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MessageSujet: Poèmes de différents auteurs   Poèmes de différents auteurs Icon_minitimeMar 1 Nov - 16:55

Bannières de Mai ** poème sur dame nature **


Bannières de Mai
Aux branches claires des tilleuls
Meurt un maladif hallali.
Mais des chansons spirituelles
Voltigent parmi les groseilles.
Que notre sang rie en nos veines,
Voici s'enchevêtrer les vignes.
Le ciel est joli comme un ange.
L'azur et l'onde communient.
Je sors. Si un rayon me blesse
Je succomberai sur la mousse.

Qu'on patiente et qu'on s'ennuie
C'est trop simple. Fi de mes peines.
je veux que l'été dramatique
Me lie à son char de fortunes
Que par toi beaucoup, ô Nature,
Ah moins seul et moins nul !  je meure.
Au lieu que les Bergers, c'est drôle,
Meurent à peu près par le monde.

Je veux bien que les saisons m'usent.
A toi, Nature, je me rends ;
Et ma faim et toute ma soif.
Et, s'il te plaît, nourris, abreuve.
Rien de rien ne m'illusionne ;
C'est rire aux parents, qu'au soleil,
Mais moi je ne veux rire à rien
Et libre soit cette infortune.
 
Arthur Rimbaud.




Maman
J’ai de toi une image
Qui ne vit qu’en mon cœur.
Là, tes traits sont si purs
Que tu n’as aucun âge.

Là, tu peux me parler
Sans remuer les lèvres,
Tu peux me regarder
Sans ouvrir les paupières.

Et lorsque le malheur
M’attend sur le chemin,
Je le sais par ton cœur
Qui bat contre le mien.


Maurice Carême.




J'ai cueilli cette fleur pour toi


J'ai cueilli cette fleur pour toi sur la colline
 
J'ai cueilli cette fleur pour toi sur la colline.
Dans l'âpre escarpement qui sur le flot s'incline,
Que l'aigle connaît seul et seul peut approcher,
Paisible, elle croissait aux fentes du rocher.
L'ombre baignait les flancs du morne promontoire ;
Je voyais, comme on dresse au lieu d'une victoire
Un grand arc de triomphe éclatant et vermeil,
À l'endroit où s'était englouti le soleil,
La sombre nuit bâtir un porche de nuées.
Des voiles s'enfuyaient, au loin diminuées ;
Quelques toits, s'éclairant au fond d'un entonnoir,
Semblaient craindre de luire et de se laisser voir.
J'ai cueilli cette fleur pour toi, ma bien-aimée.
Elle est pâle, et n'a pas de corolle embaumée,
Sa racine n'a pris sur la crête des monts
Que l'amère senteur des glauques goémons ;
Moi, j'ai dit: Pauvre fleur, du haut de cette cime,
Tu devais t'en aller dans cet immense abîme
Où l'algue et le nuage et les voiles s'en vont.
Va mourir sur un coeur, abîme plus profond.
Fane-toi sur ce sein en qui palpite un monde.
Le ciel, qui te créa pour t'effeuiller dans l'onde,
Te fit pour l'océan, je te donne à l'amour. -
Le vent mêlait les flots; il ne restait du jour
Qu'une vague lueur, lentement effacée.
Oh! comme j'étais triste au fond de ma pensée
Tandis que je songeais, et que le gouffre noir
M'entrait dans l'âme avec tous les frissons du soir !
 
Victor Hugo.
[size=18]Poèmes de différents auteurs 1_63[/size]




La chatte blanche ** poème **


Poèmes de différents auteurs 49eab088

La chatte blanche
 
Chatte blanche, chatte sans taches,
Je te demande, dans ces vers,
Quel secret dort dans tes yeux verts,
Quel sarcasme sous ta moustache.
Tu nous lorgnes, pensant tout bas
Que nos fronts pâles, que nos lèvres
Déteintes en de folles fièvres,
Que nos yeux ne valent pas
Ton museau que ton nez termine,
Rose comme un bouton de sein,
Tes oreilles dont le dessin
Couronne fièrement ta mine.
Pourquoi cette sérénité?
Aurais-tu la clé des problèmes
Qui nous font frissonnant et blêmes,
Passer le printemps et l'été 
Devant la mort qui nous menace,
Chats et gens, ton flair, plus subtil
Que notre savoir, te dit-il
Où va la beauté qui s'efface,
Où va la pensée, où s'en vont
Les défuntes splendeurs charnelles
Chatte, détourne tes prunelles
J'y trouve trop de noir au fond.

Charles Cros.






