la Révolution) et à la ruine de la marine d'État (Aboukir et Trafalgar). Les trois ports principaux en France étaient Dunkerque, Saint-Malo et Morlaix, suivis par Calais, Boulogne, Granville et autres. La course est abolie par traité international en 1856, après la Guerre de Crimée.
De même, au cours des deux guerres mondiales, bien que l'expression « corsaire » soit utilisée abusivement dans ce contexte, la marine allemande a armé des bâtiments marchands pour la guerre au commerce allié dans des théâtres secondaires où le trafic n'était pas organisé en convois (océan Indien, Pacifique, Atlantique Sud). Les aventures de ces « corsaires » sont généralement pittoresques mais sans grande conséquence sur le déroulement des deux conflits.
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Statue du corsaire Robert Surcouf
Navires corsaires
Ils utilisaient souvent des navires de petite taille, rapides, manœuvrants et discrets tels des cotres, des flutes, pour exécuter des abordages en mer plus par surprise que par force. Lorsque la Fortune leur souriait, ils pouvaient enlever des bateaux de fort tonnage (l'emblématique capture du Kent par la flûte la Confiance de Robert Surcouf le 7 octobre 1800) . Les prises, très souvent des navires marchands, étaient donc peu propices à une activité corsaire et étaient revendues.
Un « équipage de prise » était envoyé sur le navire saisi avec mission :
- soit de le ramener à bon port pour le revendre avec sa cargaison, débarquer les prisonniers, entrer en contact avec l'armateur et lui proposer leur libération contre rançon ou par échange avec un nombre équivalent de prisonniers.
Pour cela, on pouvait donner une liste de noms des marins qu'on voulait voir libérer ; Surcouf l'a fait pour son frère Nicolas mais les Britanniques désirant faire monter les enchères et se venger, firent la sourde oreille ; mal leur en prit : Surcouf ravagea de plus belle leur commerce en mer des Indes jusqu'à ce que poussés par leurs marchands de Calcutta, les Britanniques lui proposent de libérer son frère.
- soit de continuer la course à deux navires au lieu d'un, ce qui était impossible si l'équipage ennemi était en petit nombre. En effet, il fallait alors assurer la manœuvre du navire et surveiller l'équipage prisonnier, ce qui n'allait pas sans risque.
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La Confiance (18 canons et 190 hommes) prend le Kent (40 canons et 437 hommes). Par Ambroise-Louis Garneray, alors sous les ordres de Surcouf.
Une guerre très réglementée
Les corsaires faisaient la guerre selon les mêmes lois que les marins d'État, c'est-à-dire ceux de la Marine (royale puis nationale, impériale en ce qui concerne la France).
Règles générales pendant la course
Avoir une lettre de marque reçue de l'État pour "courir sus aux navires ennemis" ; cette autorisation est caduque dès l'arrêt des hostilités S'il y a possibilité de s'approcher du navire ennemi par ruse en arborant un pavillon neutre ou allié il y a une obligation de hisser, à partir d'une certaine distance, le pavillon véritable. En cas contraire, il s'agirait d'une traîtrise.Respect de la vie des prisonniers Les effets personnels des marins ennemis ou des passagers ne font pas partie du butin, ils les conservent : on pose des scellés sur les coffres, malles, armoires des prisonniers (on peut lire dans des mémoires comme ceux de Garneray ou dans les archives maritimes, que les prisonniers utilisent cet argent pour soudoyer les geôliers, améliorer l'ordinaire, etc., ce qui prouve que cette obligation de respect des biens privés des prisonniers n'était pas seulement théorique mais effectivement respectée). Seuls le navire et sa cargaison peuvent donc faire l'objet d'une prise en guerre de course, encore faut-il que la prise ait été jugée légitime par les autorités compétentes au retour de course. Les marins ennemis sont prisonniers de guerre : ils peuvent être soit libérés à la fin des hostilités, soit échangés, ou encore libérés contre rançon.
