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BÉBÉS D'AUTREFOIS

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Photos familiales ou de studio, découvrez en images les visages des bambins d'antan. Batz-sur-Mer, Loire-Atlantique - Juin 1947 © DR - Archive de Anne-Marie Pommard
 
(Reportage, textes et photos : "L'Internaute")
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A voir ce groupe de cousins, les grandes familles étaient très répandues dans la première moitié du XXe siècle. (Treauville, Manche - Janvier 1949) © DR - Archive de Mary Thiebot
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La poussette a été inventée à la fin du XIXe siècle : un progrès de taille qui a révolutionné le "portage" des enfants. (Picardie, France - Août 1955) © DR - Archive de Edith Fernandez
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Ces enfants nés juste après-guerre goûtent aux joies de leurs premières vacances à la mer. (Pas-de-Calais, France - Juillet 1948) © DR - Archive de Héléna Duhoo
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Avant que les appareils photos compacts soient répandus, les bébés étaient souvent photographiés en studio. (Verdun, Marne - Février 1944) © DR - Archive de Anne-Sophie Deschamps
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Au début du XXe siècle, la plupart des enfants étaient issus de couples mariés. Aujourd'hui un enfant sur deux naît hors mariage. (Paris, France - Juin 1903) © DR - Archive de Serge Agombart
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Avant 1930, une grande majorité de la population vivait à la campagne. Dès leur plus jeune âge, les enfants découvraient les joies de la vie à la ferme. (Belgique - Juin 1923) © DR - Archive de Chantal Togni
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Autrefois, les jeunes années des enfants étaient presque toujours marquées par des cérémonies religieuses comme le baptême et la communion. (Drôme, France - Juillet 1889) © DR - Archive de Michel Roussin
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A l'image de cette petite fille, le passage chez le photographe était l'occasion de revêtir ses plus beaux atours. (Saint-Venant,  Pas-de-Calais - Mars 1947) © DR - Archive de Héléna Duhoo
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Après-guerre, l'Europe a connu un important baby-boom. (Marchienne-au-pont, Belgique - Juillet 1945) © DR - Archive de Daisy Demoor
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Au début du XXe siècle, les enfants recevaient des jouets uniquement, ou presque, pour la Saint-Nicolas, au début du mois de décembre. (Marseille, Bouches-du-Rhône - Janvier 1920) © DR - Archive de Nicole Ricard
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Jusque dans les années 1960, les femmes avaient en moyenne trois enfants contre à peine deux aujourd'hui. (Wenduine, Belgique - Juillet 1946) © DR - Archive de Chantal Togni
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Si les enfants n'avaient pas autant de jouets que maintenant, certains comme le cheval à bascule ne datent pas d'hier. (Valence, Espagne - Mars 1907) © DR - Archive de Floréal Ibanez
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A voir ce bébé, on pense au dicton disant que les garçons naissent dans les choux et les filles dans les roses. (Espagne - Mai 1922) © DR - Archive de Floréal Ibanez
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A partir de 1936 et jusqu'en 1959, l'instruction était obligatoire de 6 à 14 ans et non de 6 à 16 ans comme c'est le cas aujourd'hui. (Solre-le-Château, Nord - Avril 1940) © DR - Archive de Patrick Delevoy
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A en croire cette photo, les "doudous" sont depuis longtemps appréciés des bébés. (Zaïre - Janvier 1952) © DR - Archive de Dany Colson
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Avec son chapeau et son petit sac à main, cette petite fille a déjà tout d'une grande personne. (France - Juin 1933) © DR - Archive de Christian Meunier
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Filles ou garçons, les nourrissons étaient vêtus à peu près de la même façon. (Batz-sur-Mer, Loire-Atlantique - Septembre 1945) © DR - Archive de Anne-Marie Pommard
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Les débuts de la mode enfantine remontent au XIXe siècle. Aujourd'hui, toutes les grandes marques de vêtements ont un secteur consacré au prêt-à-porter enfantin. (Paris, France - Novembre 1952) © DR - Archive de Christian Meunier
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A voir cette photo des années 1940, l'invention de la chaise haute pour bébé ne date pas d'hier. (Troyes, Aube - Mars 1948) © DR - Archive de Martine Gaulon
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Sur de nombreuses cartes postales anciennes figurent des petites mises en scène comme celle-ci. (Paris, France - Mars 1901) © DR - Archive de Serge Agombart
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A la fin de la Seconde Guerre mondiale, à peine un enfant sur trois allait à l'école avant 6 ans. (La canebière, Marseille - Mars 1948) © DR - Archive de Henri Pendola
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Avant que les jouets en plastique inondent le marché dans les années 1960, les jouets étaient principalement faits en bois, comme ce petit vélo, ou en métal. (Lorient, Morbihan - Mars 1947) © DR - Archive de Nathalie Delusier
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La période de l'entre-deux-guerres a enregistré une baisse de la natalité en raison notamment de la mort d'hommes jeunes pendant le Première Guerre mondiale. (Paris, France - Février 1930) © DR - Archive de Jacqueline Vigne
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Pas besoin de piscine gonflable, une bassine remplie d'eau chauffée au soleil suffisait à ravir nos bambins pendant les journées estivales. (Clermont-Ferrand, Puy-de-Dôme - Juillet 1957) © DR - Archive de Dominique Bayssat

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GILLES CARON : REGARD SUR LES ANNÉES 60

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A l'occasion de l'exposition Scrapbook à Paris, la Galerie Thierry Marlat revient sur le travail du célèbre photo-journaliste Gilles Caron. De la guerre du Vietnam à Mai 68, en passant par des portraits de célébrités, ses images ont marqué toute une génération, et ce malgré sa disparition au Cambodge en 1970. A 27 ans, il était déjà sur des terrains conflictuels, comme ici au Vietnam, en 1967, losqu'il suivait une patrouille américaine. © Fondation Gilles Caron - Contact Press Images
(Reportage, textes et photos : "L'Internaute")
BÉBÉS D'AUTREFOIS(photos,textes)et autres(GILLES CARON : REGARD SUR LES ANNÉES 60 2e0d64ef
Le photo-journaliste a également couvert la guerre civile du Biafra, au Nigéria, en avril 1968. © Gilles Caron
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En octobre 1968, , Gilles Caron suit le Général de Gaulle à Istanbul, alors qu'il est encore président de la République. © Fondation Gilles Caron - Contact Press Images
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En août 1969, le photographe est également présent pour l'anniversaire de l'écrasement du printemps de Pragues. Paris Match publiera dans le même numéro deux reportages de Gilles Caron sur cet évènement et le conflit nord-irlandais. © Fondation Gilles Caron - Contact Press Images
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Toujours en Irlande du nord, en août 1969, une jeune femme se tient au milieu des gravas dans une rue dévastée par les violences. © Fondation Gilles Caron - Contact Press Images
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En août 1969, Gilles Caron est en Irlande du nord. De violents affrontements opposent les catholiques aux militaires anglais. Il faudra attendre presque 30 ans pour que le conflit se termine, avec un processus de paix signé en 1998. © Fondation Gilles Caron - Contact Press Images
BÉBÉS D'AUTREFOIS(photos,textes)et autres(GILLES CARON : REGARD SUR LES ANNÉES 60 5daff42b

Pendant la guerre des six jours, un soldat israélien se repose au bord du canal de Suez, en juin 1967. © Fondation Gilles Caron - Contact Press Images
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Le 5 juin 1967, une guerre israélo-arabe éclate : elle deviendra la guerre des Six jours. Gilles Caron est sur place, il entrera dans Jérusalem avec l'armée israélienne. Ses images, et notamment son portrait de Moshe Dayan, feront de l'agence Gamma, pour qui il travaille, la première agence mondiale grâce à sa parution dans Paris Match. © Fondation Gilles Caron - Contact Press Images
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Un étudiant poursuivi par un CRS trébuche rue des Feuillantines. Paris, mai 1968. © Fondation Gilles Caron - Contact Press Images
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En mai 1968, les manifestations étudiantes enflamment le pays. Daniel Cohn-Bendit, alors jeune contestataire, occupe la Sorbonne. L'homme est devenu par la suite une des personnes emblématiques du mouvement et la photo de Gilles Caron incontournable. © Fondation Gilles Caron - Contact Press Images

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ENFANTS DE LA SHOAH

BÉBÉS D'AUTREFOIS(photos,textes)et autres(GILLES CARON : REGARD SUR LES ANNÉES 60 D9b3d49d
 