Suite demain     bonne soirée    Ninnenne    blog de partage  
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MessageSujet: Re: Poèmes de différents auteurs   Poèmes de différents auteurs Icon_minitimeMer 2 Nov - 10:08

La voix d'un ami ** poème **


La voix d'un ami
 
 
Si tu n'as pas perdu cette voix grave et tendre
Qui promenait mon âne au chemin des éclairs
Où s'écoulait limpide avec les ruisseaux clairs,
Éveille un peu ta voix que je voudrais entendre.

Elle manque à ma peine, elle aiderait mes jours.
Dans leurs cent mille voix je ne l'ai pas trouvée.
Pareille à l'espérance en d'autres temps rêvée,
Ta voix ouvre une vie où l'on vivra toujours !

Souffle vers ma maison cette flamme sonore
Qui seule a su répondre aux larmes de mes yeux.
Inutile à la terre, approche-moi des cieux.
Si l'haleine est en toi, que je l'entende encore !

Elle manque à ma peine ; elle aiderait mes jours.
Dans leurs cent mille voix je ne l'ai pas trouvée.
Pareille à l'espérance en d'autres temps rêvée,
Ta voix ouvre une vie où l'on vivra toujours !
 
 
Marceline Desbordes-Valmore.






Les Deux Amis
 
Deux vrais amis vivaient au Monomotopa
L'un ne possédait rien qui n'appartînt à l'autre :
Les amis de ce pays-là
Valent bien dit-on ceux du nôtre.
Une nuit  que chacun s'occupait au sommeil,
Et mettait à profit l'absence du Soleil,
Un de nos deux Amis  sort du lit en alarme :
Il court chez  son intime, éveille les valets :
Morphée avait touché le seuil de ce palais.
L'Ami couché s'étonne, il prend sa bourse, il s'arme; 
Vient trouver l'autre, et dit : Il vous arrive peu
De courir quand on dort ; vous me paraissiez homme
A mieux user du temps destiné pour le somme : 
N'auriez-vous point perdu tout votre argent  au jeu 
En voici. S'il vous est venu quelque querelle,
J'ai mon épée, allons. Vous ennuyez-vous point
De coucher toujours seul ,

Une esclave assez belle
Était à mes côtés : voulez-vous qu'on l'appelle ?
- Non, dit l'ami, ce n'est ni l'un ni l'autre point :
Je vous rends grâce de ce zèle.
Vous m'êtes en dormant un peu triste apparu ;
J'ai craint qu'il ne fût vrai, je suis vite accouru.
Ce maudit songe en est la cause.
Qui d'eux aimait le mieux, que t'en semble, Lecteur ?
Cette difficulté vaut bien qu'on la propose.
Qu'un ami véritable est une douce chose.
Il cherche vos besoins au fond de votre cœur;
Il vous épargne la pudeur
De les lui découvrir vous-même.
Un songe, un rien, tout lui fait peur
Quand il s'agit de ce qu'on aime.

 
 
Jean  de la Fontaine.
[size=18]Poèmes de différents auteurs Violet-2





Amours d'oiseaux ** poème **


Poèmes de différents auteurs 449aa89f

Amours d'oiseaux
 
Deux ramiers voyageurs, emperlés de rosée,
Ont abattu leur vol au bord de ma croisée
Ouverte à l'orient... Je les ai reconnus,
Car chez moi, l'an passé, tous deux étaient venus.

Ces deux beaux pèlerins m'arrivent de Bohême,
À l'époque où fleurit le petit maïanthème,
Et dans les bras noueux de mon grand châtaignier
Bercent leur nid d'amour comme au printemps dernier.

Dans leur farouche instinct de liberté sauvage,
Trop fiers pour jamais vivre en honteux esclavage,
Ils reviennent pourtant sous mon toit familier,
La queue en éventail et gonflant leur collier.

S'ils ont pris le chemin de ma haute fenêtre,
C'est qu'un coup d'œil d'oiseau suffit pour me connaître,
C'est qu'ils sont là chez eux, que tout leur est permis ;
C'est qu'ils n'ont trouvé là que des regards amis.

L'amoureux au col blanc profondément salue
L'heureuse bien-aimée, avec grâce évolue
Et, roucoulant près d'elle, en fait dix fois le tour,
Comme la croyant sourde à ses phrases d'amour.

Riche de souvenirs, le cœur chaud d'espérances,
Multipliant très bas ses graves révérences,
S'il la voit, comme en rêve, ouvrant des yeux troublés,
Dans un rapide éclair tous ses vœux sont comblés.