Règles administratives au retour de la course
Le capitaine corsaire déposait à l'Amirauté son rapport de mer dont l'examen par les officiers d'administration déclenchait une procédure de plusieurs jours. Personne n'avait le droit de descendre à terre avant que les officiers d'administration n'aient dressé le procès verbal d'inspection du navire, vérifié que les scellés apposés par l'écrivain de bord sur les coffres, malles et armoires de la prise soient intacts. Ensuite ils apposaient leur sceau sur les écoutilles pour éviter que des parties du butin de prise ne soient débarquées à la nuit tombée. Enfin, ils interrogeaient les prisonniers et les menaient vers les prisons de la ville. Alors seulement, l'équipage pouvait quitter le navire et attendait le verdict du Tribunal des Prises, nécessaire avant la vente aux enchères du butin de prise.
Le Tribunal des prises
- Le résultat de la procédure était envoyé au tribunal des prises, dépendance de l'Amirauté qui statuait sur la légitimité des captures.
La prise devait avoir été faite selon les lois de la guerre. En cas de forfaiture, traîtrise ou d'absence de Lettre de Course, le navire était rendu à ses armateurs.
Sous la Révolution, l'enthousiaste Surcouf, parti en guerre sans attendre d'avoir reçu sa Lettre de Course ou Lettre de marque, s'est vu condamné par le Tribunal des Prises de l'actuelle Île Maurice, alors territoire français.
Ce n'est qu'une fois le jugement rendu qu'il pouvait être procédé à la vente des cargaisons.
En France, le tissu pris n'était pas mis en vente mais détruit afin de préserver les manufactures nationales (selon une ordonnance royale).
Les prises (le butin)
En plus du navire, le butin de prise pouvait être très varié : fruits et légumes comme vin et eau-de-vie, sucre, poisson et viande (anchois, harengs, biscuits, bœuf, lard), cuirs, bois précieux, colorants (indigo), épices, café, chocolat ou, beaucoup plus rarement, sacs d'argent ou poudre d'or.
Le produit de la vente aux enchères des prise était alors partagé entre les personnes ayant collaboré à la capture de l'ennemi dans l'ordre des priorités :
- L'État (Roi, République, Empereur) prenait entre 10 et 20 pour cent (c'est lui qui fournissait la lettre de marque).
- Les frais (on payait la nourriture, la poudre, les munitions, ainsi que les réparations faites durant le voyage).
- Les veuves et les blessés (les veuves prenaient deux fois la part de leurs défunts maris, et les blessés avaient une indemnité, fixée au départ en fonction de la partie du corps manquante, en plus de leur part).
- L'armateur prenait ensuite 30 pour cent du reste.
- Enfin, chaque homme avait sa part en fonction de sa place dans l'équipage (le mousse=demi-part, le capitaine=25 parts, le chirurgien=25 parts etc…)
Différence entre course et piraterie
La Course est pratiquée par des civils qui, en temps de guerre, sur autorisation des autorités et en obéissant aux lois de la guerre, font la guerre avec un statut équivalent aux militaires mais sans être soumis à l'autorité d'un état major mais au contraire d'une façon indépendante.
La piraterie est un banditisme sur mer.
La confusion résulte du fait que les Corsaires faisaient la guerre aux nations ennemies en s'attaquant à leur commerce.
Cette apparence ne doit pas faire oublier qu'ils respectaient les vies et les biens personnels ; seul le navire et le fret faisaient l'objet de la prise, une enquête établissait si la prise avait été légitime et le bien était rendu si tel n'avait pas été le cas.
Le déroulement des combats
La plupart du temps, il y avait peu de combats ou alors ils étaient très courts. La guerre à mort est une notion récente, la guerre d'extermination n'était pas dans la psychologie du temps mais est apparue lors de la Révolution française. La vie de marin était rude, personne n'éprouvait le besoin de rajouter d'autres souffrances à celles déjà vécues par le simple exercice du métier de marin.
Cependant la politique des pontons (navires désarmés dans lesquels les Britanniques parquaient leurs prisonniers dans un tel entassement que le taux de mortalité y était très élevé) à partir de la Guerre de Sept Ans, a poussé les marins français à une lutte beaucoup plus acharnée. Les évadés des pontons ayant retiré de leur conditions de détention une haine de la Grande-Bretagne, sentiment quasi inconnu jusqu'alors.
Tactique
La plupart du temps, le corsaire se mettait dans le sillage de l'ennemi pour ne pas être dans l'axe de ses canons. Un coup de semonce était tiré si le navire montrait qu'il se rendait en baissant son pavillon. On envoyait alors quelques hommes conduits par un officier prendre possession du navire ; sinon l'abordage avait lieu.