La guerre était partout. Dans les bruits de bottes, aussi bien que sur la tenue de la mariée qui sortait de l'église, auréolée du vaporeux voile blanc et vêtue de la longue robe, hâtivement teinte en noir, sinistre témoignage de son deuil douloureux et de l’imbécillité humaine qui venait de faire mourir sans raison un père ou un frère.
Mais il y avait aussi les baignades du dimanche au bord de la Seine où nous nous amusions à attraper les libellules, et faisions des traversées en barque, laissant traîner les mains dans l'eau et tentant d'attraper un poisson qui s'égarait trop près de la surface. Le plaisir des journées ensoleillées, le doux clapotis de l'eau sous les rames, les fraîches senteurs de la campagne, le ciel d'un bleu radieux, les rires sous les éclaboussures que nous provoquions nous faisaient comme des parenthèses de bonheur.
Et puis, un jour, la Libération est arrivée. Plus de soldats allemands. Plus de bombes. On a crié, dansé, pleuré. La folie. La ville s'est remplie de soldats américains et de jeunes femmes tondues, la tête serrée dans un foulard aux pointes attachées au-dessus du front. (Rachel)
 
**********
 
 
Dans Bordeaux, il en sortait de partout, de ces brassards tricolores ! Résistants de la dernière heure et collabos de la première. Tous clandestins, tous héros de l'ombre. Une ombre si épaisse que personne ne les y avait jamais vus à l'œuvre. Les brassards s'étaient multipliés dans la nuit. C'était à se demander comment les allemands avaient pu survivre sans être étouffés par tant de héros, et comment on avait pu déporter tant de monde sans que tous les trains sautent dans toutes les gares. (Yves)
 
**********
 
 
C'est la Libération ! J'entends les clameurs venant de la rue, les gens rient et font beaucoup de bruit, c'est maintenant une autre vie qui semble si gaie et insouciante. Bien sûr, ils sont partis, ils ne reviendront plus, mais le mal est fait, il me ronge. Dans la foule en liesse, Angèle pleure beaucoup : on a rasé les beaux cheveux de sa maman, elle me fait peur ainsi ; les gens l'insultent et se moquent d'elle, j'ai pitié et je pleure aussi ; malgré tout c'est chez elle que je me suis réfugiée, elle m'a acceptée... (Renée)
 
**********
 
 
Nous avons vécu la Libération dans ce village, et c'était épique car effectivement la moitié du village était collaborateur, et l'autre moitié résistant et il y a eu des règlements de comptes sanglants. Il y a eu immédiatement des poursuites en voitures de certaines personnes du village qui ont mitraillé celles qui étaient considérées comme collaborateurs. Et c'était quand même très dur parce que c'était des personnes que nous côtoyions journellement, et on les a vues mortes sur le bord de la route ; on a vu ce village tout petit et qui paraissait si paisible tout d'un coup devenir sanguinaire. Dans un sens, on trouvait que c'était très bien parce que ces gens avaient fait du mal, mais c'était très choquant de voir que c'était par la mort que ça se traduisait. Moi je ne savais pas encore que ma famille était morte. Je pensais que j'allais la retrouver après la Libération, que nous allions rentrer à Paris et que tout le monde serait libéré. Donc je me trouvais confrontée à la mort à ce moment-là et j'ai trouvé ça terrible. Un village de trois cents habitants, avec une moitié qui a tué l'autre moitié, c'était vraiment épouvantable. (Rosette)
 
**********
 
 
Cette gamine était d'une famille d'origine alsacienne. Ils habitaient dans la même cité ouvrière que nous. Ces alsaciens avaient des cousins qui avaient été enrôlés dans l'armée allemande et qui sont venus les voir pendant la guerre avec leur uniforme. A la libération – cette fille avait deux grandes sœurs qui avaient peut-être entre dix-huit et vingt ans – les beaux résistants qu'on a vus, ceux de la 25ème heure, sont venus, ont arrêté les deux gamines, les ont traînées jusqu'à Epinay-sur-Seine sur la place de l'église, les ont fait monter sur une estrade, leur ont rasé la tête, leur ont dessiné des croix gammées et les ont fait défiler. Et la petite, la sœur, était avec nous. C'est vraiment un souvenir horrible que j'ai gardé toute ma vie. (Charlotte)
 
**********
 
 
Un jour je reviens de l'école et les gens me disent : « Mado, viens vite, devine qui est là ». Et moi je dis : « C'est ma maman ! ». « Non, ça n'est pas ta maman, viens voir ». C'était un homme maigre, rabougri, complètement... Il sortait de camp. C'était mon père. Et moi j'ai eu un véritable dégoût pour cet homme. Mon père c'était tout autre chose, c'était un homme fort. Cette blessure, je ne m'en suis jamais remise. Mon père sanglotait parce qu'il était heureux... Plus il sanglotait, plus j'étais dégoûtée... (Larissa)
 
*********
 
 
Tout le monde avait quelqu'un qui venait lui dire : « Voilà, je sais que tu es là, tes parents, je ne les ai pas vus mais nous, on est là. S'il y a quelque chose, on est là ». Et nous, personne. Le temps passe et personne, toujours personne. Et le centre d'enfants commence à se vider. Le temps passe, les gens commencent à s'installer, récupèrent leurs enfants. Il y avait de moins en moins d'enfants et nous, on était toujours là, personne n'étant venu nous réclamer. (Hélène).
 
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Au Lutétia, il y avait une grande salle où il y avait des tables où on faisait manger les déportés, on leur servait un repas après les avoir épouillés, passés à l'étuve. Pour une gamine de quinze ans, voir des hommes nus, des squelettes ambulants défiler, c'est traumatisant. On allait prendre le micro pour appeler maman au moment où on l'a aperçue à une table en train de manger.
On a hurlé tous les deux : « Maman ! » Toute la salle a levé les yeux et maman a reconnu nos voix et elle cherchait partout d'où ça venait. Je la vois encore lever ses grands yeux bleus. Elle ne nous a pas vus. Elle tournait partout. Ils ne réalisaient pas, tous ces pauvres squelettes qui arrivaient. Et elle était pétrifiée, maman ; elle avait entendu nos voix sans nous voir. On a descendu en quatrième vitesse l'escalier, je crois que toute la salle pleurait quand ils ont vu... parce qu'on était les seuls enfants à pouvoir approcher nos parents qui rentraient. On la tirait pour qu'elle vienne avec nous, on avait tellement peur de la reperdre. Elle ne voulait pas laisser son assiette : « Attendez, je vais finir de manger, je viens avec vous. - Mais, maman, viens, tu mangeras à la maison. » Elle ne voulait pas laisser son assiette et on l'embrassait, on la tenait.... On a perturbé tous ces pauvres gens qui étaient déjà tellement tristes. Je pense qu'on leur a donné l'espoir qu'ils avaient peut-être aussi de retrouver les leurs à ce moment-là. Elle pesait trente huit kilos, c'était pourtant une femme qui était grande, forte, mais elle était belle, elle était superbe. Et on l'a enlevée, on l'a tirée, on a repris un taxi, on la tenait comme si c'était le Messie. (Betty)
 
("Paroles d'étoiles - Mémoire d'enfants cachés" - Extraits - Librio)
 
Je vous conseille vivement ce livre bourré de lettres, de témoignages d'enfants cachés, déportés... Enfin, des témoignages horribles, d'autres émouvants... L'être humain peut être autant horrible que merveilleux.
 
En Lituanie, une école clandestine a été installée dans le ghetto de Kaunas. Le cliché, a été pris entre 1941 et 1942 par David Chaim Ratner.
 
Pour que personne n'oublie jamais et en hommage aux déportés du Vel d'Hiv.

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Le 23 juin 1944, on nous conduit à Drancy. La France était libérée en Normandie depuis trois semaines. Nous espérions que nous aurions évité la déportation. Il n'en a rien été. J'ai fait partie de l'avant-dernier convoi, du convoi 76. Il y a eu le convoi 77 où sont partis des enfants d'Izieu. Il y a eu 500 enfants qui sont partis du convoi après moi... (Renée)
 
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Nous nous retrouvons à Drancy. Là, il y a des files d'attente dans la cour. Ce qui me choque, ce sont ces habitants qui sont là derrière les grilles, ces curieux, ces badauds, des personnes qui pleurent également. Mais personne ne réagit. Nous montons et nous partons vers quelle destination ? Nous l'ignorons. Et à un moment donné, il y a une embardée dans le bus, nous sommes projetés les uns sur les autres. Pourquoi ? Parce que le conducteur qui a fait cette embardée nous dit à voix haute, il parle tout seul en fait : « Pour un peu, j'aurais écrasé ce chien ». Et dans ma tête, ça se passe très mal. Je me dis : « Comment ? Il transporte à longueur de journée... il fait ce travail macabre de conduire des êtres humains, des hommes, des femmes, des enfants... Combien d'enfants ? Je suis partie avec des enfants d'Izieu. Combien de personnes transporte-t-il par jour ? Et il s'inquiète de ne pas écraser un chien. Alors que sommes-nous, nous, par rapport à une population qui ne réagit pas ? ». Je supporte très mal cette situation. (Renée)
("Paroles d'étoiles - Mémoire d'enfants cachés" - Extraits - Librio)
 
Septembre 1942, toujours les mêmes grilles de la prison centrale de Lodz, en Pologne. Ces enfants arrêtés vont eux aussi être déportés.