Ne s'inquiétant pas de moi, qui les regarde,
Ils m'ont dit sans parler : « Ami, que Dieu te garde,
Après ton âge mûr, de vivre trop longtemps.
Nous restons dans nos bois au plus quinze ou vingt ans ;

Quand nous cessons d'aimer, à quoi bon nous survivre
N'attends pas la saison des vents froids et du givre
Pour t'en aller dormir sous les hauts gazons verts,
Car plus tard, sans amour, tristes sont les hivers.

André Lemoyne.




L'enfant et le chien ** poème **


L 'enfant et le chien
 
Un enfant seul,
Tout seul avec en main
Une belle tranche de pain.

Un enfant seul,
Avec un chien
Qui le regarde comme un dieu
Qui tiendrait dans sa main,
La clé du paradis des chiens.

Un enfant seul
Qui mord dans sa tranche de pain,
Et que le monde entier
Observe pour le voir donner
Avec simplicité,
Alors qu'il a très faim,
La moitié de son pain
Bien beurré à son chien.


Maurice Carême.





En écoutant les oiseaux jaser au milieu des branches


En écoutant les oiseaux


Oh ! Quand donc aurez-vous fini, petits oiseaux,
De jaser au milieu des branches et des eaux,
Que nous nous expliquions et que je vous querelle ?
Rouge-gorge, verdier, fauvette, tourterelle,
Oiseaux, je vous entends, je vous connais. Sachez
Que je ne suis pas dupe, ô doux ténors cachés,
De votre mélodie et de votre langage.
Celle que j'aime est loin et pense à moi ; je gage,
O rossignol dont l'hymne, exquis et gracieux,
Donne un frémissement à l'astre dans les cieux,
Que ce que tu dis là, c'est le chant de son âme.
Vous guettez les soupirs de l'homme et de la femme,
Oiseaux ; Quand nous aimons et quand nous triomphons,
Quand notre être, tout bas, s'exhale en chants profonds,
Vous, attentifs, parmi les bois inaccessibles,
Vous saisissez au vol ces strophes invisibles,
Et vous les répétez tout haut, comme de vous ;
Et vous mêlez, pour rendre encor l'hymne plus doux,
A la chanson des coeurs, le battement des ailes ;
Si bien qu'on vous admire, écouteurs infidèles,
Et que le noir sapin murmure aux vieux tilleuls :
« Sont-ils charmants d'avoir trouvé cela tout seuls ! »
Et que l'eau, palpitant sous le chant qui l'effleure,
Baise avec un sanglot le beau saule qui pleure ;
Et que le dur tronc d'arbre a des airs attendris ;
Et que l'épervier rêve, oubliant la perdrix ;
Et que les loups s'en vont songer auprès des louves !
Divin !  dit le hibou ; le moineau dit :Tu trouves ?
Amour, lorsqu'en nos coeurs tu te réfugias,
L'oiseau vint y puiser ce sont ces plagiats,
Ces chants qu'un rossignol, belles,

Prend sur vos bouches,
Qui font que les grands bois courbent

Leurs fronts farouches,
Et que les lourds rochers, stupides et ravis,
Se penchent, les laissant piller le chènevis,
Et ne distinguent plus, dans leurs rêves étranges,
La langue des oiseaux de la langue des anges.



Victor Hugo.

[size=18]Poèmes de différents auteurs Vert-et-jaune[/size]




Les noces du papillon
 
Il faut te marier,
Papillon couleur de neige
Il faut te marier,
Par devant le vieux mûrier.
Chers amis, me marierai-je
Sans me faire un peu prier ?
 Il faut te marier,
Papillon couleur de neige,
Il faut te marier,
Par devant le vieux mûrier.

Moi, dit le limaçon
Pour loger ta papillonne
Moi dit le limaçon
Je te cède ma maison.
Ce qu'un brave cœur me donne
Je l'accepte sans façon
Moi, dit le limaçon
Pour loger ta papillonne
Moi dit le limaçon
Je te cède ma maison.

J'ai là dit la fourmi
Des fragments de vertes cosses
J'ai là dit la fourmi
Quelques grains de blé parmi.
Ah! le beau repas de noces
Tu régales ton ami.
J'ai là dit la fourmi
Des fragments de vertes cosses
J'ai là dit la fourmi
Quelques grains de blé parmi.
Moi dit l'abeille d'or
Mon dessert fera merveille
Moi dit l'abeille d'or
J'ai du miel liquide encor.
Grand merci, gentille abeille,
Qui partage ton trésor !
Moi dit l'abeille d'or
Mon dessert fera merveille
Moi dit l'abeille d'or
J'ai du miel liquide encor.