Pour l'abordage le corsaire se plaçait perpendiculairement à l'ennemi (d'où l'importance d'avoir un navire rapide et bien manœuvrant) et engageait son beaupré sur le pont de l'adversaire.
Il pouvait aussi l'engager de bout en bout : la proue contre la poupe de l'ennemi.
L'équipage était couché sur le pont pour se protéger et cacher son nombre (s'il était peu nombreux). Le corsaire préparait l'abordage par un tir nourri de mitraille pour dégager le pont ennemi avec caronades et couleuvrines et aussi des tirs depuis la mâture (d'où l'on avait une meilleure vision) assurés par le chirurgien (qui ne montait pas à l'abordage), le mousse, le cuisinier, l'écrivain... Le but de ces tirs précis était de désorganiser l'adversaire en visant les officiers. On jetait les grappins et l'équipage s'élançait. Il était fréquent que des hommes tombent entre les deux navires et soient écrasés : Duguay-Trouin, lors de son premier combat a été marqué à vie par la vision d'un homme à la tête écrasée entre les deux coques ; Garneray a assisté à la même scène.
Le but du combat était de s'emparer d'un navire et de sa cargaison, d'obtenir une rançon de l'équipage. On tirait à démâter (art dans lequel les artilleurs français étaient passés maîtres), à la mitraille sur la dunette où se tenaient les officiers, rarement à tuer, en "tirant dans le tas". Surcouf s'est vu obligé de le faire lors de la prise du Kent, le 31 août 1800, le navire ayant à son bord deux compagnies d'infanterie qui partaient pour leur garnison, elles chargèrent, culbutant les Français : le capitaine corsaire fit déplacer un canon de son sabord pour le tourner sur le pont vers cette attaque et tirer à mitraille, ce qui arrêta net la contre-attaque britannique.
Le combat se déroulait à l'arme légère : pistolet, fusil, pique, hache d'abordage, sabre d'abordage (la cuillère à pot, d'où l'expression "régler les choses en trois coups de cuillère à pot").
Anecdotes
- on vivait alors la "Guerre en Dentelles" et il est arrivé qu'un capitaine corsaire n'ayant pas le nombre d'hommes suffisant, fasse payer directement au capitaine ennemi la rançon de son navire et de son équipage et même les libère avec promesse de rendre des prisonniers en échange.
- Garneray raconte dans ses souvenirs, qu'un capitaine britannique qui s'était rendu sans combattre, montant à bord du navire français pour la reddition, constatait que les Français étaient peu nombreux ; il déclara que s'il avait su, il aurait combattu et que les Français ne l'auraient pas pris. Comme son ton méprisant agaçait le capitaine corsaire français, celui-ci déclara qu'il n'avait qu'à remonter sur son navire et qu'on allait donc combattre. Selon Garneray, le Britannique devint tout pâle et n'insista pas.
Époque moderne
Une activité toujours légale aux États-Unis
La « course » a été abolie en 1856 par le Traité de Paris. Cependant, les États-Unis n'en sont pas signataires. Selon la constitution américaine, le Congrès conserve le droit de « déclarer la guerre, d'accorder des lettres de marque et de représailles et d'établir des règlements concernant les prises sur terre et sur mer » (Article 1, section VIII).
Tout récemment, l'administration Bush, après les attentats du 11 septembre 2001, a renforcé le droit constitutionnel de prises en mer en faisant voter une loi, September 11 Marque and Reprisal Actes of 2001, qui autorise le Département d'État à octroyer des lettres de marque sans attendre l'aval du Congrès. Ainsi des personnes ou des sociétés peuvent se voir confier des missions militaires navales offensives. En 2007, une société américaine privée, la société Pistris, s'est vu accorder une lettre de marque pour armer un navire battant pavillon américain chargé de traquer les pirates dans le golfe d'Aden.
Mais illégale dans les pays signataires du Traité de Paris
Au cours de la Première Guerre mondiale, l’Allemagne utilisa un navire de commerce, le Seeadler, commandé par Felix von Luckner, officier de la Marine impériale. En mettant à profit son apparence de navire de commerce, il pouvait approcher les navires marchands ennemis.
