Le poète est semblable aux oiseaux de passage
Qui ne bâtissent point leurs nids sur le rivage,
Qui ne se posent pas sur les rameaux des bois
Nonchalamment bercés sur le courant de l'onde,
Ils passent en chantant loin des bords et le monde
Ne connaît rien d'eux que leur voix.
Lamartine (Alphonse de),
Les amoureux fervents et les savants austères
Aiment également dans leur mûre saison
Les chats puissants et doux, orgueil de la maison
Qui comme eux sont frileux et comme eux sédentaires.
Amis de la science et de la volupté,
Ils cherchent le silence et l'horreur des ténèbres ;
L'Erèbe les eût pris pour ses coursiers funèbres,
S'ils pouvaient au servage incliner leur fierté.
Ils prennent en songeant les nobles attitudes
Des grands sphinx allongés au fond des solitudes,
Qui semblent s'endormir dans un rêve sans fin ;
Leurs reins féconds sont pleins d'étincelles magiques,
Et des parcelles d'or, ainsi qu'un sable fin,
[size=16]Etoilent vaguement leurs prunelles mystiques.[/size]
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Charles Baudelaire
« Soir de printemps »
« Le chant du rossignol et celui de la source
Composent, dans le soir, un duo de cristal ;
Le ciel ouvre en clignant les yeux de la grande ourse ;
Et le croissant de lune est blanc comme un signal.
Les roses, dont l'odeur est la seule ressource,
Répandent leur parfum jusqu'à nous faire mal ;
Une chauve-souris recommence sa course ;
Et le cri d'un grillon semble un rayon final.
Le destin, fatigué des âmes qui s'effeuillent,
Cherche, dans le gazon, le trèfle à quatre feuilles ;
« Quel beau soir de printemps ! » s'écrient toutes les fleurs…
Et, pour mieux s'emparer des rêves sans défense,
L'amour, avec un air d'inventer une danse,
Entre dans les jardins sur la pointe du cœur. »
Rosemonde Gérard
Un sourire
Un sourire, c’est grandiose.
C’est une lumière un peu rose
Dans l’infini du désespoir,
C’est une étoile dans le soir.
Un sourire, c’est un parfum
Qui se répand, qui se promène,
C’est une barque qui ramène
Un peu d’espoir au cœur défunt.
Un sourire est une vie
Et, quand, parfois, on l’aperçoit,
Un peu de courage se lie
Au rêve qui ne finit pas !
Source: Paul BIRON
Cher frère blanc,
Quand je suis né, j'étais noir,
Quand j'ai grandi, j'étais noir,
Quand je suis au soleil, je suis noir,
Quand je suis malade, je suis noir,
Quand je mourrai, je serai noir.
Tandis que toi, homme blanc,
Quand tu es né, tu étais rose,
Quand tu as grandi, tu étais blanc,
Quand tu vas au soleil, tu es rouge,
Quand tu as froid, tu es bleu,
Quand tu as peur, tu es vert,
Quand tu es malade, tu es jaune,
Quand tu mourras, tu seras gris.
Alors, de nous deux,
Qui est l'homme de couleur ?
Léopold Sedar Sanghor
Ninnenne