  Voici cher papillon
Pour le bal fifre et timbale
Voici cher papillon
La musique du sillon.
C'est aimable à vous, Cigale
C'est aimable à toi Grillon!
Voici cher papillon
Pour le bal fifre et timbale
Voici cher papillon
La musique du sillon.

Pour toi je vais briller
Dit le ver luisant dans l'herbe
Pour toi je vais briller
Ne te fais donc plus prier.
Chers amis tout est superbe
Je veux bien me marier !
Pour toi je vais briller
Dit le ver luisant dans l'herbe
Pour toi je vais briller
Ne te fais donc plus prier.

Maurice Bouchor.

[size=18]Poèmes de différents auteurs ANIME-2_3[/size]




Un jardin sous mes mots
 
Roses, jasmins, iris, lilas, volubilis,
Cerisiers du Japon et jeunes arbousiers,
Colorant le matin de leurs chants printaniers
Adornent mon jardin de vivants ex libris.

 
Abeilles et frelons s’y disputant les lys,
Piétinent les pistils sans aucune pitié,
Alors que, s’échappant des pages d’un herbier,
Un papillon de nuit dévore un myosotis.

 
Solitaire et pensif, un arôme somnole
Sous le dais argenté d’un antique olivier,
Dont l’ombre de satin imite l’Acropole.

 
Dans mon jardin aussi, le soleil a planté
Une pure fontaine, comme un encrier,
Où je plonge ma plume et bois l’éternité.

 
Francis Etienne Sicard.
[size=18]Poèmes de différents auteurs 3_44[/size]




Le pot de fleurs
 
Parfois un enfant trouve une petite graine
Et tout d'abord, charmé de ses vives couleurs,
Pour la planter il prend un pot de porcelaine
Orné de dragons bleus et de bizarres fleurs.

Il s'en va. La racine en couleuvres s'allonge,
Sort de terre, fleurit et devient arbrisseau ;
Chaque jour, plus avant, son pied chevelu plonge,
Tant qu'il fasse éclater le ventre du vaisseau.

L'enfant revient ; surpris, il voit la plante grasse
Sur les débris du pot brandir ses verts poignards ;
Il la veut arracher, mais la tige est tenace ;
Il s'obstine, et ses doigts s'ensanglantent aux dards.

Ainsi germa l'amour dans mon âme surprise ;
Je croyais ne semer qu'une fleur de printemps :
C'est un grand aloès dont la racine brise
Le pot de porcelaine aux dessins éclatants.


Théophile Gautier.

[size=18]Poèmes de différents auteurs Violettte_2[/size]




Les Deux Amis
 
Deux vrais amis vivaient au Monomotopa
L'un ne possédait rien qui n'appartînt à l'autre :
Les amis de ce pays-là
Valent bien dit-on ceux du nôtre.
Une nuit  que chacun s'occupait au sommeil,
Et mettait à profit l'absence du Soleil,
Un de nos deux Amis  sort du lit en alarme :
Il court chez  son intime, éveille les valets :
Morphée avait touché le seuil de ce palais.
L'Ami couché s'étonne, il prend sa bourse, il s'arme; 
Vient trouver l'autre, et dit : Il vous arrive peu
De courir quand on dort ; vous me paraissiez homme
A mieux user du temps destiné pour le somme : 
N'auriez-vous point perdu tout votre argent  au jeu 
En voici. S'il vous est venu quelque querelle,
J'ai mon épée, allons. Vous ennuyez-vous point
De coucher toujours seul ,

Une esclave assez belle
Était à mes côtés : voulez-vous qu'on l'appelle ?
- Non, dit l'ami, ce n'est ni l'un ni l'autre point :
Je vous rends grâce de ce zèle.
Vous m'êtes en dormant un peu triste apparu ;
J'ai craint qu'il ne fût vrai, je suis vite accouru.
Ce maudit songe en est la cause.
Qui d'eux aimait le mieux, que t'en semble, Lecteur ?
Cette difficulté vaut bien qu'on la propose.
Qu'un ami véritable est une douce chose.
Il cherche vos besoins au fond de votre cœur;
Il vous épargne la pudeur
De les lui découvrir vous-même.
Un songe, un rien, tout lui fait peur
Quand il s'agit de ce qu'on aime.

 
 
Jean  de la Fontaine.






Un oiseau s'envole
 
Un oiseau s’envole,
II rejette les nues comme un voile inutile,
II n’a jamais craint la lumière,
Enfermé dans son vol
II n’a jamais eu d’ombre.

 
Coquilles des moissons brisées par le soleil.
Toutes les feuilles dans les bois disent oui,
Elles ne savent dire que oui,
Toute question, toute réponse
Et la rosée coule au fond de ce oui.