Au cours de la Seconde Guerre mondiale, afin de désorganiser le commerce britannique, l'Allemagne a utilisé des navires marchands pour porter le conflit dans les océans du Sud. Ces navires ont été armés, leurs superstructures modifiées et ces bâtiments ont arboré des pavillons de pays neutres. Ainsi transformés en croiseurs auxiliaires ils ont sillonné l'océan Indien austral notamment entre 1940 et 41. L’Atlantis (coulé par le croiseur britanniqueDevonshire le 21 novembre 1941), le Pinguin (coulé par le Cornwall), le Komet écumèrent les eaux des îles Kerguelen. Il y eut également l'Orion, le Widder, le Thor, le Kormoran (coulé par le croiseur australien Sydney), le Michel (coulé devant le Japon) et le Stier (coulé par un navire américain en Atlantique sud), qui ont écumé tous les océans du monde.
Dans les deux cas, ces navires étaient commandés par des officiers de marine, qui agissaient certes en totale autonomie et sur un navire à l'origine civil, mais sur ordre reçu de l'Amirauté et surtout sans lettre de course puisque la Prusse avait signé le traité de Paris abolissant la course en 1856.
Il ne s'agit donc pas de corsaires (défini par la possession d'une lettre de course) mais de navires faisant la guerre selon une tactique dont seules quelques apparences peuvent éventuellement rappeler la guerre de course.
Flibustiers,boucaniers,pirates... - Boucanier -
[size=18]Un boucanier (de boucan, gril ou claie de bois, viande fumée dans le dialecte des indigènes des Caraïbes) est à l'origine un coureur des bois de Saint-Domingue qui chassait les bœufs sauvages pour en boucaner la viande (c'est-à-dire la sécher à la fumée).[/size]
[size=18]Par extension, le terme a désigné un écumeur de mer, un pirate, qui infestait l'Amérique. Il s'agit d'aventuriers français, normands, qui, vers la fin du XVIe siècle, allèrent s'établir dans l'île de Saint-Domingue, appartenant alors aux Espagnols, et y vécurent longtemps en chassant des bœufs sauvages dont ils préparaient la peau pour la vendre en Europe. Les Espagnols ayant exterminé les animaux qui faisaient le principal objet de ler commerce, ils n'en restèrent pas moins dans l'île, y formèrent des établissements et se livrèrent à la piraterie. La France les reconnut et leur envoya un gouverneur en 1665.[/size]
[size=18]La dénomination de boucanier était spécifique aux Caraïbes. Ils sont apparus vers 1630 et se sont maintenus jusqu'à la fin de la période de piraterie aux environs de 1730. Les premiers boucaniers étaient souvent des évadés des colonies. À l'origine coureurs de bois sur l'île d'Hispaniola (actuellement Saint-Domingue et Haïti), ils chassaient les bœufs sauvages. La viande était préparée à la manière indigène, c'est-à-dire séchée et fumée sur une sorte de grill en bois : le boucan (barbacoa en espagnol, d'après barbicoa en langue indienne arawak, qui donne barbecue). D'où les termes boucaner et boucanier. Cette viande ainsi conservée permettait de faire du trafic avec des navires de passage ou des colonies isolées. Après avoir été chassés d'Hispaniola par les Espagnols, les boucaniers trouvèrent refuge sur l'île de la Tortue (Tortuga en espagnol), à l'époque possession française, située au nord-ouest d'Hispaniola, à partir de 1663. Ils opéraient avec le soutien partiel des colonies non-espagnoles et leur activité est demeurée légale ou partiellement légale jusque dans les années 1700.[/size]
[size=18]Obligés de survivre avec peu de ressources, ils étaient habiles en construction navale, en navigation et en chasse. On les considérait comme des combattants féroces et ils étaient réputés experts dans l'utilisation de fusils à silex (inventé en 1615). Toutefois, le fonctionnement de ces armes était si incertain que leur utilisation en combat n'était pas très courante avant 1670. Ils furent engagés dans des expéditions à terre organisées par des pirates comme Henry Morgan.[/size]
[size=18]Une grande solidarité régnait entre eux et les décisions étaient prises en commun pour le profit de la communauté. Ceci est en partie à l'origine des règles démocratiques en vigueur à bord des navires pirates.[/size]
[size=18]À la manière des boucaniers, des communautés de bûcherons s'étaient établies au Honduras pour abattre et vendre des bois précieux au nez et à la barbe des Espagnols. Avec les boucaniers et les flibustiers, ils constituaient la communauté des Frères la Côte et non "Frères de la Côte" comme on voit toujours non dans les textes mais dans les romans. On passait facilement d'une profession à l'autre ce qui explique que le terme boucanier est souvent synonyme à tort de pirate.[/size]
[size=18]Remarque : la confusion provient également de l'anglais ou le terme employé pour désigner les pirates des caraïbes est bucaneer ou éventuellement freebooter, tandis que le termefilibuster désigne des aventuriers mercenaires anglo-américains du XIXe siècle engagés dans des actions de colonisation sauvage avec l'intention de renverser le gouvernement en place (la colonisation du Texas par exemple).[/size]
Flibustiers,boucaniers,pirates... - Flibustiers -
Les flibustiers étaient des aventuriers qui, aux XVIe et XVIIe siècles, écumaient les côtes et dévastaient les possessions espagnoles en Amérique.
