La légèreté Christian Bobin +Silence Jean-Marc Gonnetan +Le peuple des près. René Char

La légèreté Christian Bobin

La légéreté, elle est partout, dans l'insolente fraîcheur des pluies d'été, sur les ailes d'un [size=16]livre abandonné au bas d'un lit, dans la rumeur des cloches de monastère à l'heure des offices, une rumeur enfantine et vibrante, dans un prénom mille et mille fois murmuré comme on mâche un brin d'herbe, dans la fée d'une lumière au détour d'un virage sur les routes serpentines du Jura, dans la pauvreté tâtonnante des sonates de Schubert, dans la cérémonie de fermer lentement les volets sur le soir, dans la fine touche de bleu, bleu pâle, bleu violet, sur les paupières d'un nouveau né, dans ladouceur d'ouvrir une lettre attendue, en différant une seconde l'instant de la lire, dans le bruit des châtaignes explosant sur le sol et dans la maladresse d'un chien glissant sur un étang gelé, j'arrête là, la légèreté, vous voyez bien, elle est partout donnée.[/size]

Et si en même temps elle est rare, d'une rareté incroyable, c'est qu'il nous manque l'art de recevoir, simplement ce qui nous est partout donné.

Christian Bobin

La légèreté, elle est dans l'envol d'un [size=16]papillon qui se pose sur la fleur, elle est dans cette petite coccinelle qui vient confiante sur ma main,[/size]

elle est dans le souffle du vent à la cime des sapins de la forêt ou dans le bruissement des feuilles du grand chêne, elle est dans l'ondulation des blés en ses vagues dorées, dans la vision dHénya qui court sur ses petites pattes vers moi...

Silence Jean-Marc Gonnetan

La maison est en silence
En silence de ta voix
De ton souffle et de tes parfums

La maison est vide
De ce qui habitait mon coeur

Le silence omniprésent
De tout ce qui est notre quotidien...
Du glissement de ton peignoir
Aux entrechocs d'une table mise

Le silence est omniprésent
Dans mes [size=18]pensées qui ne deviennent mot
Que pour s'étouffer en écho sur chacun de mes murs.[/size]

Jean-Marc Gonnetan

Un très beau poème sur le silence de l'absence et la solitude du manque d'un être cher.

Le peuple des près. René Char

Le peuple des prés m'enchante.

Sa beauté frêle et dépourvue de venin, je ne

me lasse pas de me la réciter.

Le campagnol, la taupe, sombres [size=18]enfants[/size]

perdus dans la chimère de l'herbe, l'orvet,

fils du verre, le grillon,

moutonnier comme pas un, la sauterelle qui

claque et compte son linge, la [size=18]papillon qui[/size]

simule l'ivresse et agace les fleurs de ses

hoquets silencieux, les fourmis

assagies par la grande étendue verte, et

immédiatement

au-dessus les météores hirondelles...

Prairie, vous êtes le boîtier du jour.

René Char

C'est tellement vrai que le peuple des forêts ou des près enchante les regards...
De la colonne de fourmis, qui inlassablement travaillent, aux abeilles qui butinent sur les [size=18]lavandes , aux papillons qui volètent si beaux dans leurs habits de couleurs, aux musaraignes qui se faufilent entre les pierres des vieux murs...une vie est là sous mes yeux émerveillés...[/size]
Et quand la nuit descend, le coucou au loin répond à la chouette ou au hibou...Tout une vie à chaque instant...La vie tout simplement...

Ninnenne

A l'impossible jean-Marc Gonnetan

A l'impossible

A l'impossible reconstruction des êtres
Qui sans vouloir se déchirer
Ne savent plus, ne peuvent plus
Ni s'écouter, ni se dire...

A l'impossible retour du temps passé
Où la passion s'est effacée
Où l'amour s'est détruit sans savoir, sans pouvoir...

A l'impossible fin de notre amour
Mon [size=16]coeur souffre
De ces jours si heureux
Qui nous ont unis
Depuis si longtemps
D'amour, de bonheur
D'étreintes, de caresses
De je t'aime, en passion
De caresses en fusion.[/size]

Jean-Marc Gonnetan

Un très beau [size=16]poème sur l'usure que peut faire le temps, les habitudes, la routine sur un couple...Oui, ne savent plus s'écouter, s'aider, se dire, se parler, échanger...même s'ils se sont aimés passionnément, ont élevé des enfants, ont partagé des bonheurs et des épreuves. C'est une triste vérité de la vie pour beaucoup.[/size]

Mon amie la rose Cécile Caulier

La légèreté Christian Bobin +Silence Jean-Marc Gonnetan +Le peuple des près. René Char 4e783271

Mon amie la rose

[size=18]On est bien peu de chose[/size]

[size=18]Et mon amie la rose[/size]

[size=18]Me l'a dit ce matin[/size]

[size=18]A l'aurore je suis née[/size]

[size=18]Baptisée de rosée[/size]

[size=18]Je me suis épanouie[/size]

[size=18]Heureuse et amoureuse[/size]

[size=18]Aux rayons du soleil[/size]

[size=18]Me suis fermée la nuit[/size]

[size=18]Me suis réveillée vieille[/size]

[size=18]Pourtant j'étais très belle[/size]

[size=18]Oui j'étais la plus belle[/size]

[size=18]Des [size=18]fleurs de ton jardin[/size][/size]

[size=18]On est bien peu de chose[/size]

[size=18]Et mon amie la rose[/size]

[size=18]Me l'a dit ce matin[/size]

[size=18]Vois le dieu qui m'a faite[/size]

[size=18]Me fait courber la tête[/size]

[size=18]Et je sens que je tombe[/size]

[size=18]Mon coe?ur est presque nu[/size]

[size=18]J'ai le pied dans la tombe[/size]

[size=18]Déjà je ne suis plus[/size]

[size=18]Tu m'admirais hier[/size]

[size=18]Et je serai poussière[/size]

[size=18]Pour toujours demain.[/size]

[size=18]On est bien peu de chose[/size]

[size=18]Et mon amie la rose[/size]

[size=18]Est morte ce matin[/size]

[size=18]La lune cette nuit[/size]

[size=18]A veillé mon amie[/size]

[size=18]Moi en rêve j'ai vu[/size]

[size=18]Eblouissante et nue[/size]

[size=18]Son âme qui dansait[/size]

[size=18]Bien au-delà des nues[/size]

[size=18]Et qui me souriait[/size]

[size=18]Crois celui qui peut croire[/size]

[size=18]Moi, j'ai besoin d'espoir[/size]

[size=18]Sinon je ne suis rien[/size]

[size=18]Ou bien si peu de chose[/size]

[size=18]C'est mon amie la rose[/size]

[size=18]Qui l'a dit hier matin[/size]

Cécile Caulier

Ninnenne