 
Un homme aux yeux légers décrit le ciel d’amour.
Il en rassemble les merveilles
Comme des feuilles dans un bois,
Comme des oiseaux dans leurs ailes
Et des hommes dans le sommeil.

 
 
Paul Eluard.
[size=18]Poèmes de différents auteurs 2-2_19[/size]


Poèmes de différents auteurs 137077133918257


L'orage
 
Parmi les pommes d’or que frôle un vent léger
Tu m’apparais là-haut, glissant de branche en branche,
Lorsque soudain l’orage accourt en avalanche
Et lacère le front ramu du vieux verger.

Tu fuis craintive et preste et descends de l’échelle
Et t’abrites sous l’appentis dont le mur clair
Devient livide et blanc aux lueurs de l’éclair
Et dont sonne le toit sous la pluie et la grêle.

Mais voici tout le ciel redevenu vermeil.
Alors, dans l’herbe en fleur qui de nouveau t’accueille,
Tu t’avances et tends, pour qu’il rie au soleil,
Le fruit mouillé que tu cueillis, parmi les feuilles.

 
Emile Verhaeren.






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MessageSujet: Re: Poèmes de différents auteurs   Poèmes de différents auteurs Icon_minitimeJeu 3 Nov - 11:55

Un soir d'Automne


Novembre
 
Je te rencontre un soir d'automne, 
Un soir frais, [size=18]rose et monotone. [/size]
Dans le parc oublié, personne.
 
Toutes les chansons se sont tues : 
J'ai vu grelotter les statues, 
Sous tant de feuilles abattues.
 
Tu es perverse. Mais qu'importe 
La complainte pauvre qu'apporte 
Le vent froid par-dessous la porte.
 
Fille d'automne tu t'étonnes 
De mes paroles monotones... 
Il nous reste à vider les tonnes.
 
Charles Cros.




[size=24]La fillette et le poème


La fillette et le poème

Le poème, qu'est-ce que c'est ?
M'a demandé une fillette .
Des pluies lissant leurs longues tresses,
Le ciel frappant à mes volets,
Un pommier tout seul dans un champ
Comme une cage de plein vent,
Le visage triste et lassé
D'une lune blanche et glacée,
Un vol d'oiseaux en liberté,
Une odeur, un cri, une clé .

Et je ne savais que répondre
Jeu de soleil ou ruse d'ombre .
Comment aurais-je su mieux qu'elle
Si la poésie a des ailes
Ou court à pied les champs du monde .

 
Maurice Carême.




Le haut navire apparaissait comme un archange poème


Sur la Mer
 
 
Larges voiles au vent, ainsi que des louanges,
La proue ardente et fière et les haubans vermeils,
Le haut navire apparaissait, comme un archange
Vibrant d'ailes qui marcherait, dans le soleil.

La neige et l'or étincelaient sur sa carène ;
Il étonnait le jour naissant, quand il glissait
Sur le calme de l'eau prismatique et sereine ;
Les mirages, suivant son vol, se déplaçaient.

On ne savait de quelle éclatante Norvège
Le navire, jadis, avait pris son élan,
Ni depuis quand, pareil aux archanges de neige,
Il étonnait les flots de son miracle blanc.

Mais les marins des mers de cristal et d'étoiles
Contaient son aventure avec de tels serments,
Que nul n'osait nier qu'on avait vu ses voiles,
Depuis toujours, joindre la mer aux firmaments.

Sa fuite au loin ou sa présence vagabonde
Hallucinant les caps et les îles du Nord
Et le futur des temps et le passé du monde
Passaient, devant les yeux, quand on narrait son sort.

Au temps des rocs sacrés et des croyances frustes,
Il avait apporté la légende et les dieux,
Dans les tabliers d'or de ses voiles robustes
Gonflés d'espace immense et de vent radieux.

Les apôtres chrétiens avaient nimbé de gloire
Son voyage soudain, vers le pays du gel,
Quand s'avançait, de promontoire en promontoire,
Leur culte jeune à la conquête des autels.

Les pensers de la Grèce et les ardeurs de Rome,
Pour se répandre au coeur des peuples d'Occident,
S'étaient mêlés, ainsi que des grappes d'automne,
A son large espalier de cordages ardents.

Et quand sur l'univers plana quatre-vingt-treize
Livide et merveilleux de foudre et de combats,
Le vol du temps frôla de ses ailes de braise
L'orgueil des pavillons et l'audace des mâts.

Ainsi, de siècle en siècle, au cours fougueux des âges,
Il emplissait d'espoir les horizons amers,
Changeant ses pavillons, changeant ses équipages,
Mais éternel dans son voyage autour des mers.