Le mot flibustier est dérivé du néerlandais vrijbuiter (« qui fait du butin librement »). Certaines sources citent comme origine le mot flibot (sorte de petit bateau), d’autres préfèrent free booter (libre pillard), et font remonter leurs pratiques aux traditions de la soldatesque en Europe.
Selon le centre de ressources lexicales du CNRS , ce terme apparaît dans le vocabulaire français au milieu du XVIIe siècle. Il désigne alors un « corsaire des îles d'Amérique ». À partir du XVIIIe siècle, son sens évolue pour prendre celui d'un homme malhonnête, d'un escroc.
Les origines de la flibuste
Les flibustiers se composent d'aventuriers français, hollandais et anglais exilés aux Antilles à partir du début du XVIIe siècle pour fuir les guerres civiles ou la persécution religieuse en Europe et la pression économique des autorités royales.
La plupart s'installent sur l'île de la Tortue, au large d'Haïti. Disputée par les Anglais, les Hollandais, les Espagnols et les Français, cette île servait d'escale et de port de ravitaillement aux contrebandiers et aux corsaires des Caraïbes. Au début du XVIIe siècle, elle était sous l'autorité du Français Pierre Belain d'Esnambuc, qui avait fondé la Compagnie de Saint-Christophe, devenue la Compagnie des îles d'Amérique en 1635. Chassé par les Espagnols de l'Île Saint-Christophe, Belain d'Esnambuc s'empara avec ses compagnons français et anglais de l'île de la Tortue et en expulsa les Espagnols en 1627. Il fut rejoint plus tard par des Hollandais chassés de l'île Sainte-Croix et par une centaine d'Anglais chassés de l'île de Nevis. Rapidement, les aventuriers qui vivaient sur l'île de la Tortue décidèrent de mener des actions en mer. Ils devinrent les premiers flibustiers.
En 1630, les Espagnols reprirent l'île avant de la céder aux Anglais, qui la renommèrent Isle of Association. Le gouverneur en place laissait les corsaires de toutes nationalités s'y ravitailler. En 1640, le gentilhomme français huguenot, François Levasseur, ex-capitaine de la marine royale, reprit l'île de la Tortue aux Anglais après s'être fait remettre par le gouverneur de Saint-Christophe une « commission », c'est à dire une lettre de marque engageant l’autorité royale, bien que la France soit en paix avec l’Angleterre. Nommé gouverneur de l'île, Levasseur accordait des autorisations aux aventuriers pour piller les navires Espagnols .
L'aspect officieux des opérations menées par les flibustiers est à l'origine de leur statut ambigu, à mi-chemin entre le corsaire et le pirate. Si certains d'entre eux pouvaient faire valoir qu'ils avaient reçu une commission des autorités royales, cette autorisation n'était pas toujours valide : celui qui l'attribuait n'en avait pas toujours le pouvoir, et le gouvernement du royaume n'était pas toujours informé de la mission exécutée en son nom.
Pendant un siècle, à bord de leurs bateaux, les flibustiers s'en prendront aux navires espagnols, prétendant agir au nom des intérêts de leurs pays respectifs. Mais alors que la population de l'île de la Tortue se renforçait avec l'arrivée de boucaniers de Saint-Domingue et de colons européens, notamment des protestants, les évènements politiques provoquèrent une évolution brutale dans leur histoire. La rivalité entre les puissances européennes au début du XVIIIe siècle, puis le règlement de la succession d'Espagne qui installa un monarque français sur le trône d'Espagne contribua au déclin de la flibuste. Ses représentants furent alors condamnés à s'engager dans une activité légale ou à devenir des pirates.