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Les souvenirs de la petite enfance ont le goût persistant d'une première fois.
C'était un jour de printemps, en 1944. Des soldats en uniforme vert-Wehrmacht passaient devant nos fenêtres en chantant des musiques martiales. Nous habitions alors au rez-de-chaussée d'un immeuble, au coin de la villa Suzanne à Saint Mandé, pas très loin du Fort de Vincennes. Les bruits cadencés des bottes sur le bitume et les chansons rythmées retentissent encore dans ma mémoire. Les images resurgissent. Je soulève un pan du rideau, fascinée par cette présence à la fois hostile et familière. Mon regard croise celui d'un jeune soldat, puis d'un autre et d'un autre encore. L'un d'eux me fait un signe amical accompagné d'un sourire – il pense peut-être à sa petite sœur ou à son enfant resté en Allemagne. Je réponds en agitant la main et lui envoie un baiser du bout des doigts. Brusquement, mon frère aîné me saisit par le bras m'attirant loin de la fenêtre. Sa réprimande est cinglante : elle fustige ce signe de fraternisation avec les nazis. Ma mère s'approche alors en demandant à Jean de me laisser faire. Une famille juive vivait avec nous, deux enfants et leurs parents : « Il faut apprendre à faire bonne figure pour ne pas attirer l'attention. Notre vie à tous en dépend. Et, peut-être, maintenant, ce soldat n'osera-t-il plus tirer avec un fusil sur des enfants. ». Quatre personnes étaient cachées à la maison. Des inconnus les avaient conduites en pleine nuit. Elles resteront plusieurs mois avec nous. Mon père était au loin, dans je ne sais quelles activités de résistance, mes oncles étaient dans les maquis du Limousin ou internés en Allemagne, mon parrain était déporté à Buchenwald pour avoir organisé des évasions de camps de prisonniers. Il arrivera à s'échapper de Buchenwald et continuera la résistance à Berlin jusqu'à l'arrivée des troupes alliées... Tout cela, nous ne le saurons que plusieurs mois plus tard.
Cette période m'a laissé la sensation prosaïque de la faim : nous partagions quelques gâteaux secs, les lentilles et les rutabagas avec mon frère et les deux enfants -sept personnes vivaient sur les tickets de rationnement prévus pour trois dans le Paris de 1944. Cette période m'a laissé aussi un sentiment diffus de peur : nous répétions chaque jour certains gestes au moindre bruit venu de l'extérieur. Tout était réglé pour disparaître rapidement dans une pièce sans fenêtre dont la porte était dissimulée derrière l'armoire, mon frère me racontera, quelques années plus tard, qu'une carte de France y était accrochée au mur, avec des punaises pour marquer l'avancée des troupes alliées, comme dans une salle d'état-major. Une ultime cachette était prévue sous l'escalier de la cour, dans une sorte d'appentis accessible par une ouverture étroite. Maman y avait installé des couvertures, de l'eau et des provisions au cas où il aurait fallu attendre un certain temps. Nous nous sommes réfugiées plusieurs fois dans ce coin sombre, dont l'atmosphère était étouffante. Nous répétions à voix basse les paroles à prononcer, les réponses aux questions qui auraient pu nous être posées par la police française ou la Gestapo. J'avais quatre ans et demi, mon frère Jean bientôt dix ; les deux autres enfants avaient environ huit et onze ans. Maman craignait une dénonciation ou une descente inopinée de la police, mais il n'y eut aucune délation des voisins ni du concierge, même si ceux-ci avaient manifestement été alertés par les voix et les jeux à étouffer. La famille que ma mère hébergeait a partagé notre vie et nous avons partagé ses angoisses. Elle est partie pour rejoindre les États-Unis, peu avant la libération avec des papiers d'identité obtenus par les résistants. Nous n'avons plus jamais eu de nouvelles. A plusieurs reprises, maman en a parlé, elle aurait aimé savoir ce que signifiait ce silence. Elle n'osait penser au pire, à la disparition de ceux qui étaient devenus des amis ; elle ne voulait pas croire non plus à leur oubli. Peut-être cela se passerait-il comme pour ce jeune homme que des amis avaient caché pendant la guerre et qu'ils croisèrent, un jour par hasard, vingt ans après ? « On ne fait pas les choses pour la gloire ni pour un remerciement, mais parce qu'on doit les faire, c'est tout. Dans la vie, il ne faut pas avoir trop d'illusions sur l'humanité, mais il faut toujours faire comme si les hommes étaient capables du meilleur ». Ma mère nous a transmis en héritage le goût de la liberté partagée et le sens de la fraternité. (Jacqueline)
 
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J'écrivais à papa. J'avais l'impression que j'avais besoin de lui écrire. Et après la guerre, je... quand je me promenais dans la rue, je regardais tous les hommes et je me disais : « C'est peut-être mon père cet homme-là, il lui ressemble ». Et quand quelqu'un lui ressemblait, que je le voyais, j'avais envie de m'approcher de lui, je pensais : « Peut-être il a perdu la mémoire, peut-être il ne se rappelle pas de nous, est-ce que je ne dois pas d'aller vers lui ? ». Je ne pouvais pas imaginer qu'il ne soit plus là, parce qu'il me manquait terriblement. Et je n'ai jamais voulu admettre qu'il soit mort. Je ne l'ai fait que beaucoup plus tard lorsque j'ai vu noir sur blanc le numéro du convoi, son immatriculation. (Renée)
 
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Il y a eu des moments très difficiles et ça a duré jusqu'en 1950. Tous les jours, ma mère prenait mon frère et moi par la main et nous faisait descendre à pied jusqu'à la gare chaque fois qu'il y avait un train qui arrivait de Paris. Parce qu'elle disait toujours : « Papa va revenir, ça n'est pas possible qu'il nous ait abandonnés, ça n'est pas possible qu'on l'ait tué, il va revenir ». A chaque fois, on descendait, on pleurait, mon père n'était pas là ; aucune nouvelle ; on ne savait rien. On a fait faire des recherches par la Croix Rouge française qui n'a rien su nous dire sur mon père. Et donc, maman a essayé de savoir. Rien. Le gouvernement français ne savait rien. Ils lui ont donné un acte de disparition de la date où il avait écrit qu'il partait pour une destination inconnue. Et ensuite, cinq ans après, il y a eu un jugement. C'est par ce jugement qu'on a dit, donc, que mon père était mort en déportation. (Betty)
 
("Paroles d'étoiles - Mémoire d'enfants cachés" - Extraits - Librio)
 
Rescapés ! Ces jeunes ont survécu à Buchenwald. Le wagon qui les ramène en gare de Thionville, ce 6 juin 1945, est marqué du terme "Waisen", orphelins.

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On connaissait nos prénoms, on savait que nous étions des enfants cachés et qui nous cachait, on savait bien sûr aussi que cela était strictement interdit. Et jamais aucun de ces paysans ne nous trahit, jamais, au risque de leur propre vie et de celle de leur famille, aucun ne transgressa la loi d'airain de l'hospitalité des humbles, la grandeur des montagnards, la fierté silencieuse des petits. Tout pauvres qu'ils fussent, sans moyens, sans confort, menant une vie rude et austère, une existence âpre et difficile, ils furent tous, en cela, des seigneurs. Ils avaient l'instinct immémorial de ce que l'on doit faire et de ce que l'on ne doit pas faire. (Olga Tarcali - « Retour à Erfurt » - L'Harmattan, 2001)
 
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Lettre pastorale écrite par Mgr. Saliège, évêque du diocèse de Toulouse (lue en chaire dans les églises – 22 août 1942).
 
EGLISE, où est ton DEVOIR ?
 