Et maintenant sa hantise domine encore,
Comme un faisceau tressé de magiques lueurs,
Les yeux et les esprits qui regardent l'aurore
Pour y chercher le nouveau feu des jours meilleurs.

Il vogue ayant à bord les prémices fragiles,
Ce que seront la vie et son éclair, demain,
Ce qu'on a pris non plus au fond des Evangiles,
Mais dans l'instinct mieux défini de l'être humain.

Ce qu'est l'ordre futur et la bonté logique,
Et la nécessité claire, force de tous,
Ce qu'élabore et veut l'humanité tragique
Est oscillant déjà dans l'or de ses remous.

Il passe, en un grand bruit de joie et de louanges,
Frôlant les quais à l'aube ou les môles le soir
Et pour ses pieds vibrants et lumineux d'archange,
L'immense flux des mers s'érige en reposoir.

Et c'est les mains du vent et les bras des marées
Qui d'eux-mêmes, un jour, en nos havres de paix
Pousseront le navire aux voiles effarées
Qui nous hanta toujours, mais n'aborda jamais.

 
Emile Verhaeren.
[size=18]Poèmes de différents auteurs 222_2[/size]




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MessageSujet: Re: Poèmes de différents auteurs   Poèmes de différents auteurs Icon_minitimeJeu 3 Nov - 12:33

Brise marine
 
La chair est triste, hélas ! et j’ai lu tous les livres.
Fuir ! là-bas fuir! Je sens que des oiseaux sont ivres
D’être parmi l’écume inconnue et les cieux !
Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeux
Ne retiendra ce coeur qui dans la mer se trempe
Ô nuits ! ni la clarté déserte de ma lampe
Sur le vide papier que la blancheur défend
Et ni la jeune femme allaitant son enfant.
Je partirai ! Steamer balançant ta mâture,
Lève l’ancre pour une exotique nature !
Un Ennui, désolé par les cruels espoirs,
Croit encore à l’adieu suprême des mouchoirs !
Et, peut-être, les mâts, invitant les orages,
Sont-ils de ceux qu’un vent penche sur les naufrages
Perdus, sans mâts, sans mâts, ni fertiles îlots …
Mais, ô mon coeur, entends le chant des matelots !
 
Stéphane Mallarmé




Le rossignol poème


Poèmes de différents auteurs 7c829175

[size=16]Le Rossignol[/size]
[size=16]Comme un vol criard d'oiseaux en émoi,
Tous mes souvenirs s'abattent sur moi,
S'abattent parmi le feuillage jaune
De mon coeur mirant son tronc plié d'aune
Au tain violet de l'eau des Regrets,
Qui mélancoliquement coule auprès,
S'abattent, et puis la rumeur mauvaise
Qu'une brise moite en montant apaise,
S'éteint par degrés dans l'arbre, si bien
Qu'au bout d'un instant on n'entend plus rien,
Plus rien que la voix célébrant l'Absente,
Plus rien que la voix - ô si languissante! -
De l'oiseau qui fut mon Premier Amour, 
Et qui chante encor comme au premier jour;
Et, dans la splendeur triste d'une lune
Se levant blafarde et solennelle, une
Nuit mélancolique et lourde d'été,
Pleine de silence et d'obscurité,
Berce sur l'azur qu'un vent doux effleure
L'arbre qui frissonne et l'oiseau qui pleure.
[/size]
 
[size=16]Paul Verlaine.[/size]






Le cheval

Le Cheval s'étant voulu venger du Cerf

De tout temps les Chevaux  ne sont nés pour les hommes.
Lorsque le genre humain de gland se contentait,
Âne, Cheval,  et Mule, aux forêts habitait ;

Et l'on ne voyait point, comme au siècle où nous sommes,
Tant de selles et tant de bâts,
Tant de harnois pour les combats,
Tant de chaises, tant de carrosses,

Comme aussi ne voyait-on pas
Tant de festins et tant de noces.
Or un Cheval eut alors différent
Avec un Cerf plein de vitesse,

Et ne pouvant l'attraper en courant,
Il eut recours à l'Homme, implora son adresse.
L'Homme lui mit un frein, lui sauta sur le dos,
Ne lui donna point de repos

Que le Cerf ne fût pris, et n'y laissât la vie ;
Et cela fait, le Cheval remercie
L'Homme son bienfaiteur, disant : Je suis à vous ;
Adieu. Je m'en retourne en mon séjour sauvage.

- Non pas cela, dit l'Homme ; il fait meilleur chez nous :
Je vois trop quel est votre usage.
Demeurez donc ; vous serez bien traité.
Et jusqu'au ventre en la litière.

