marileine moderateur
Messages : 27475 Date d'inscription : 08/03/2012 Localisation : belgique
| Sujet: Un jour... une histoire... 19 juin 1907 + 17 juin 1789 Sam 23 Aoû - 14:27 | |
| 19 juin 1907 La révolte viticole vire au drame Le 19 juin 1907, la crise de la viticulture languedocienne débouche sur un affrontement tragique entre les forces de l'ordre et les manifestants. C'est la révolte d'une France rurale qui s'accroche désespérément à ses traditions et à son horizon villageois. Traditions mises à mal Au milieu du XIXe siècle, les quatre départements français qui bordent le golfe du Lion se sont spécialisés dans la viticulture. Gard, Hérault, Aude et Pyrénées-Orientales ont su transformer leurs plaines arides et caillouteuses en superbes vignobles. Profitant des facilités de transport ouvertes par le chemin de fer et de l'amélioration générale du niveau de vie, les paysans du Midi approvisionnent toute la France en vin bon marché. Cette boisson énergétique devient l'un des aliments de base de la population adulte, avec la bénédiction des savants qui, tel Louis Pasteur, y voient non sans raison un excellent antiseptique, préférable à une eau souvent peu potable. En 1865, à la fin du Second Empire, le vignoble est ravagé par une maladie, le phylloxéra. Après 15 années de crise, les viticulteurs arrivent à reconstituer leurs vignes avec des ceps venus d'Algérie. La prospérité revient lentement puis tout s'emballe... De 1900 à 1906, la production de vin du Languedoc grimpe de 16 à 21 millions d'hectolitres. Elle se heurte qui plus est à la concurrence de nouveaux producteurs venus en Espagne ou encore en Italie, sans parler de l'Algérie française. Pour ne rien arranger, le gouvernement autorise en 1903 l'ajout de sucre dans le vin d'importation pour élever à bon compte son taux d'alcool. Ce procédé s'appelle «chaptalisation» en l'honneur du chimiste Jean-Antoine Chaptal qui l'a mis au point. La surproduction se solde par une mévente et une chute brutale des prix. Ceux-ci sont divisés par deux ou par trois en quelques années. C'est la ruine pour de nombreux Languedociens : petits viticulteurs qui n'arrivent pas à rembourser leurs dettes mais aussi négociants dont le sort est suspendu à celui de la viticulture. Vignerons en colère Unanimes, les Languedociens réclament pour le moins l'abrogation de la loi de 1903 sur la«chaptalisation» et une surtaxe sur le sucre. Mais le Président du Conseil, l'inflexible Georges Clemenceau, ne veut rien entendre. Une commission d'enquête parlementaire se rend toutefois à Narbonne, petite cité au coeur du vignoble, le 11 mars 1907. Là, les députés ont la surprise de voir venir à eux, au son d'un clairon, un comité de défense viticole de 87 membres créé par un cafetier d'Argeliers, dans l'Aude, Marcelin Albert. [size=16] Marcelin Albert à Argeliers L'initiative des «fous d'Argeliers» donne le signal de la révolte : Marcelin Albert lui-même multiplie les rencontres dominicales dans les villages du Midi. Les foules grossissent. 150.000 personnes viennent écouter le «prêcheur des platanes» à Béziers, le 12 mai. Ce jour-là, Marcelin Albert avertit le gouvernement que si rien n'est fait avant le 10 juin, il décrétera la grève de l'impôt et appellera les municipalités à démissionner. La veille de la date fatidique, le 9 juin 1907, Montpellier, principale ville du Languedoc (80.000 habitants), accueille pas moins de 600.000 manifestants, soit presque le tiers de la population languedocienne. Du jamais vu ! Clemenceau en appelle au sentiment républicain des maires et, dans le même temps, envoie dans le Midi 27 régiments représentant 25.000 fantassins et 8.000 cavaliers. Il a soin de les recruter hors de la région pour éviter qu'ils ne fraternisent avec la population. Drame Le drame survient à Narbonne, le 19 juin, où les soldats tirent sur la foule, faisant deux morts dont un adolescent. Le lendemain, nouveau drame face à une foule qui hurle sa haine : cinq morts. À Agde, petite ville à l'embouchure de l'Hérault, 600 soldats du 17e régiment d'infanterie prennent connaissance de la tuerie de Narbonne. Eux-mêmes sont originaires de la région (le gouvernement ne pouvait pas tout prévoir). Ils se mutinent et gagnent Béziers où ils sont accueillis par une population en liesse. les soldats du 17ème régiment à Béziers La crise se dénoue peu à peu. Dès le 21 juin, Clemenceau annonce à la Chambre que les mutins sont rentrés dans le rang... Ils seront expédiés au fin fond de la Tunisie. La cavalerie intervient dès le 19 juin à Narbonne où, en pleine nuit et sous les huées de la foule, elle arrête le maire. Le même jour, les forces de l'ordre ont encerclé le village d'Argeliers et arrêté plusieurs meneurs du comité de défense viticole. Protégé par la foule, Marcelin Albert arrive toutefois à s'échapper. Surprise ! On le retrouve trois jours plus tard à Paris. Le dimanche 23 juin, il se présente de son propre chef au ministère de l'Intérieur, place Beauvau, et demande à rencontrer le Président du Conseil. Georges Clemenceau le reçoit dans son bureau en tête à tête. Il lui fait la morale avant de lui remettre un billet de 100 