Il y a une morale chrétienne. Il y a une morale humaine qui impose des devoirs et reconnaît des droits. Ces devoirs et ses droits tiennent à la nature de l'homme. Ils viennent de Dieu. On ne peut pas les violer. Il n'est au pouvoir d'aucun mortel de ses supprimer.
Que des enfants, des hommes, des femmes, des pères, des mères, soient traités comme un vil troupeau, que les membres d'une même famille soient séparés les uns des autres, et embarqués pour une destination inconnue, il était réservé à notre temps de voir ce triste spectacle.
Seigneur, ayez pitié de nous. Notre Dame, priez pour la France. Dans notre diocèse, des scènes d'épouvante ont lieu dans les camps de Noé, et de Récébédou. Les juifs sont des hommes, les juives sont des femmes.
Les étrangers sont des hommes, les étrangères sont des femmes. Tout n'est pas permis contre eux, contre ces hommes, contre ces femmes, contre ces pères et mères de famille.
Ils font partie du genre humain. Ils sont nos frères comme tant d'autres.
Un chrétien ne peut l'oublier.
France, patrie bien aimée, France qui portes dans la conscience de tous tes enfants la tradition du respect de la personne humaine, France, chevaleresque et généreuse, je n'en doute pas, tu n'es pas responsable de ces horreurs. (Mgr. Saliège)
 
("Paroles d'étoiles - Mémoire d'enfants cachés" - Extraits - Librio)
 
Nous sommes en Lituanie en 1944. La jeune Rosian Bagriansky vit cachée dans une ferme. Un cliché joyeux qui tranche avec les images terribles des déportations.

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J'ai appris plus tard que cette dame, cette famille qui m'a accueillie, j'allais dire adoptée, c'était une famille qui n'avait pas d'enfants, la dame ne pouvait pas en avoir. Lorsqu'il a été question que je reparte au bout de quelques jours puisque c'était provisoire, elle a dit à sa sœur : « Non, je ne veux pas la laisser partir, nous la gardons ». Et la sœur, l'assistante sociale lui a dit : « Mais vous savez ce que vous risquez en cachant une juive à la maison ». Et la dame aurait répondu : « Je préfère mourir en ayant connu la joie d'avoir un enfant que de vivre sans ». Donc, ils ont pris tous les risques et c'est ainsi que je suis restée dans cette famille. Il y avait beaucoup de tendresse. J'ai le souvenir d'une punition où on m'avait envoyée au lit et où on m'a réveillée avec des bisous. Lorsque ma mère venait me voir, je lui disais : « Bonjour, madame ». Ça lui a été très difficile. Quand elle repartait, elle pleurait beaucoup. (Liliane).
 
("Paroles d'étoiles - Mémoires d'enfants cachés" - Extraits - Librio)
 
Marcel Borensztajn, 10 ans, écrit à son père depuis Pithiviers. Il sera déporté depuis cette commune du Loiret vers Auschwitz dans le convoi 24, le 26 août 1942. Soit 7 jours après ce billet.

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Lettre de Liliane Gerenstein, onze ans, née à Nice, écrite à Dieu, quelques jours avant son arrestation à Izieu. Ses parents étaient déjà déportés.
 
« Dieu ? Que vous êtes bon, que vous êtes gentil et s'il fallait compter le nombre de bontés et de gentillesses que vous nous avez faites il ne finirait jamais... Dieu ? C'est vous qui commandez. C'est vous qui êtes la justice, c'est vous qui récompensez les bons et punissez les méchants. Dieu ? Après cela je pourrai dire que je ne vous oublierai jamais. Je penserai toujours à vous, même aux derniers moments de ma vie. Vous pouvez être sûr et certain. Vous êtes pour moi quelque chose que je ne peux pas dire, tellement que vous êtes bon. Vous pouvez me croire. Dieu ? C'est grâce à vous que j'ai eu une belle vie avant, que j'ai été gâtée, que j'ai eu de belles choses, que les autres n'ont pas. Dieu ? Après cela, je vous demande qu'une seule chose : FAITES REVENIR MES PARENTS, MES PAUVRES PARENTS, PROTEGEZ-LES (encore plus que moi-même) QUE JE LES REVOIE LE PLUS TÔT POSSIBLE, FAITES-LES REVENIR ENCORE UNE FOIS. Ah ! Je pouvais dire que j'avais une si bonne maman et un si bon papa ! J'ai tellement confiance en vous que je vous dis un merci à l'avance. ». (Liliane - « Mémorial de la déportation des enfants juifs en France » - Serge Klarsfeld, Librairie Arthème Fayard, 2001)
 
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De temps en temps, comme ça, à cinq heures du matin, elle entrait dans les chambres en tapant dans les mains : « Allez, les enfants ! On part dans la montagne voir le soleil se lever ! » Alors tout le monde se levait, très, très vite. On s'habillait à la hâte. Les plus grands prenaient les petits, et on partait d'un bon pas, à cinq heures et demie le matin, très haut dans la montagne. Nous on comprenait pas. Mais après on a compris : c'est parce que ce jour-là, la milice devait venir dans le village, et que les résistants avaient prévenu la directrice d'éloigner les enfants. Comme ça, c'est arrivé quelques fois, on allait voir le soleil se lever dans la montagne. (Suzanne)
 
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C'est la plus belle histoire d'amour de ma vie. Je suis tombée chez des gens très âgés, M. et Mme Beyrand. Je leur dois d'être là encore aujourd'hui. Ces gens-là ne se sont pas contentés de nous abriter, ce qui aurait été déjà beaucoup. En plus, ils nous ont aimées, aimées beaucoup, au point de nous donner leur nom. Ma sœur s'appelait Jacqueline Beyrand. Et je m'appelais Colette Beyrand. La seule certitude que j'ai, c'est que c'étaient des gens d'amour, de qualité et vraiment des gens extraordinaires. Et vraiment pour moi, c'est ma famille, ce sont mes grands-parents. Leur photo est à portée de ma vue tous les jours. Je leur dois vraiment une immense reconnaissance. (Colette)
 
("Paroles d'étoiles - Mémoires d'enfants cachés" - Extraits - Librio)
 
L'enfant qui se trouve de dos sur cette image et qui porte l'étoile imposée aux Juifs doit faire ses adieux à sa famille à travers un grillage. Il est enfermé dans la prison centrale du ghetto de Lodz, en Pologne.

ENFANTS DE LA SHOAH

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On a atterri chez des paysans en Normandie, dans la manche. Ces gens étaient des monstres. Ils nous ont torturés, ils nous ont battus... On les payait pour cacher des enfants, donc ils nous ont pris. Nous étions les souffre-douleur. Mon petit frère avait tellement peur, il avait trois ans, qu'un jour il avait fait pipi dans sa culotte et ils lui ont collé une botte d'orties dans sa culotte. La femme était très méchante. Avec elle, c'était toujours des coups. Quand je lui disais : « Mais pourquoi tu me bats ? Qu'est-ce que j'ai fait ? » Elle me disait : « Si moi je le sais pas, toi tu le sais. ».
On n'arrivait pas à manger, on vomissait, elle nous faisait remanger notre vomi. C'est trop dur à dire, on a l'impression de se salir soi-même en le disant. Ça duré jusqu'à la libération. (Hélène)
 
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Lorsque notre « nourrice » organisait des repas, il y avait deux services. Un pour les enfants dont les parents payaient et puis un pour nous, les enfants juifs, qui mangions des repas tout-à-fait différents... On a vraiment souffert de la faim, au point qu'on en était réduits à commettre des larcins. La nuit, on se levait, on allait voler des morceaux de sucre, du pain, des tickets de pain, de l'argent pour pouvoir en acheter le lendemain quand on allait à l'école. Un mouvement de solidarité s'est créé autour de nous... Il y avait en particulier une famille de polonais, mais de non juifs, qui nous ont pris en affection et qui s'arrangeaient plus ou moins pour nous laisser passer des sandwichs en cachette ; il ne fallait pas que ça se sache parce qu'on aurait été massacrés... (Samuel)
 
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J'ai été violée peu de temps après mon arrivée par le frère de la personne qui nous gardait ; il s'appelait Pierre, c'était un célibataire qui travaillait à l'usine de chaussures dans une petite ville située à quelques kilomètres du village où nous nous trouvions. Il était aussi fossoyeur lorsque le besoin se présentait.
Il a fallu cacher ce viol et transformer la réalité : « Tu es tombée les jambes écartées alors que tu jouais à chat avec Pierre, il t'a poussée dans le dos ». Les seuls souvenirs que j'avais de l’événement étaient « l'accident » et « le sang » ou plutôt le sang et la répétition des faits tels que la mère Lulu voulait qu'ils soient nommés. Je ne me vois pas physiquement « saignant » ou perdant du sang, je me revois juste sur une table, je suis blessée entre les jambes et une femme est penchée sur moi et me soigne. Plus loin, dans un coin de la pièce, il y a un homme là, debout, qui regarde la scène. Je suis gênée, embarrassée par la présence de cet homme qui assiste à la scène alors que je suis dans cette position. C'est l'homme qui me dérange... (Solange)
 
("Paroles d'étoiles - Mémoires d'enfants cachés" - Extraits - Librio)
 
Image, datée de la période 1942-1944, d'un parc de jeux interdit aux Juif à Paris.