Hélas ! que sert la bonne chère
Quand on n'a pas la liberté ?
Le Cheval s'aperçut qu'il avait fait folie ;
Mais il n'était plus temps : déjà son écurie

Était prête et toute bâtie.
Il y mourut en traînant son lien.
Sage s'il eût remis une légère offense.
Quel que soit le plaisir que cause la vengeance,

C'est l'acheter trop cher, que l'acheter d'un bien
Sans qui les autres ne sont rien. 

Jean de La Fontaine.
[size=16]Poèmes de différents auteurs 10_30[/size]


[size=24]Le pot de fleurs parfois un enfant trouve une petite graine


Le pot de fleurs
 
Parfois un enfant trouve une petite graine
Et tout d'abord, charmé de ses vives couleurs,
Pour la planter il prend un pot de porcelaine
Orné de dragons bleus et de bizarres fleurs. 
Il s'en va. La racine en couleuvres s'allonge,
Sort de terre, fleurit et devient arbrisseau ;
Chaque jour, plus avant, son pied chevelu plonge,
Tant qu'il fasse éclater le ventre du vaisseau.

L'enfant revient ; surpris, il voit la plante grasse
Sur les débris du pot brandir ses verts poignards ;
Il la veut arracher, mais la tige est tenace ;
Il s'obstine, et ses doigts s'ensanglantent aux dards.

Ainsi germa l'amour dans mon âme surprise ;
Je croyais ne semer qu'une fleur de printemps :
C'est un grand aloès dont la racine brise
Le pot de porcelaine aux dessins éclatants.

 
Théophile Gautier.




Aux arbres
Arbres de la forêt, vous connaissez mon âme!
Au gré des envieux, la foule loue et blâme ;
Vous me connaissez, vous! - vous m’avez vu souvent,
Seul dans vos profondeurs, regardant et rêvant.
Vous le savez, la pierre où court un scarabée,
Une humble goutte d’eau de fleur en fleur tombée,
Un nuage, un oiseau, m’occupent tout un jour.
La contemplation m’emplit le coeur d’amour.
Vous m’avez vu cent fois, dans la vallée obscure,
Avec ces mots que dit l’esprit à la nature,
Questionner tout bas vos rameaux palpitants,
Et du même regard poursuivre en même temps,
Pensif, le front baissé, l’oeil dans l’herbe profonde,
L’étude d’un atome et l’étude du monde.
Attentif à vos bruits qui parlent tous un peu,
Arbres, vous m’avez vu fuir l’homme et chercher Dieu!
Feuilles qui tressaillez à la pointe des branches,
Nids dont le vent au loin sème les plumes blanches,
Clairières, vallons verts, déserts sombres et doux,
Vous savez que je suis calme et pur comme vous.
Comme au ciel vos parfums, mon culte à Dieu s’élance,
Et je suis plein d’oubli comme vous de silence!
La haine sur mon nom répand en vain son fiel ;
Toujours, - je vous atteste, ô bois aimés du ciel! -
J’ai chassé loin de moi toute pensée amère,
Et mon coeur est encor tel que le fit ma mère!

Arbres de ces grands bois qui frissonnez toujours,
Je vous aime, et vous, lierre au seuil des autres sourds,
Ravins où l’on entend filtrer les sources vives,
Buissons que les oiseaux pillent, joyeux convives!
Quand je suis parmi vous, arbres de ces grands bois,
Dans tout ce qui m’entoure et me cache à la fois,
Dans votre solitude où je rentre en moi-même,
Je sens quelqu’un de grand qui m’écoute et qui m’aime!
Aussi, taillis sacrés où Dieu même apparaît,
Arbres religieux, chênes, mousses, forêt,
Forêt! c’est dans votre ombre et dans votre mystère,
C’est sous votre branchage auguste et solitaire,
Que je veux abriter mon sépulcre ignoré,
Et que je veux dormir quand je m’endormirai.

Victor Hugo.
[size=18]Poèmes de différents auteurs 26_4[/size]


Homme libre toujours tu chériras la mer


L'Homme et la mer
 
Homme libre, toujours tu chériras la mer !
La mer est ton miroir, tu contemples ton âme
Dans le déroulement infini de sa lame,
Et ton esprit n'est pas un gouffre moins amer.

Tu te plais à plonger au sein de ton image
Tu l'embrasses des yeux et des bras, et ton coeur
Se distrait quelquefois de sa propre rumeur,
Au bruit de cette plainte indomptable et sauvage.