francs pour le train du retour. Le rebelle accepte mais promet de le rembourser. Marcelin Albert face à Georges Clémenceau (gravure) Le Président du Conseil convoque aussitôt la presse et raconte à sa manière l'entrevue, prétendant que le cafetier a éclaté en sanglots et laissant entendre qu'il n'aurait pas toute sa tête. En prison, où le naïf Marcelin, ridiculisé, retrouve ses camarades, ceux-ci ne manquent pas de lui reprocher l'entrevue avec Clemenceau. C'en est fini du comité. Finalement, le gouvernement établit une surtaxe sur le sucre et réglemente sévèrement le négoce du vin, donnant ainsi raison aux manifestants. Le Languedoc conserve le souvenir aigu de cette révolte anachronique et ne manque pas d'invoquer les mânes de Marcelin Albert à chaque fois que la concurrence ou les règlements menacent son vin.----------------------------------------------------------------------------------Un jour... une histoire... 17 juin 1789[/size] [size] 17 juin 1789Les états généraux deviennent Assemblée nationale Le 17 juin 1789, à Versailles, les députés dutiersétat, renforcés par quelques curés issus de l'assemblée du clergé, se proclament «Assemblée nationale» sur une proposition de l'abbé Sieyès. Crise fiscaleQuelques semaines plus tôt, le roi Louis XVI a réuni les états généraux avec des représentants des trois ordres, clergé, noblesse et tiers état (bourgeoisie), en vue de trouver une solution à la faillite qui menace le gouvernement. Héritée d'une tradition médiévale, l'assemblée des états généraux comporte des représentants des trois ordres : clergé, noblesse et tiers état. Le tiers état représente les Français qui n'ont droit à aucun privilège particulier. Ses députés sont issus de la bourgeoisie. La majorité est composée d'avocats. L'autorité du roi bafouéeConsidérant, selon le mot de Sieyès, qu'ils représentent les «quatre-vingt-seizièmes de la Nation», les députés du tiers état rejettent la division en trois ordres, se proclamentAssemblée nationale mais aussi s'arrogent le droit d'autoriser la perception des impôts. A l'imitation des conventionnels américains... et des indépendantistes corses, les députés envisagent par ailleurs de fixer par écrit les futures règles de gouvernement et les attributions de chacun (roi, ministres, députés,...) dans une Constitution. Le roi Louis XVI prend fort mal la chose et, sur les conseils de son entourage, fait fermer la salle des Menus Plaisirs où les députés ont pris l'habitude de se réunir. Qu'à cela ne tienne. Le 20 juin, les députés se retrouvent dans une autre salle de Versailles, au Jeu de Paume, où ils jurent sous la présidence de Bailly, «de ne jamais se séparer et de se rassembler partout où les circonstances l'exigeraient, jusqu'à ce que la constitution du royaume fût établie et affermie par des fondements solides». Le serment du jeu de paume par David(Paris,musée Carnavalet) Le roi s'inclineTrois jours plus tard, le 23 juin, le roi Louis XVI se décide à adresser à l'ensemble des députés un langage de fermeté, leur ordonnant de délibérer séparément. Mais le tiers état et ses alliés du clergé refusent de se soumettre. Le maître des cérémonies rappelle sans succès l'injonction royale au président de l'Assemblée, Bailly. La postérité va magnifier l'incident en prêtant au tribun Mirabeau la célèbre harangue :«Allez dire à ceux qui vous envoient que nous sommes ici par la volonté nationale et que nous n'en sortirons que par la puissance des baïonnettes». Des gardes entrent dans la salle pour la faire évacuer. Mais voilà que des députés issus de la noblesse s'interposent. Rien moins que le marquis de La Fayette et le duc de La Rochefoucauld. Les gardes n'osent pas agir et se retirent. Informé de l'incident, le roi se soumet : «S'ils ne veulent pas s'en aller, qu'ils y restent !» Dès le lendemain, 46 députés de la noblesse libérale conduits par le duc d'Orléans en personne (le cousin du roi) se rallient aux députés du tiers état et du clergé au sein de la nouvelle Assemblée nationale. Le 27 juin, sur le conseil de son ministre Necker, le roi ordonne finalement à l'ensemble des députés de rejoindre l'Assemblée nationale. Vers une monarchie constitutionnellePendant ce temps, dans les campagnes, les paysans s'agitent et commencent à s'en prendre aux châteaux et aux «terriers», les vieux registres sur lesquels sont inscrits les droits de propriété des seigneurs et les droits féodaux. Les rumeurs de massacres se répandent d'un village à l'autre. C'est la «Grande Peur». À la lumière de ces incidents, les députés comprennent que la refonte des impôts ne suffira pas à ramener la sérénité dans le pays. Ils décident de remettre à plat les institutions monarchiques, un ensemble de droits et de pratiques fondés sur les coutumes et les aléas de l'Histoire... Le 9 juillet 1789, ils officialisent leur projet de donner une Constitution au royaume. Ils se proclament «Assemblée nationale constituante». C'en est fini de l'absolutisme royal. La Révolution commence.---------------------------------------------------------------------------------- Ninnenne [/size] | |
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