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A Lyon, on m'a inscrite à l'école. C'était une classe unique avec des enfants de tous les âges. Avant que je rentre à l'école, on m'a fait une « leçon d'identité » et on m'a dit : « Tu ne t'appelles plus Goldberg, tu t'appelles Page, Lily Page. ». J'ai essayé d'intégrer ça./ Je me suis retrouvée dans une salle de classe. J'étais déjà une petite fille objetisée, chosifiée. Je n'étais pas une enfant comme on en voit actuellement, délurée, réfléchie, ayant le sens de l'environnement. On me disait espiègle et mignonne. Mais dans mes souvenirs, quelque chose en moi était un peu passif comme si je subissais déjà les choses. Et donc je me suis retrouvée en classe, et l'instituteur a fait l'appel, il a donné plusieurs noms. A chaque fois, il y avait un aller retour, un nom et puis une réponse « présent ! » ou « présente ! » Et à un moment donné, j'entends un nom avec insistance, personne ne répond, encore une fois, personne. Et subitement, illumination, c'était moi. On m'appelait « Page ». Et d'un seul coup j'ai levé le doigt comme si on me réveillait et j'ai dit : « C'est moi ! » avec l'impression d'avoir échappé à quelque chose d'horrible. (Liliane)
 
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Je ne me rappelle pas votre nom, Mère supérieure, et la nuit, je m'efforce d'oublier votre visage. Mais votre voix me poursuivra jusqu'à la fin de mes jours, jusqu'à mon dernier souffle. Vous faites peur et vous êtes la méchanceté même. Quand vous faites votre inspection du soir, vous entrez dans l'obscurité du dortoir comme un spectre en blanc pour vous assurer que tous les enfants ont bien fait leur prière à genoux, avant de se coucher. Moi je me cache sous ma couverture. Vous ne vous arrêtez jamais devant mon lit. Comment puis-je savoir que je suis différent ? Que je suis juif ? (Maurice Roth « L'enfant cow » - Éditions Le Capucin, 2001)
 
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J'avais six ou sept ans. On avait des dames qui venaient nous faire le patronage. Et ces dames-là m'ont dit un jour : « Tu sais, c'est ton père qui a tué Jésus... ». Donc, dans ma tête, je voyais mon père clouer les mains de Jésus... Et elles me disaient : « Toi, tu ne peux pas prendre l'hostie, tu ne peux pas communier le dimanche. ». Je voyais les autres faire leur prière tous les soirs. Je faisais toujours la mienne. Je me disais : « Eux iront en enfer mais pas moi. ». Et quand j'en suis sortie, quand je suis rentrée à la maison, je me disais toujours : « Eux iront tous en enfer et pas moi. ». Et j'avais presque pris mon père en grippe en me disant : « C'est lui qui a tué Jésus ». (Ginette)
 
("Paroles d'étoiles - Mémoire d'enfants cachés" - Extraits - Librio)
 
Ici, plusieurs enfants en détresse lors des grandes rafles du ghetto de Varsovie, en Pologne. Nous sommes en avril-mai 1943.

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Cette poupée, qui porte l'étoile jaune et part visiblement en voyage, a été confectionnée par Erna Bonnova à Terezin. En novembre 1941, les Allemands créent un ghetto juif dans cette ville tchèque.
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CHAPITRE 4 : NUIT
 
Certains enfants jouent dans les cours ; les ruelles pétillent de leurs éclats de rire... Mais vous êtes ailleurs... Vous êtes un enfant du silence. Vous naviguez de nuit, en passager clandestin, blotti tantôt à fond de cale, tantôt sur le pont de ce bâtiment qui vous a recueilli et qui semble errer çà l'aveuglette : bateau fantôme, sans pavillon, sans port d'attache, veillant à dissimuler toujours son point d'(origine et son point de destination... Lorsque la mer est grosse, vous vous verrez au plus profond du ventre du navire, caché dans une malle ou dans un placard, prisonnier d'une nuit stérile, sourde, close et sans étoile... Bercé par la nausée des odeurs de moisi, de renfermé, de relents de machines, de sueur et de tripes.
 
(...)Les parfums des saisons de la vie qui continue à faire chanter les sources, malgré la noria des autobus dans les villes, malgré la course des trains qui n'en finissent pas de transpercer le brouillard et la nuit pour charrier vers l'est leur cargaison d'hommes, de femmes et d'enfants, de ces trains dont on pourrait croire qu'ils font entendre, à travers le halètement des chaudières et la plainte des sifflets de leurs locomotives, les mugissements de l'enfer.
 
Quand ils ne sont pas vêtus d'un uniforme, les démons, les naufrageurs et les pirates qui hantent vos mauvais rêves ont une allure très ordinaire. Ils peuvent avoir le visage de l'homme au chapeau qui passe dans la rue ; celui du paysan courbé sur le manche de sa bêche ; celui de l'épicière qui remonte son rideau de fer ; celui de la dame du troisième étage qui cache ses bigoudis sous un foulard ou encore la figure de l'adolescent qui descend la poubelle dans l'escalier. Parmi eux il en est un qui se contente d'épier, sans aller jusqu'à dénoncer, mais chacun de leurs regards est comme un fer porté au rouge qui viendrait marquer votre épaule d'une fleur de lys vengeresse... D'autres écrivent des lettres anonymes et venimeuses qu'ils envoient à la police ou à la Kommandantur... D'autres pillent les appartements déserts après l'arrestation de leurs locataires. Certains rançonnent leur prochain, vendant au prix de l'or ou des bijoux de famille la nourriture, les faux papiers, l'anonymat, monnayant au prix fort la fonction du passeur véreux ou celle de la nourrice indigne et tortionnaire...
D'autres enfin s'en viennent vendre leurs voisins pour quelques francs sachant très bien que d'une façon ou d'une autre, votre tête est mise à prix...
 
Mais vous découvrirez parfois qu'à côté de ces démons, de ces requins furtifs, de ces écumeurs des océans de la misère et de la détresse humaine, à côté de la foule anonyme et dense des lâches, des passifs et des indifférents, il est aussi des anges anonymes, sauveurs et courageux ; des justes, des femmes et des hommes de bonne volonté, qui n'ont perdu ni l'âme ni la sensibilité de leur enfance... Ils ne sont pas si nombreux... Ils ne sont pas si rares... Ils ne sont animés ni par l'esprit de calcul, ni par le fiel de la haine, ni par l'appât du gain... Ils ne sont pas intimidés par la violence d'une tempête qui pourtant les terrorise... Il y a quelque chose, comme la lueur d'un phare, comme un éclat d'humanité qui brille dans leur regard. Il y a là comme un soupçon de poudre d'étoile, de cette même étoile qui semble, après avoir crucifié votre enfance, vous protéger à présent, de toute la persévérance de sa si lointaine lumière...
 
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J'étais seule au monde... J'ai passé la semaine complète en dormant dans les escaliers de service des immeubles, en m'installant dans les toilettes quand j'entendais un bruit. Je ne pouvais même pas m'y asseoir... J'avais un tout petit peu d'argent, mais je n'avais pas de carte d'alimentation, et la seule chose que l'on pouvait acheter sans ticket de rationnement, c'était du raison. Alors je me suis gavée de raisons... De violentes coliques m'ont contrainte à l'abstinence... Je ne savais pas où aller ; je ne mangeais plus rien ; je me suis mise à errer, et je suis allée voir ceux qui me paraissaient être des relations ou des amis de mes parents. Leur réponse était toujours la même, qu'ils soient juifs ou qu'ils ne le soient pas. Ils devaient avoir peur. Probablement la peur plus que l'indifférence. Dans le meilleur des cas, ils m'invitaient à venir prendre le thé « un jour ou l'autre »,« pour parler des miens » : jamais aucun d'eux ne m'a posé la seule question vitale pour mon avenir : « Quand as-tu mangé pour la dernière fois ? As-tu faim ? Où dors-tu ce soir ? ». (Irène)
 
("Paroles d'étoiles" - Mémoires d'enfants cachés" - Extraits - Librio)
 
Cette enfant juive allemande a trouvé refuge ce 2 décembre 1938 dans le camp de Harwich, en Angleterre. Elle s'agrippe à ses affaires, dont une poupée qui a certainement voyagé avec elle depuis l'Allemagne.