Vous êtes tous les deux ténébreux et discrets
Homme, nul n'a sondé le fond de tes abîmes
O mer, nul ne connaît tes richesses intimes,
Tant vous êtes jaloux de garder vos secrets !

Cependant voilà des siècles innombrables
Que vous vous combattez sans pitié, ni remords,
Tellement vous aimez le carnage et la mort,
O lutteurs éternels, ô frères implacables !

 
Charles Baudelaire.
[size=18]Poèmes de différents auteurs 11_21[/size]




Les fleurs Ô terre vil monceau de boue * poème *


Les fleurs
 
Ô terre, vil monceau de boue
Où germent d'épineuses fleurs,
Rendons grâce à Dieu, qui secoue
Sur ton sein ses fraîches couleurs !

Sans ces urnes où goutte à goutte
Le ciel rend la force à nos pas,
Tout serait désert, et la route
Au ciel ne s'achèverait pas.

Nous dirions ; À quoi bon poursuivre
Ce sentier qui mène au cercueil ?
Puisqu'on se lasse en vain à vivre,
Mieux vaut s'arrêter sur le seuil.

Mais pour nous cacher les distances,
Sur le chemin de nos douleurs
Tu sèmes le sol d'espérances,
Comme on borde un linceul de fleurs !

Et toi, mon cœur, cœur triste et tendre,
Où chantaient de si fraîches voix ;
Toi qui n'es plus qu'un bloc de cendre
Couvert de charbons noirs et froids,

Ah ! laisse refleurir encore
Ces lueurs d'arrière-saison !
Le soir d'été qui s'évapore
Laisse une pourpre à l'horizon.

Oui, meurs en brûlant, ô mon âme,
Sur ton bûcher d'illusions,
Comme l'astre éteignant sa flamme
S'ensevelit dans ses rayons !


Alphonse de Lamartine.

[size=18]Poèmes de différents auteurs 18_9[/size]




Pour me conduire au Raz poème sur la mer


Pour me conduire au Raz,
J'avais pris à Trogor
Un berger chevelu comme un ancien Évhage
Et nous foulions, humant son arome sauvage,
L'âpre terre kymrique où croît le genêt d'or.

Le couchant rougissait et nous marchions encor,
Lorsque le souffle amer me fouetta le visage
Et l'homme, par-delà le morne paysage
Étendant un long bras, me dit : Senèz Ar-Mor !

Et je vis, me dressant sur la bruyère rose,
L'Océan qui, splendide et monstrueux, arrose
Du sel vert de ses eaux les caps de granit noir

Et mon coeur savoura, devant l'horizon vide
Que reculait vers l'Ouest l'ombre immense du soir,
L'ivresse de l'espace et du vent intrépide.

 
José Maria de Hérédia.




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MessageSujet: Re: Poèmes de différents auteurs   Poèmes de différents auteurs Icon_minitimeVen 4 Nov - 10:38

Chant d'Automne


Poèmes de différents auteurs 535b631c
Chant d'Automne
 
 
Bientôt nous plongerons dans les froides ténèbres ;
Adieu, vive clarté de nos étés trop courts !
J'entends déjà tomber avec des chocs funèbres
Le bois retentissant sur le pavé des cours.
Tout l'hiver va rentrer dans mon être : colère,
Haine, frissons, [size=18]horreur, labeur dur et forcé,[/size]
Et, comme le soleil dans son enfer polaire,
Mon coeur ne sera plus qu'un bloc rouge et glacé.
J'écoute en frémissant chaque bûche qui tombe ;
L'échafaud qu'on bâtit n'a pas d'écho plus sourd.
Mon esprit est pareil à la tour qui succombe
Sous les coups du bélier infatigable et lourd.
Il me semble, bercé par ce choc monotone,
Qu'on cloue en grande hâte un cercueil quelque part.
Pour qui ? - C'était hier l'été ; voici l'automne !
Ce bruit mystérieux sonne comme un départ.
J'aime de vos longs yeux la lumière verdâtre,
Douce beauté, mais tout aujourd'hui m'est amer,
Et rien, ni votre amour, ni le boudoir, ni l'âtre,
Ne me vaut le soleil rayonnant sur la mer.
Et pourtant aimez-moi, tendre coeur ! soyez mère,
Même pour un ingrat, même pour un méchant ;
Amante ou soeur, soyez la douceur éphémère
D'un glorieux [size=18]automne ou d'un soleil couchant.[/size]
Courte tâche ! La tombe attend ; elle est avide !
Ah ! laissez-moi, mon front posé sur vos genoux,
Goûter, en regrettant l'été blanc et torride,
De l'arrière-saison le rayon jaune et doux !
 
Charles Baudelaire.
 


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