"L'aube est moins claire" Victor Hugo
L'aube est moins claire...
L'aube est moins claire, l'air moins chaud, le ciel moins pur ;
Le soir brumeux ternit les astres de l'azur.
Les longs jours sont passés ; les mois charmants finissent.
Hélas ! voici déjà les arbres qui jaunissent !
Comme le temps s'en va d'un pas précipité !
Il semble que nos yeux, qu'éblouissait l'été,
Ont à peine eu le temps de voir les feuilles vertes.
Pour qui vit comme [size=16]moi les fenêtres ouvertes,[/size]
L'automne est triste avec sa bise et son brouillard,
Et l'été qui s'enfuit est un ami qui part.
Adieu, dit cette voix qui dans notre âme pleure,
Adieu, ciel [size=16]bleu ! beau ciel qu'un souffle tiède effleure ![/size]
Voluptés du grand air, bruit d'ailes dans les bois,
Promenades, ravins pleins de lointaines voix,
Fleurs, bonheur innocent des âmes apaisées,
Adieu, rayonnements ! aubes ! chansons ! rosées !
Puis tout bas on ajoute : ô jours bénis et doux !
Hélas ! vous reviendrez ! me retrouverez-vous ?
Victor Hugo (1802 - 1885)
"Les amoureux de la nature" de Chateaubriand
Forêt silencieuse, aimable solitude,
Que j'aime à parcourir votre ombrage ignoré !
Dans vos sombres détours, en rêvant égaré,
J'éprouve un sentiment libre d'inquiétude !
Prestiges de mon [size=16]coeur ! je crois voir s'exhaler[/size]
... Des arbres, des gazons une douce tristesse :
Cette onde que j'entends murmure avec mollesse,
Et dans le fond des bois semble encor m'appeler.
Oh ! que ne puis-je, [size=16]heureux, passer ma vie entière[/size]
Ici, loin des humains !... Au bruit de ces ruisseaux,
Sur un tapis de fleurs, sur l'herbe printanière,
Qu'ignoré je sommeille à l'ombre des ormeaux !
Tout parle, tout me plaît sous ces voûtes tranquilles ;
Ces genêts, ornements d'un sauvage réduit,
Ce chèvrefeuille atteint d'un vent léger qui fuit,
Balancent tour à tour leurs guirlandes mobiles.
Forêts, dans vos abris gardez mes voeux offerts !
A quel amant jamais serez-vous aussi chères ?
D'autres vous rediront des amours étrangères ;
Moi de vos charmes seuls j'entretiens les déserts
de François-René de CHATEAUBRIAND recueil : Tableaux de la nature
"Il pleure dans mon coeur" Paul Verlaine
Il pleure dans mon coeur
Comme il pleut sur la ville;
Quelle est cette langueur
Qui pénètre mon [size=18]coeur ?[/size]
Ô bruit doux de la pluie
Par terre et sur les toits !
Pour un [size=18]coeur qui s'ennuie,
Ô le chant de la pluie ![/size]
Il pleure sans raison
Dans ce [size=18]coeur qui s'écoeure.
Quoi ! nulle trahison ?...
Ce deuil est sans raison.[/size]
C'est bien la pire peine
De ne savoir pourquoi
Sans amour et sans haine
Mon [size=18]coeur a tant de peine ![/size]
Paul VERLAINE (1844- 1896)
"Sensation "d'ARTHUR RIMBAUD
..
SENSATION
Par les soirs bleus d'été, j'irai dans les sentiers,
Picoté par les blés, fouler l'herbe menue :
Rêveur, j'en sentirai la fraîcheur à mes pieds.
Je laisserai le vent baigner ma tête nue.
Je ne parlerai pas, je ne penserai rien :
Mais l'amour infini me montera dans l'âme,
Et j'irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la [size=16]nature, -heureux comme avec une femme."
20 Avril 1870...
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Ninnenne