POEMES SUR LES VENDANGESLes Vendanges
[size=18]Les Vendanges[/size]
Quand le raisin est mûr, par un ciel clair et doux,
Dès l'aube, à mi-coteau, rit une foule étrange
C'est qu'alors dans la vigne, et non plus dans la grange,
Maîtres et serviteurs, joyeux, s'assemblent tous.
A votre huis, clos encor, je heurte.
Dormez-vous ?
Le matin vous éveille, élevant sa voix d'ange
Mon compère, chacun, en ce temps-ci, vendange.
Nous avons une vigne eh bien !
Vendangeons-nous ?
Mon livre est cette vigne, où, présent de l'automne,
La grappe d'or attend, pour couler dans la tonne,
Que le pressoir noueux crie enfin avec bruit.
J'invite mes voisins, convoqués sans trompettes,
A s'armer promptement de paniers, de serpettes.
Qu'ils tournent le feuillet sous le pampre est le fruit.
Aloysius Bertrand.
[size=18][/size]
Le Beaujolais nouveau
A la gloire du Beaujolais nouveau
Les fruits mûrs tomberont coupés d'un geste agile
Dans les jarlots de bois bien propres au terroir
Les grains s'écraseront sous le choc du pressoir
Et le sang jaillira dans les cuves d'argile
Le jus fermentant dans l'ombre du tonneau
Dans son déchaînement bouillonnera de rage
Dansera, bondira, mènera grand tapage
Forgeant dans ses clameurs,
l'âme du vin nouveau
[size=18] [/size]
Il a tous les reflets d'une naissante aurore
Le discret velouté des trèfles incarnats
Le rire du soleil l'irise de grenats
Quand dans le verre il roule en un glouglou sonore.
Il est toute allégresse, il est toute fraîcheur
La pivoine, l'iris, et la rose mourante
La pêche, l'abricot, la groseille odorante
Se fondent pour créer sa typique saveur.
Il se rit des flacons habillés de poussière
Des sommeils prolongés dans la nuit d'un caveau
C'est un vin jeune et franc, gardant, tel un joyau
La sève des sarments et les sucs de la terre.
R. Mauger-Kauffmann.
[size=18][/size]
La vigne et la maison
La vigne et la maison
Ecoute le cri des vendanges
Qui monte du pressoir voisin ;
Vois les sentiers rocheux des granges
Rougis par le sang du raisin.
Regarde au pied du toit qui croule :
Voilà, près du figuier séché,
Le cep vivace qui s’enroule
A l’angle du mur ébréché.
Autrefois, ses pampres sans nombre
S’entrelaçaient autour du puits ;
Père et mère goûtaient son ombre ;
Enfants, oiseaux, rongeaient ses fruits.
Il grimpait jusqu’à la fenêtre ;
Il s’arrondissait en arceau ;
Il semble encor nous reconnaître
Comme un [size=18]chien gardien d’un berceau,[/size]
Sur cette mousse des allées
Où rougit son pampre vermeil,
Un bouquet de feuilles gelées
Nous abrite encor du soleil.
Alphonse de Lamartine.
[size=18][/size]
Vendanges
Vendanges
Les choses qui chantent dans la tête
Alors que la mémoire est absente,
Ecoutez, c’est notre sang qui chante…
O musique lointaine et discrète !
Ecoutez ! c’est notre sang qui pleure
Alors que notre âme s’est enfuie,
D’une voix jusqu’alors inouïe
Et qui va se taire tout à l’heure.
Frère du sang de la vigne rose,
Frère du vin de la veine noire,
O vin, ô sang, c’est l’apothéose !
Chantez, pleurez !
Chassez la mémoire
Et chassez l’âme, et jusqu’aux ténèbres
Magnétisez nos pauvres vertèbres,
Paul Verlaine.
Les Vendanges
Hier on cueillait à l'arbre une dernière pêche,
Et ce matin, voici, dans l'aube épaisse et fraîche,
L'automne qui blanchit sur les coteaux voisins.
Un fin givre a ridé la pourpre des raisins.
Là-bas, voyez·vous poindre, au bout de la montée,
Les ceps aux feuilles d'or, dans la brume argentée
L'horizon s'éclaircit en de vagues rougeurs,
Et le soleil levant conduit les vendangeurs.
Avec des cris joyeux, ils entrent dans la vigne ;
Chacun, dans le sillon que le maître désigne,
Serpe en main, sous le cep a posé son panier.
Honte à qui reste en route et finit le dernier !
Les rires, les clameurs stimulent sa paresse !
Aussi, comme chacun dans sa gaîté se presse !
Presque au milieu du champ, déjà brille, là-bas,
Plus d'un rouge corsage entre les échalas ;
Voici qu'un lièvre part, on a vu ses oreilles ;
La grive au cri perçant fuit et rase les treilles.
Malgré les rires fous, les chants à pleine voix,
Tout panier est déjà vidé plus d'une fois,
Et bien des chars ployant sous l'heureuse vendange,
Escortés des enfants, sont partis pour la grange.
Au pas lent des taureaux les voilà revenus,
Rapportant tout l'essaim des marmots aux pieds nus.
On descend, et la troupe à grand bruit s'éparpille,
Va des chars aux paniers, revient,saute et grappille,
Prés des ceps oubliés se livre des combats.
Qu'il est doux de les voir, si vifs dans leurs ébats,
Préludant par des pleurs à de folles risées,
Tout empourprés du jus des grappes écrasées .
Victor De Laprade.
Ninnenne