BALI : LA CEREMONIE DU LIMAGE DES DENTS
Un rite de passage essentiel.
Photographe professionnel, Alain Issock parcourt régulièrement le [size=24]monde pour couvrir des événements sportifs et shooter les campagnes publicitaires de marques prestigieuses. Parmi les nombreux pays qu’il a traversés, un site a largement conquis son attachement : l’île de Balidécouverte il y a 4 ans, où il retourne avec son épouse dès qu’il a quelques jours devant lui. Une passion telle qu’il pourrait bientôt s’y installer.[/size]
« A chaque fois que nous rentrons à Bali, nous procédons de la même façon. Départ avec un simple guide sous le bras puis location d’une [size=24]voiture sur place. Pas une seule réservation d’hôtel.[/size]
Beaucoup de personnes connaissent la partie très touristique de l’île, notamment les plages du sud, bondées. Malgré cette affluence, l’île a su garder son âme : dès que l’on sort des sentiers battus, on découvre des villages préservés, des balinais heureux de faire découvrir leur culture sans aucune contrepartie.
En octobre 2008, j’ai été invité par un ami balinais, Adi, rencontré l’année précédente, à assister à la cérémonie du limage des dents. Un moment essentiel dans la vie des balinais, qui tiennent dur comme fer à conserver leurs rites ancestraux. »
Propos recueillis par Tâm Tran Huy. [size=18]Photos : Alain Issock (Reportage : Géo).[/size]
BALI : LA CEREMONIE DU LIMAGE DES DENTS
Costumes traditionnels.
Tous les participants sont vêtus de sarongs somptueux et de chemisiers colorés, la tête surmontée d’une coiffe dorée. Ces costumes très onéreux sont loués pour la journée.
La famille rassemblée.
Toute la famille, également habillée en sarongs traditionnels, assiste à la cérémonie.
Etant donné leur coût, les festivités sont souventcollectives, réunissant frères et sœurs, cousins et cousines.
La maison a été soigneusement décorée et les offrandes abondent. Les xylophones du gamelan tintinnabulent tandis qu'une odeur douceâtre d’encens s’est répandue dans l’air.
Dans l’assistance, certains sirotent le café traditionnel balinais, d’autres s’éventent.
Le cérémonial se déroule dans une extrême lenteur : lesgestes sont pondérés et gracieux, l’assistance attentive.
Fasciné, je ne peux m’empêcher de penser qu’à certains Occidentaux pressés, elle pourrait sembler interminable.
Tous les âges.
La cérémonie doit être pratiquée avant le mariage. Lesparticipants ont pour la plupart une vingtaine d’années.
Cependant, je remarque aussi une [size=24]femme qui doit avoir environ 40 ans. L’âge dépend aussi souvent des moyens des participants : la cérémonie coûte entre 150 et 200 euros(le salaire mensuel moyen s’élevant à 50 euros/mois) et tout le monde ne parvient pas à réunir cette sommefacilement.[/size]
Avant le mariage.
Voici Wayan, le frère de notre compagnon. Lui pratique cette cérémonie juste avant son mariage, dans la soirée. Dans ses mains, un kriss. Cette arme blanche de cérémoniea pour réputation d’être dotée de pouvoirs magiques. Elle ne se transmet normalement que de père en fils… même si aujourd’hui, on trouve partout de faux kriss destinés auxtouristes.
Il a très fière allure, en costume et parfaitement maquillé.Hommes et femmes sont d’ailleurs fardés de la même manière.
Gingembre.
Après avoir défilé à la queue leu leu pendant de longues minutes, garçons et filles s’asseyent les uns à côté des autres.
Pour commencer, on leur distribue des morceaux de gingembre que chacun mâche consciencieusement.
Prière.
Depuis près de 2 heures, dans leurs lourds costumes, ils se tiennent en plein soleil. Moment de prière.
Très concentrés, les participants ont l’air calme. Dans le regard de certains, on lit clairement de l’appréhension. Tous savent que le limage des dents est très douloureux.
Eau bénite.
Après la prière solennelle, les jeunes gens sont aspergés d’eau bénite (appelée aussi tirtha). Ils s’en abreuventégalement. Boire de la tirtha permet de recevoir les dieux en soi et de se purifier.
Fabrication d'un liquide divin.
Fabriquée par des chamanes, des prêtres, ou plus rarement par des marionnettistes balinais, la tirtha obéit à une recette très précise.
Pour que de l'eau issue d'une source ou d'un puits sacré soit bénite, elle est versée dans un « bokor », unrécipient de terre cuite qui a été préalablement parfumégrâce à la fumée d’un feu de bois odorant et de fleurs.
Au moment du transvasement, plusieurs mantras sontrécités pour que le liquide se remplisse de présence divine.
Marquage.
Le limeur de dents est un brahmane, un membre de la caste hindoue sacerdotale, première des castes traditionnelles. Avant de procéder à l’opération, il marque les six dents qui vont être limées avec une bague en métal.
Limage.
Les participants enlèvent leurs sandales, montent sur les lits et reçoivent encore de l’eau bénite. Le limeur rabote soigneusement les dents avec une râpe en métal. Ladouleur se lit sur le visage des jeunes gens.
Six dents.
Seules les deux canines de la mâchoire supérieure et les quatre incisives situées entre elles sont limées.
Six vices sont ainsi chassés : la folie, la luxure,l’intempérance, la jalousie, la colère et la cupidité. Ainsi, les jeunes gens se débarrassent de tout ce qu’il y ad’animal en eux avant de passer à l’âge adulte.
Dans le miroir.
Les brahmanes peuvent s’y reprendre à plusieurs fois. Après être passé entre les mains des limeurs, chacun se regarde longuement dans une glace afin de décider s’il préfère arrêter ou poursuivre le limage. Le geste est avant tout symbolique et l’on peut se contenter de quelquescoups de lime rapides.