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Un peu avant la mi-août, c'est-à-dire déjà un mois après le Vel d'Hiv, ils ont appelé les femmes et les enfants au-dessus de cinq ans. Ça a été leur tour d'être dans la cour en plein mois d'août, toute la journée, et le soir... expédiés. Et il restait dans la paille... les bébés ! Nous n'étions que deux pour prendre soin d'eux : Mlle de la Chapelle et moi. Le tout dans une dizaine de baraquements. C'était absolument fou. Deux jours avant, il y en avait trop, on n'avait plus rien pour les changer. C'était affreux. Je suis encore réveillée la nuit par les cris, les hurlements qui ne m'ont pas quittée.
Le jour où ils se sont décidés à emmener les bébés, les moins de cinq ans, et les nourrissons, alors on nous a priées de repartir. On a pris le train à la gare de Beaune-la-Rolande. Des parisiens qui avaient été chez des amis ou chez des cousins de la campagne rentraient en chantant, heureux, béats... Ils rapportaient un poulet, des pommes de terre. Et nous, on sortait de l'enfer ! ... C'était affreux ! Descendre gare de Lyon et voir les filles françaises aux terrasses des cafés, assises sur les genoux des officiers allemands... On avait l'impression de sortir d'un autre monde. (Micheline)
 
**********
 
 
Près de Paris, il y a une énorme gare de triage... Là, on a vu des wagons avec des enfants qui partaient : des wagons à bestiaux, avec les mains des enfants. Les enfants chantaient dans les wagons. Ma mère, c'est simple, elle s'est évanouie. Il faisait une chaleur terrible, ces enfants dans les wagons qui voulaient de l'eau... C'était... Il y avait un vieux monsieur près de nous, et j'avais l'impression qu'il sentait quelque chose : il m'a pris la main. Et puis le train est parti, je ne sais plus si ce sont les enfants qui sont partis d'abord ou nous... (Irène)
 
("Paroles d'étoiles - Mémoire d'enfants cachés" - Extraits - Librio)
 
Cet enfant, et celui qui est certainement son père, attendent. Ils vont bientôt être déshabillés, puis exécutés. Ce terrible cliché a été pris en Ukraine, le 16 octobre 1941.

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On écrivait des cartes à mon père. Ma sœur avait un langage codé pour lui dire... « L'orage monte, le temps est très mauvais en ce moment », quand il y avait des rafles, des choses comme ça. Elle a fait ça toute seule. Je ne sais pas comment elle a pu trouver toute seule tout ce langage. Mon père le lisait pas très bien le français mais il comprenait très bien. (Flore)
 
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Trois jours après l'arrestation de son père et de sa mère, Nathan Zakon écrit au Préfet régional de la Marne pour implorer sa clémence à l'égard de sa sœur et de ses parents...
 
Monsieur le Préfet Régional,
 
J'ai bien l'honneur très respectueusement de solliciter de votre bienveillance votre intervention auprès des autorités allemandes pour faire revenir mon père et ma mère qui ont été arrêtés le 9 octobre 1942 sans autre motif que d'être de religion juive.
Le 19 juillet 1942, une sœur âgée de 18 ans, avait déjà été enlevée, et à ce jour aucune nouvelle d'elle n'est parvenue, ce fait nous a déjà été signalé. Arrestation à Saint-Dizier, départ ensuite pour Châlons-sur-Marne et enfin transfert à Drancy d'où nous n'avons plus rien reçu d'elle depuis son départ de cette ville.
Ma mère, Mme Zakon est âgée de 52 ans et de plus gravement malade ayant besoin de l'aide constante d'une tierce personne.
Mon père, Zakon Israël âgé de 49 ans est lui aussi malade, il était en instance de soins et aux ordres de M. le docteur Desprès, de Saint-Dizier qui avait prévu un mois d'arrêt de travail.
Malgré une telle situation, ils furent emmenés l'un et l'autre par la police française et très certainement sur l'ordre de l'autorité allemande...
Monsieur le Préfet régional, je place tous mes espoirs en vos sentiments humanitaires. Je fais appel à votre esprit de justice et d'équité. Je m'adresse en un mot au père de famille que vous êtes pour que par votre intervention bienveillante et humaine, mon père, ma mère et ma sœur me soient retournés au foyer détruit et pour calmer mes inquiétudes à leur sujet.
J'attends votre décision à leur égard avec ferme confiance et en attendant votre honorable réponse et la suite qui sera réservée à vos démarches »s, je vous prie de croire, Monsieur le Préfet régional, à mes sentiments de reconnaissance anticipée et à mes respects.
Votre tout dévoué,
Zakon Nathan, âgé de 17 ans, seul et sans soutien, 52, place de la République à Saint-Dizier – Haute Marne.
 
La lettre de Nathan a entraîné son arrestation... Il a été déporté avec ses parents quinze jours après que le Préfet a reçu sa lettre.
(« Mémorial de la déportation des enfants juifs en France » - Serge Klarsfeld, Librairie Arthème Fayard, 2001)
 
("Paroles d'étoiles - Mémoire d'enfants cachés" - Extraits - Librio)
 
Ces Juifs hollandais sont rassemblés sur une place, ils vont être déportés, en famille cette fois. Devant le petit garçon, près des couvertures, un jouet qu'il compte sans doute emmener avec lui. Photo 1942.

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Il n'y avait qu'un seul groupe de tinettes. Il fallait être dix en bas de l'escalier pour être autorisés à y aller. Alors il fallait se mettre en rang par deux, et si on n'était pas dix, il fallait attendre qu'il y en ait encore d'autres. Ma sœur avait une dysenterie épouvantable. Elle devait courir tout le temps. Nous avons été mises d'emblée avec les enfants qui venaient de Pithiviers, dans ce qu'on appelle le bloc des partants. Un bloc, c'était six escaliers, c'était 1-2-3 ; 4-5-6. Et c'était là qu'on mettait ceux qui allaient être déportés tout de suite. Donc ça n'était pas la peine de les installer : il n'y avait plus de châlits, il y avait de la paille par terre, il n'y avait pas de sanitaires du tout. Il y avait une tinette dans un couloir, dans l'escalier. Ça dégoulinait d'un escalier à l'autre. Il n'y avait qu'un point d'eau. C'était absolument affreux. Les gosses qui étaient là attendaient. On était sur le départ, on ne savait pas où on allait aller. On ne savait pas où étaient partis les parents. Les enfants n'arrivaient même plus à pleurer. Ils se couchaient ; ils ne se nourrissaient pas ; ils faisaient pipi sur eux. C'était le cauchemar. On était dans l'escalier 4 et nous avons donc vu le départ de l'escalier 1-2-3 qui a été vidé de matin de bonne heure. La veille, les enfants sont passés successivement dans la cour dans une espèce de coin limité par une espèce de paravent, qu'on voyait de haut. On y tondait pour le départ, pour la déportation. Tous les gens qui partaient étaient tondus. Et ma hantise à moi, c'était de savoir que deux jour après, ce serait mon tour, j'allais être tondue. C'était la première crainte. C'était encore un stade de plus vers l'humiliation. Nous attendions... On était résigné. A l'époque, il y avait trois départs par semaine et 1.000 personnes par départ. (Annette)
 
**********
 
 
Des autobus arrivent. Nous en sortons des petits êtres dans un état inimaginable. Une nuée d'insectes les environnent ainsi qu'une odeur terrible. Ils ont mis des jours et des nuits pour venir de Pithiviers en wagons plombés ; 90 par wagon avec une femme qui, en général, a deux, trois, quatre gosses à elle dans le dos.
Ils ont de quinze à treize ans, leur état de saleté est indescriptible, les 3/4 sont remplis de plaies suppurantes : impétigo. Il y aurait tant à faire pour eux. Mais nous ne disposons de rien, malgré le dévouement incomparable de notre chef de camp, le commandant Kohn. Immédiatement nous organisons des douches. Pour 1.000 enfants, nous disposons de quatre serviettes ! Et encore avec difficulté. Par groupes nous emmenons ces enfants aux douches. Une fois nus, ils sont encore plus effrayants. Ils sont tous d'une maigreur terrible et vraiment presque tous ont des plaies : il va falloir essuyer les enfants sains avec une serviette et les autres presque toujours avec la même souillée. Notre cœur se serre.
Autre drame : ils ont presque tous la dysenterie. Leurs linge sont souillé d'une manière incroyable et leur petit baluchon ne vaut guère mieux. Les mamans les avaient quittés avec leurs petites affaires bien en ordre, mais il y a de cela quelques semaines et, depuis, ils sont livrés à eux-mêmes. Dans le wagon, ils ont d'ailleurs mélangé leurs affaires. Des femmes de bonne volonté se mettent à laver leurs effets, presque sans savon à l'eau froide ; à cette époque, il fait très chaud et cela sèche vite, mais ils sont 1.000 !
Très vite nous nous rendons compte que tout ce que nous essayons de faire est inutile. Dès que nous remettons à ces petits des effets un peu propres, une heure après ils sont sales. Les médecins les examinent à tour de bras. On leur administre du charbon, on les barbouille tous de mercurochrome. On voudrait les mettre tous à l'infirmerie ; c'est impossible : ils doivent repartir vers une destination inconnue.
Lâchement, nous leur avons dit qu'ils allaient retrouver leurs parents et pour cela ils supportaient tout.
 