Expulsés par les Espagnols de la Tortue, une partie des flibustiers se réfugia à Saint-Domingue, à Cuba et sur les côtes d'Amérique centrale. À partir de 1659, ils sont nommément cités par le gouverneur de la Jamaïque. Affaiblis par le retour en Angleterre des navires de guerre, les autorités jamaïcaines durent en effet faire appel aux flibustiers pour renforcer leur défense. Ceux-ci enrôlèrent alors un grand nombre de soldats anglais qui refusaient de s'installer sur l'île comme planteurs. Là encore, les commissions dont ils faisaient état provenaient de sources officielles, mais avaient été attribuées dans des conditions douteuses, en fonction du contexte politique.
L'un de ces flibustiers, Jérémie Deschamps seigneur du Rausset, ancien compagnon de Levasseur, avait obtenu à la fois des commissions françaises et anglaises. Ayant repris l'île de la Tortue au nom des autorités anglaises en 1660, il remit à des flibustiers des commissions en son propre nom, ce qui entraîna sa destitution par le gouverneur de la Jamaïque. Du Rausset décida alors de gouverner l'île en vertu de sa commission française, s'affranchissant ainsi de la tutelle anglaise.
En 1664, toutes les colonies françaises d'Amérique sont placées sous l'autorité de la Compagnie des Indes Occidentales créée par Richelieu. Le nouveau gouverneur nommé à la Tortue, Bertrand d'Ogeron, décide de régulariser les activités des flibustiers et parvient à leur imposer de venir lui présenter leurs butins. Il continue néanmoins à attribuer des commissions aux flibustiers qui combattent les Espagnols.
C'est à partir de cette date que des personnages comme le Français François L'Olonnais et le Gallois Henry Morgan marquent l'histoire de la flibuste. Protégés par les gouverneurs des colonies de leur pays (la Tortue pour l'un, la Jamaïque pour l'autre), ils réunissent de véritables flottes pour attaquer les possessions espagnoles. Avec l'entrée en guerre de l'Angleterre contre les Provinces-Unies, des flibustiers britanniques s'en prennent aux intérêts hollandais.
Avant 1648
Les Provinces-Unies protestantes et les Gueux de Mer
Les Provinces-Unies constituent la partie nord et protestante des Pays-Bas espagnols d'alors, appelée à devenir les Pays-Bas au sens d'aujourd'hui ; elles arrachent leur indépendance à l'Espagne au cours de la Guerre de Quatre-Vingts Ans (1568-1648), appelée aussi Révolte des Gueux (de 1618 à 1648, la Guerre de Quatre Vingt Ans se confond avec la Guerre de Trente Ans, guerre pan-européenne de même objectif : affaiblir la puissance excessive du Saint Empire et de l'Espagne, deux puissances aux mains des Habsbourg). Cette indépendance est reconnue internationalement en 1648 par les traités de Westphalie.
Ce terme de Gueux ne doit pas tromper. C'est une référence ironique à un de leurs adversaires, Charles de Berlaymont qui les avait traités de gueux. En réalité, il y avait aussi des riches et des nobles parmi les protestants. Le plus important est Guillaume Ier d'Orange-Nassau, considéré comme le père fondateur des Provinces-Unies. Même s'il ne faut pas le confondre avec son descendant et homonyme Guillaume III qui deviendra roi d'Angleterre, ce n'est, à coup sûr, pas un mendiant.
La révolte des Gueux comporte un important volet maritime mené par les Gueux de la mer, écumeurs protestants.
S'agit-il vraiment de corsaires, ou plutôt de pirates, ou encore (ce mot sera inventé pour eux) de flibustiers ? Un corsaire agit sur lettre de marque délivrée par un État et se soumet à un contrôle sur ses prises, qui doivent avoir été enlevées sur un navire d'un pays ennemi en temps de guerre. Ce contrôle est exercé par un tribunal de prise. Pas d'État, pas de lettre de marque authentique, pas de tribunaux de prises. Or, les Provinces-Unies ne sont pas un État avant 1648, date de la consécration internationale de leur indépendance par les Traités de Westphalie. En même temps, il peut-être trop sévère de traiter de pirates tous les écumeurs hollandais ou zélandais. En réalité, dans cette Europe d'avant les Traités de Westphalie, toutes les frontières sont en recomposition, et la notion d'État souverain se discute, les armées fournissant l'essentiel de l'argumentaire.
