Oh ! ce bonheur
Si rare et si frêle parfois
Qu'il nous fait peur.
Nous avons beau taire nos voix
Et nous faire comme une tente,
Avec toute ta chevelure,
Pour nous créer un abri sûr,
Souvent l'angoisse en nos âmes fermente.
Mais notre amour étant comme un ange à genoux
Prie et supplie
Que l'avenir donne à d'autres que nous
Même [size=16]tendresse et même vie, [/size]
Pour que leur sort, de notre sort, ne soit jaloux.
Et puis, aux jours mauvais, quand les grands soirs
Illimitent, jusques au ciel, le désespoir,
Nous demandons pardon à la nuit qui s'enflamme
De la douceur de notre âme.
Oh ! ce bonheur
Si rare et si frêle parfois
Qu'il nous fait peur.
Nous avons beau taire nos voix
Et nous faire comme une tente,
Avec toute ta chevelure,
Pour nous créer un abri sûr,
Souvent l'angoisse en nos âmes fermente.
Mais notre amour étant comme un ange à genoux
Prie et supplie
Que l'avenir donne à d'autres que nous
Même [size=16]tendresse et même vie, [/size]
Pour que leur sort, de notre sort, ne soit jaloux.
Et puis, aux jours mauvais, quand les grands soirs
Illimitent, jusques au ciel, le désespoir,
Nous demandons pardon à la nuit qui s'enflamme
De la douceur de notre âme.
Oh ! ce bonheur
Si rare et si frêle parfois
Qu'il nous fait peur.
Nous avons beau taire nos voix
Et nous faire comme une tente,
Avec toute ta chevelure,
Pour nous créer un abri sûr,
Souvent l'angoisse en nos âmes fermente.
Mais notre amour étant comme un ange à genoux
Prie et supplie
Que l'avenir donne à d'autres que nous
Même [size=16]tendresse et même vie, [/size]
Pour que leur sort, de notre sort, ne soit jaloux.
Et puis, aux jours mauvais, quand les grands soirs
Illimitent, jusques au ciel, le désespoir,
Nous demandons pardon à la nuit qui s'enflamme
De la douceur de notre âme.
Émile Verhaeren
A une chatte
A une chatte
Chatte blanche, chatte sans tache,
Je te demande, dans ces vers,
Quel secret dort dans tes yeux verts,
Quel sarcasme sous ta moustache.
Tu nous lorgnes, pensant tout bas
Que nos fronts pâles, que nos lèvres
Déteintes en de folles fièvres,
Que nos yeux creux ne valent pas
Ton museau que ton nez termine,
[size=11]Rose comme un bouton de sein, [/size]
Tes oreilles dont le dessin
Couronne fièrement ta mine.
Pourquoi cette sérénité ?
Aurais-tu la clé des problèmes
Qui nous font, frissonnants et blêmes,
Passer le printemps et l’été ?
Devant la mort qui nous menace,
[size=11]Chats et gens, ton flair, plus subtil
Que notre savoir, te dit-il
Où va la beauté qui s’efface,[/size]
Où va la pensée, où s’en vont
Les défuntes splendeurs charnelles ?
Chatte, détourne tes prunelles ;
J’y trouve trop de noir au fond.
Charles Cros
Femme qui passe
A une passante
La rue assourdissante autour de [size=16]moi hurlait.[/size]
Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
Une [size=16]femme passa, d'une main fastueuse
Soulevant, balançant le feston et l'ourlet ;
Agile et noble, avec sa jambe de statue.
Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
Dans son oeil, ciel livide où germe l'ouragan,
La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.
Un éclair... puis la nuit ! - Fugitive beauté
Dont le regard m'a fait soudainement renaître,
Ne te verrai-je plus que dans l'éternité ?
Ailleurs, bien loin d'ici ! trop tard ! jamais peut-être !
Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
Ô toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais ![/size]
Charles Baudelaire
Les caresses des yeux
Les caresses des yeux
Auguste Angellier
Les caresses des yeux sont les plus adorables ;
Elles apportent l'âme aux limites de l'être,
Et livrent des secrets autrement ineffables,
Dans lesquels seul le [size=16]fond du coeur peut apparaître.
Les baisers les plus purs sont grossiers auprès d'elles ;
Leur langage est plus fort que toutes les paroles ;
Rien n'exprime que lui les choses immortelles
Qui passent par instants dans nos êtres frivoles.
Lorsque l'âge a vieilli la bouche et le sourire
Dont le pli lentement s'est comblé de tristesses,
Elles gardent encor leur limpide tendresse ;
Faites pour consoler, enivrer et séduire,
Elles ont les douceurs, les ardeurs et les charmes !
Et quelle autre caresse a traversé des larmes ?[/size]
A La Tour Eiffel
La tour Eiffel, vieille carcasse
Tu es la reine de Paris
Indifférente au vent qui passe
En caressant tes boulons gris
Quand tu te mires dans la Seine
Narcisse n’est pas ton cousin
Sans toi, il aurait de la peine
Le fameux titi parisien
En découvrant ta silhouette
Les touristes lèvent le nez
Tu sais jouer à la vedette
En exhibant ton corps d’acier
Et tu te donnes à chaque étage
Aux visiteurs émerveillés
Qui admirent le paysage
De la capitale à tes pieds
Que sont les tours de l’Amérique
Et les chinoises de Shanghai
Que du béton froid et statique
De Singapour et de Dubaï
La tour Eiffel ma vielle amie
Tu es le phare des Français
Et tout le [size=18]monde nous envie
Les Japonais et les Anglais[/size]
Anacreodes
Entre nous deux la rivière
Entre nous deux la rivière
Coule et nous sépare
Le pont, le vieux pont de pierre
S'est rompu ce soir
Toi sur la rive d'en face
Tu es malheureux
Mon cœur ne tient plus en place
J'ai des larmes aux yeux
Mon cœur ne tient plus en place
J'ai des larmes aux yeux
Que j'entende le tonnerre
Ou qu'il fasse beau
Seule au bord de la rivière
J'envie les oiseaux
Qui chantent leur vie entière
Du matin au soir
Et volent sur la rivière
Pour aller te voir
Et volent sur la rivière
Pour aller te voir
Ni toi, ni moi
Que c'est triste
Ne savons nager
Que l'hiver s'en vienne vite
Que l'eau soit gelée
Toi de la rive d'en face
Moi de mon côté
Nous marcherons sur la glace
Pour nous retrouver
Nous marcherons sur la glace
Pour nous retrouver
N. Heiman / M. Jourdan
À la faveur de la nuit
Se glisser dans ton ombre à la faveur de la [size=16]nuit.[/size]
Suivre tes pas, ton ombre à la fenêtre.
Cette ombre à la fenêtre c'est toi, ce n'est pas une autre, c'est toi.
N'ouvre pas cette fenêtre derrière les rideaux de laquelle tu bouges.
Ferme les yeux.
Je voudrais les fermer avec mes lèvres.
Mais la fenêtre s'ouvre et le vent, le vent qui balance bizarrement
la flamme et le drapeau entoure ma fuite de son manteau.
La fenêtre s'ouvre: ce n'est pas toi.
Je le savais bien.
Robert Desnos (A la Mystérieuse, 1926
Ninnenne