Jamais nous n'oublierons les visages de ces enfants : sans cesse, ils défilent devant mes yeux. Ils sont gravés, profonds et, ceci est extraordinaire, dans ces petites figures, l'horreur des jours qu'ils traversent est stigmatisée en eux. Ils ont tout compris, comme des grands. Certains ont des petits frères ou des sœur et s'en occupent admirablement, ils ont compris leurs responsabilités.
Ils nous montrent ce qu'ils ont de plus précieux : la photo de leur père et de leur maman que celle-ci leur a donnée au moment de la séparation. A la hâte, les mères ont écrit une tendre dédicace. Nous avons toutes les larmes aux yeux ; nous imaginons cet instant tragique, l'immense douleur des mères. Ces enfants savent que, comme des adultes, ils seront impitoyablement fouillés par les gens de la police aux Questions juives. Entre eux, ils se demandent s'ils auront la chance de conserver un petit bracelet, une petite médaille, souvenir des temps heureux?. Ils savent que ces bijoux n'ont pas grande valeur pais ils connaissent la cupidité de leurs bourreaux. Une petite fille de cinq ans me dit : « N'est-ce pas, madame, ils ne me la prendront pas ma médaille, c'est pas de l'or. ».
Dans leurs petits vêtements, les mères ont cousu un ou deux billets de mille francs et ce petit garçon de six ans nous demande : « fais le gendarme pour voir si tu découvres mon argent. ». Quelques fois, la vie reprend le dessus : comme des enfants, ils jouent ; ils ont des jeux à eux : ils jouent à « la fouille », à « la déportation ».
Il y a des contagieux. On en met à l'infirmerie en vitesse. Avec les moyens du bord, on fabrique de petits lits ; mais ils sont des quantités à partir avec la scarlatine, la diphtérie... Nous essayons de faire la liste de leurs noms. Nous sommes surpris par une chose tragique : les petits ne savent pas leurs noms. Un petit garçon, auquel nous essayons par tous les moyens de le lui faire dire, répète inlassablement : « Mais je suis le petit frère de Pierre. ». Les prénoms, noms et adresses que les mamans avaient écrits sur leurs vêtements avaient complètement disparu à la pluie et d'autres, par jeu ou par inadvertance, ont échangé leurs vêtements.
En face de leur numéro figuraient sur les listes des points d'interrogation.
La question nourriture est aussi un désastre : que donner à ces petits déjà malades, cette soupe d'eau et de carottes, pas assez de récipients, ni de cuillères. Nous étions obligées de faire manger les plus petits.
Je me souviens d'une petite fille de deux ans environ, adorable, et qui, miraculeusement était restée propre. Une de mes amies l'avait prise dans ses bras pour la faire manger. Immédiatement elle s'était assoupie ; chaque fois qu'on voulait la déposer sur une paillasse, elle se réveillait et hurlait. Elle avait rencontré une tendresse qu'elle ne connaissait plus et ne voulait plus qu'on l'abandonne. Mon amie, les larmes aux yeux, n'osait plus la quitter et s'occuper des autres qui, -tous, avaient besoin de nous. IL fallait les coucher trous ou quatre sur des paillasses infectes et qui le devenaient d'heure en heure de plus en plus, çà cause de cette dysenterie, qui torturait tous ces corps.
Beaucoup n'avaient plus de chaussures. Nos cordonniers à certains ont pu fabriquer des spartiates avec des morceaux de bois et des ficelles/ D'autres sont partis nu-pieds.
Avant le départ pour le grand voyage, on passait à la tonte les hommes et les enfants des deux sexes. Cette mesure est vexatoire et agit beaucoup sur le moral des individus, particulièrement chez les enfants. Un petit garçon pleurait à chaudes larmes. Il avait environ cinq ans. Il était ravissant, des cheveux blonds bouclés, qui n'avaient jamais connu les ciseaux. Il répétait qu'il ne voulait pas qu'on lui coupe les cheveux ; sa maman en était si fière et, puisqu'on lui promettait qu'il allait la retrouver, il fallait qu'elle retrouve son petit garçon intact.
Après le départ de ces 3.000 ou 4.000 enfants sans parents, il en restait 80 vraiment trop malades pour partir avec les autres ;; mais on ne pouvait les garder plus longtemps. Nous leur préparons quelques vêtements. Ils ont de deux à douze ans. Comme les adultes, ils sont mis dans ces escaliers de départ inoubliables. On laissait parquées les 1.000 personnes choisies pour le prochain départ pendant deux ou trois jours, isolées du reste du camp. Hommes, femmes, enfants, sur de la paille, souillée rapidement... Tous gisaient sur la paille mouillée, mourants qu'on transporte sur des civières, aveugles, etc.
Une amie et moi devions, à partir de trois heures du matin, nous occuper de ces 80 enfants, les préparer au départ, les habiller... En rentrant dans ces chambrées, il y avait de quoi se trouver mal. Je trouvais mes enfants endormis, les petits déjà infectés avec leur dysenterie. Sans lumière, je commençais à les préparer ; je ne savais pas par quel bout commencer. Vers cinq heures du matin, il fallait descendre dans la cour, pour qu'ils soient prêts à monter dans les autobus de la STCRP qui menaient les déportés à la gare du Bourget.
Impossible de les faire descendre : ils se mirent à hurler ; une vraie révolte ; ils ne voulaient pas bouger. L'instinct de conservation. On ne les mènerait pas à l'abattoir aussi facilement. Cette scène était épouvantable ; je savais qu'il n'y avait rien à faire ; coûte que coûte, on les ferait partir.
En bas, on s'énervait. Les enfants ne descendaient pas. J'essayais de les prendre un par un pour les faire descendre ; ils étaient déchaînés, ils se débattaient, hurlaient. Les plus petits étaient incapables de porter leurs petits paquet. Les gendarmes sont montés et ont bien su les faire descendre. Ce spectacle en ébranla tout de même quelques-uns.
Au moment du départ, on pointait chaque déporté. Sur les 80 gosses, environ 20 ne savaient pas leurs noms. Tout doucement, nous avons essayé de leur faire dire leur noms ; sans résultat. A ce moment surgit devant moi le maître de toutes ces destinées, le sous-officier allemand Heinrichohn, vingt-deux ans, très élégant en culotte de cheval. Il venait à chaque départ assister à ce spectacle qui, visiblement, lui procurait une immense joie.
Je ne puis oublier la voix de ce petit garçon de quatre ans, qui répétait sans arrêt sur le même ton, avec une voix grave, une voix de basse incroyable dans ce petit corps : « Maman, je vais avoir peu, maman, je vais avoir peur. ». (Odette - « Mémorial de la déportation des enfants juifs en France » - Serge Klarsfeld – Librairie Arhème Fayard, 2001)
 
("Paroles d'étoiles - Mémoire d'enfants cachés" - Extraits - Librio)
 
Ces enfants juifs du ghetto de Lodz, en Pologne, sont en train d'embarquer dans un train. Leur déportation intervient durant la "Gehsperre", "l'action couvre-feu", en septembre 1942.