Avant 1648, les lettres de marques délivrées sur le territoire de ce qui sera les Provinces-Unies sont émises par des acteurs comme Guillaume d'Orange, chef de guerre, ou par les grandes sociétés par actions qui arment en course, comme la Compagnie néerlandaise des Indes occidentales. Cette compagnie est basée à Middelbourg en Zélande et non dans quelque île exotique ; il s'agit d'une des premières sociétés capitalistes par actions ; elle possède ses propres vaisseaux, son propre territoire (qu'elle se taille en Amérique grâce à l'action de ses capitaines), bien plus vaste que celui des Provinces-Unies (dont elle est supposée dépendre), ses propres objectifs, parmi lesquels la course et le commerce des esclaves ne sont nullement dissimulés.
C'est donc le même acteur qui arme en course et qui délivre la lettre de marque ; le contrôle de la limite entre course et piraterie devient pure simulation.
De telles lettres de marque ne protégeaient évidemment pas leur titulaire contre une accusation de piraterie en cas de capture pas les Espagnols. Elles pouvaient cependant avoir un certain effet protecteur (sans automatisme) en cas de capture par un autre pays, car le démantèlement de l'empire colonial espagnol aux Amériques était recherché par toutes les puissances européennes, qui avaient tendance à s'allier contre l'Espagne dans cette zone géographique, ce qui entraînait une tendance à reconnaître de facto les Provinces-Unies comme acteur indépendant.
On assiste à la naissance du personnage du flibustier, mi-corsaire mi-pirate. S'il attaque des galions dans les eaux américaines, le cœur du système est en Europe. Les Provinces-Unies tiennent le premier rôle dans les débuts de la flibuste, avec l'objectif politique de détruire l'empire colonial espagnol ; les installations durables de colonies de peuplement européennes dans ces eaux sont difficiles et tardives, et les flibustiers qui attaquent les galions chargés d'or partent plus souvent de Zélande que de l'île de la Tortue.
Nous sommes devant une machine de guerre maritime totale dont les objectifs sont à la fois politiques (car le cadre est celui d'une guerre séparatiste et d'une guerre de religion, et l'ensemble est animé par ces hommes d'État que sont les stathouders Guillaume d'Orange) et économiques (car certains des acteurs les plus en pointe sont des grandes sociétés par action et des écumeurs cherchant le profit).
La liberté d'action des écumeurs hollandais augmente encore quand la puissance maritime espagnole est détruite par les Hollandais lors de la désastreuse Bataille des Downs, le 31 octobre 1639. Cette destruction incite Anglais et Hollandais (bien que ces derniers, avant 1648, soient encore juridiquement sujets du roi d'Espagne) à tenter de s'emparer des possessions coloniales ibériques en Amérique, ce qui passe par une recrudescence de la piraterie aux Antilles.
Avec les écumeurs hollandais, nous sommes au cœur de l'immense système de course, piraterie ou flibuste, tel qu'il sévira aux XVIe siècle et XVIIe siècle. Il s'agit d'un système mondial. Quelques anecdotes biographiques en montreront la dimension :
- de Vernboer (15.. - 1620) ; bien qu'il soit mort 28 ans avant l'indépendance des Provinces-Unies, il commence sous lettre de marque « hollandaise », mais finit pirate à Alger tout en conservant un certain "patriotisme", du moins c'est ce qu'il dit quand il cherche à rentrer en grâce auprès de son pays. Il fait hisser le pavillon "hollandais" quand le navire attaqué est espagnol, et évite de trop maltraiter ses prisonniers lorsque ceux-ci sont hollandais. Son compatriote Jan Janszohn, de Haarlem, commence aussi sous lettre de marque "hollandaise", mais opère ensuite à partir d'Alger et de Salé (Maroc) et se convertit à l'Islam, ce qui lui permet, au passage, de prendre une deuxième femme.