BÉBÉS D'AUTREFOIS(photos,textes)et autres(GILLES CARON : REGARD SUR LES ANNÉES 60 2f22be04
 
A six heures, on cogne à la porte. C'est un inspecteur de police. Il nous ordonne de préparer une valise de vêtements et de le suivre. D'autres policiers entraînent des groupes de juifs, des familles entières portant des ballots de linge et même des matelas, des hommes et des femmes silencieux et pâles, les enfants, mal réveillés, pleurant. Les commerçants accourent sur le pas de leur porte, et les passants nous regardent, étonnés et effrayés. C'est malheureusement la police française qui a arrêté les juifs. On nous fait monter dans les autobus qui portent encore leurs plaques de destinations diverses. Nous roulons à travers les rues de ce quartier de Belleville d'habitude si joyeux et, partout, c'est le même spectacle de juifs emmenés comme des criminels entre les agents. Je regarde les rues ensoleillées qui me semblent l'asile de la liberté que je ne connais plus. Nous arrivons devant la grande porte du Vel'd'Hiv, rue Nelaton. Dans l'entrée des agents disposent des lits de camp. Deux femmes se jettent l'une sur l'autre en pleurant : « C'est là, sur ces petits lits que nous allons dormir ? ». J'interroge un agent : « Il n'y aura jamais assez de lits pour tout le monde ! ». Il rit : « Mais ces lits sont pour nous ; vous coucherez par terre, là-bas. ». Sur la piste où d'habitude courent les cyclistes, les gens sont assis sur leurs valises, effrayés, désorientés. Certains courent et appellent dans tous les sens, mais dans l'ensemble nous sommes là, silencieux, comme paralysés par l'angoisse, ne comprenant pas bien ce qui nous arrive. (Sarah - « Mémorial de la déportation des enfants juifs en France » - Serge Klarsfeld, librairie Arthène Fayard, 2001)
 
**********
 
 
Le Vel'd'Hiv, ça a été terrible. C'était déjà noir de monde. C'était des cris, c'était affreux parce qu'il était déjà bondé. C'était au mois de juillet, il faisait une chaleur terrible. On a été mises dans le haut des gradins. Et là on a passé, je crois, cinq ou six jours. Ça a été le cauchemar... La chaleur, les cris. Les femmes qui appelaient les enfants ou les enfants qui appelaient leurs mères. Je ne me souviens pas de grand-chose sauf de la soif. La soif, cette lumière qui restait toujours allumée... C'était épouvantable. La puanteur... Les toilettes se sont trouvées vite bouchées. Et je vous dirai franchement que je crois qu'on faisait les besoins derrière nous, à côté de nous, je ne sais plus trop où. (Hélène)
 
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A aucun moment il n'y a eu des allemands à cette époque-là. On n'était gardé que par la police française. On était déjà, nous les enfants, recouverts de vermine. Après que les mères ont été déportées, il ne restait plus que les enfants. Ils ne savaient pas quoi faire de nous... A Drancy, rien n'avait été prévu pour les enfants puisque les enfants au départ ne devaient pas être ramassés. Ils ont fait ça, paraît-il, ça a été un « geste humanitaire ». Ils n'ont pas voulu séparer les femmes et les enfants. Quand on est arrivé, on nous a parqué dans une grande pièce qui n'était pas achevée, il n'y avait pas de cloisons, rien du tout. Il y avait de la paille étendue sur ces parquets en ciment. On n'était qu'entre enfants. (Hélène)
 
("Paroles d'étoiles - Mémoires d'enfants cachés" - Extraits - Librio)
 
Ces deux frères restent côte à côte sur la rampe du camp d'Auschwitz-Birkenau. Les jeunes Israël et Zelig Jacob, 11 et 9 ans, ont sans doute peur. Dans quelques instants, la sélection aura lieu. Photo prise par des SS.

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Celle qui a rédigé un journal de bord, célèbre aujourd'hui sous le nom de "Journal d'Anne Frank" pose, souriante, en 1942, aux Pays-Bas. La jeune Juive décèdera en mars 1945.

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Ce 16 juillet 1942, il y a eu 7.000 assassins en uniforme. Tous français. Tous glorieux. Tous ignobles. Intermédiaires de la Gestapo, drapés dans le respect de la légalité et confortés dans leur haine de l'étranger, ces représentants qualifiés de la répression préparaient, à l'aube naissante d'un matin d'été, ce génocide dont ils portent à mes yeux la plus grande part de responsabilité pour la France. Bien plus que les nazis ! (Maurice Rajfus - « Opération Étoile jaune » - Le Cherche-Midi Éditeur, 2002)
 
***********
 
 
La grande rafle a été horrible. Ce dont je me souviens particulièrement, c'est le grand silence, le grand silence qui s'est abattu sur Belleville. Je n'avais pas l'habitude que ce soit tellement silencieux. Et tout d'un coup, des tambourinements aux portes, parce qu'on habitait un immeuble où il y avait beaucoup d'appartements ; des tambourinements aux portes, des cris, un brouhaha. C'était inquiétant. J'entendais beaucoup de bruits dans l'escalier. Et maman, me plaquant la main carrément sur la bouche, et regardant par la fenêtre. Il y avait une voisine en face, qui lui faisait signe de ne pas bouger. Elle mettait son doigt sur ses lèvres. Je ne voyais pas très bien la rue. J'éprouvais une impression de grondement. C'était à la fois silencieux et à la fois une fourmilière. Et puis il y eut des grands cris. J'ai vu quelqu'un tomber par la fenêtre. Je m'en souviens, des hurlements. Et toujours la main de maman devant ma bouche pour m'empêcher de faire du bruit. C'était horrible. Après ça a été très bizarre. La nuit, des bruits de voiture... Et puis à un moment donné, la voisine en face nous a fait signe. Maman a pris un parapluie et son sac. Elle a fermé la porte et nous sommes parties sans rien emporter. Rien d'autre que son sac et le parapluie. (Raymonde)
 
("Paroles d'étoiles - Mémoires d'enfants cachés" - Extraits - Librio)
 
Ce jeune est un orphelin qui a trouvé refuge dans le camp d'Indersdorf, destiné à accueillir les enfants juifs en 1946.

BÉBÉS D'AUTREFOIS(photos,textes)et autres(GILLES CARON : REGARD SUR LES ANNÉES 60 81569541
 
On nous a mis sur des camions pour aller au camp de Gurs. Et nous, on avait mis nos plus jolies affaires ; nos chaussures, avec la pluie, c'était terrible. Gurs était surtout prévu pour des espagnols qui étaient là, qui avaient fui Franco et qui étaient déjà installés. Il y avait des baraques en bois, sans fenêtres, avec de la paille par terre. C'était des baraques prévues pour quarante personnes et on y a mis soixante personnes.
Il n'y avait pas grand-chose à manger. Le matin, il y avait un tout petit peu de café : c'était une espèce d'eau teintée, avec un tout petit peu de sucre, du sucre marron, en poudre. Et puis huit cents grammes de pain, on avait un huitième pour la journée. A midi, on nous donnait des boîtes de conserve, à moitié abîmées, avec une cuillère, il y avait une soupe avec des pois chiches, des navets qui se souriaient après, et je crois qu'une fois par semaine on avait un tout petit peu de viande. On était dans la boue jusqu'aux genoux. Les personnes âgées qui allaient le soir aux latrines, parfois le matin on les trouvait mortes, étouffées dans la boue ; elles étaient tombées et n'avaient pas pu se relever. (Renée).
("Paroles d'étoiles - Mémoires d'enfants cachés" - Extraits - Librio)
 
Ce dessin réalisé à Buchenwald en 1945 est signé Thomas Geve, un jeune Juif berlinois, âgé à l'époque de 15 ans. Arrêté à Berlin en 1943, il est déporté à Auschwitz et sélectionné pour le travail, malgré ses 13 ans.

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Ce dessin marqué d'un "Frappez le Juif" représente la "Nuit de Cristal". Il a été réalisé en 1939 par un enfant allemand réfugié au Château de la Guette, en France.

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Ce dessin d'enfant allemand réfugié en France représente une scène à Dachau. Le texte, en allemand, est édifiant : "Travaille ou meurs, chien". Ce dessin a été réalisé en 1939.

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Mon père était très ami avec un commissaire de police. Ils jouaient à la belote le soir après le travail. En février 1941, ce commissaire rentre au magasin, et dit à mon père : « Simon, on te demande à la mairie. On a besoin de quelques renseignements. ». Mon père, confiant naturellement – comment peut-on ne pas être confiant avec un ami avec qui on joue à la belote, avec qui on mange, avec qui on boit l'apéro ? -, va à la mairie, et même pas un quart d'heure après, le commissaire de police revient voir ma mère et lui dit : « Voilà, il faut préparer une valise pour Simon, il vient d'être arrêté. ». C'était en février 1941. (Betty)
("Paroles d'étoiles - Mémoire d'enfants cachés" - extrait - Librio)
 
Ce dessin daté de 1945 est né sous le crayon de Georges Horan. Il représente l'arrivée d'enfants internés au camp de Drancy.

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A leur arrivée à Auschwitz-Birkenau, ces femmes et ces enfants hongrois ont été jugés inaptes au travail. Ils sont donc sur le chemin de la chambre à gaz n°4 du camp. Cette photo a été prise en mai 1944.



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