- Piet Heyn( 1577 - 1629) est, en 1623, vice-amiral au service de la compagnie des Indes Occidentales ne se contente pas d'attaquer des galions, mais prend aussi des villes, comme Bahia (Brésil), puis il passe sous lettre de marque de Guillaume d'Orange en 1629 et prend part au blocus de Dunkerque.
L'exemple de Piet Heyn nous montre qu'il n'y a pas un monde d'écart entre les écumeurs des Antilles et ceux de la mer du Nord.
Autres acteurs
Si les écumeurs hollandais constituent le cœur du système flibustier, d'autres acteurs viennent s'y greffer :
- des aventuriers individuels, souvent protestants et donc à l'aise avec les Gueux de Mer
- des États comme la France et l'Angleterre, qui ont leurs propres raisons de vouloir le démantèlement de l'empire colonial espagnol et délivrent donc des lettres de marque avec facilité.
Après 1648
L'année 1648 est celle des Traités de Westphalie, qui ont redessiné la carte de l'Europe. La notion d'Etat redevient claire, même si les frontières ont bougé ; en conséquence, d'autres notions devraient en théorie redevenir claires dans la foulée : les notions de contrôle étatique, de lettre de marque, de corsaire en tant que différent du pirate.
En fait, ce n'est pas si simple. Par exemple, dans la législation du Mexique, au début de son indépendance au XIXe siècle, le terme de flibustier s'appliquait aux étrangers occupant illégalement une portion du territoire national et qui se sont naturellement opposés aux autorités, s'adonnant a toutes sortes de trafics, les volontaires américains combattant pour la république du Texas étant classés dans cette catégorie.
Histoire
L’âge d’or de la flibuste se situe avant les années 1680 quand la France et l’Angleterre décident de les disperser. Une partie se dirige vers les côtes d’Afrique, d’autres vers l’océan Pacifique où ils s’installent aux Galapagos et dans l’archipel Juan Fernandez.
En 1697, l'amirl Jean-Baptiste Du Casse, gouverneur français de Saint-Domingue, réunit presque mille anciens flibustiers pour l’opération de Jean-Bernard de Pointis contre Carthagène dans l’actuelle Colombie. Un malentendu sur le partage du butin mène à la reprise de la ville par les flibustiers seuls. C’est leur dernière grande action. Ensuite, Louis XIV obtient la signature d'un traité de paix avec les espagnols qui met fin à la guerre de la ligue d'Augsbourg. Les flibustiers sont désarmés ou chassés.
Quelques flibustiers célèbres :
- le Gallois Henry Morgan , qui prit Panama en 1670 et fut nommé gouverneur de Jamaïque;
- Pierre Legrand, de Dieppe, qui avec une barque montée par 28 hommes enleva le vaisseau amiral espagnol ;
- Michel de Grandmont aussi connu sous le nom de chevalier de Grammont qui s’empara de Maracaibo en 1678, de Puerto Cabello en 1680, de Vera Cruz en 1683 et enfin de Campeche en 1685. Ces exploits lui valurent d’être nommé lieutenant de la partie sud de l’île de Saint-Domingue par le roi de France, un poste qu'il n’occupa jamais, ayant disparu en mer en avril 1685;
- Le Français Jean Lafitte qui fonda le Royaume de Barataria près de la Nouvelle Orléans et aida le général Andrew Jackson à battre les Anglais lors de la bataille de Chalmette en 1815.
- Enfin le nom flibustier fut donné aux aventuriers français (comme Gaston de Raousset-Boulbon) mais surtout américains, qui tel William Walker, tentèrent pour leur profit personnel, de jouer un rôle politique au Mexique et en Amérique Centrale au XIXème siècle, le plus souvent, au détriment des gouvernements en place.
Sources et critiques
L'une des principales sources d'informations sur des flibustiers est le livre d’Alexandre-Olivier Exquemelin (ou Oexmelin) dont la récente édition annotée par Patrick Villiers donne le texte original et des variantes. Certains épisodes et personnages sont généralement considérés aujourd’hui comme discutables sinon inventés de toutes pièces. C’est le cas en particulier des récits concernant Nau l’Olonnais et Michel le Basque, qui prirent Maracaibo, ou Monbars « l’Exterminateur » qui s’empara de Vera Cruz en 1683. Des autres textes de l’époque, on peut également citer celui de Ravenau de Lussan.
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