[size=24]LES VENDANGES POESIE
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[size=16]Les vendanges (fragment)[/size]
[size=16]Hier on cueillait à l'arbre une dernière pêche,[/size]
[size=16]Et ce matin, voici, dans l'aube épaisse et fraîche,[/size]
[size=16]L'automne qui blanchit sur les coteaux voisins.[/size]
[size=16]Un fin givre a ridé la pourpre des raisins.[/size]
[size=16]Là-bas, voyez vous poindre, au bout de la montée,[/size]
[size=16]Les ceps aux feuilles d'or, dans la brume argentée ?[/size]
[size=16]L'horizon s'éclaircit en de vagues rougeurs,[/size]
[size=16]Et le soleil levant conduit les vendangeurs.[/size]
[size=16]Avec des cris joyeux, ils entrent dans la vigne ;[/size]
[size=16]Chacun, dans le sillon que le maître désigne,[/size]
[size=16]Serpe en main, sous le cep a posé son panier.[/size]
[size=16]Honte à qui reste en route et finit le dernier ![/size]
[size=16]Les rires, les clameurs stimulent sa paresse ![/size]
[size=16]Aussi, comme chacun dans sa gaîté se presse ![/size]
[size=16]Presque au milieu du champ, déjà brille, là-bas,[/size]
[size=16]Plus d'un rouge corsage entre les échalas ;[/size]
[size=16]Voici qu'un lièvre part, on a vu ses oreilles ;[/size]
[size=16]La grive au cri perçant fuit et rase les treilles.[/size]
[size=16]Malgré les rires fous, les chants à pleine voix,[/size]
[size=16]Tout panier est déjà vidé plus d'une fois,[/size]
[size=16]Et bien des chars ployant sous l'heureuse vendange,[/size]
[size=16]Escortés des enfants, sont partis pour la grange.[/size]
[size=16]Au pas lent des taureaux les voilà revenus,[/size]
[size=16]Rapportant tout l'essaim des marmots aux pieds nus.[/size]
[size=16]On descend, et la troupe à grand bruit s'éparpille,[/size]
[size=16]Va des chars aux paniers, revient, saute et grappille,[/size]
[size=16]Prés des ceps oubliés se livre des combats.[/size]
[size=16]Qu'il est doux de les voir, si vifs dans leurs ébats,[/size]
[size=16]Préludant par des pleurs à de folles risées,[/size]
[size=16]Tout empourprés du jus des grappes écrasées ![/size]
[size=16]Victor de Laprade vers 1860[/size]
[size=16][size=16]http://moulin.chauffour.free.fr/saveurs_senteurs_poemes/les_vendanges.htm[/size][/size]
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LE CREPUSCULE DU SOIR
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[size=16]Le crépuscule du soir[/size]
[size=16]Voici le soir charmant, ami du criminel ;[/size]
[size=16]Il vient comme un complice, à pas de loup ; le ciel[/size]
[size=16]Se ferme lentement comme une grande alcôve,[/size]
[size=16]Et l'homme impatient se change en bête fauve.[/size]
[size=16]Ô soir, aimable soir, désiré par celui[/size]
[size=16]Dont les bras, sans mentir, peuvent dire : Aujourd'hui[/size]
[size=16]Nous avons travaillé ! - C'est le soir qui soulage[/size]
[size=16]Les esprits que dévore une douleur sauvage,[/size]
[size=16]Le savant obstiné dont le front s'alourdit,[/size]
[size=16]Et l'ouvrier courbé qui regagne son lit.[/size]
[size=16]Cependant des démons malsains dans l'atmosphère[/size]
[size=16]S'éveillent lourdement, comme des gens d'affaire,[/size]
[size=16]Et cognent en volant les volets et l'auvent.[/size]
[size=16]A travers les lueurs que tourmente le vent[/size]
[size=16]La Prostitution s'allume dans les rues ;[/size]
[size=16]Comme une fourmilière elle ouvre ses issues ;[/size]
[size=16]Partout elle se fraye un occulte chemin,[/size]
[size=16]Ainsi que l'ennemi qui tente un coup de main ;[/size]
[size=16]Elle remue au sein de la cité de fange[/size]
[size=16]Comme un ver qui dérobe à l'homme ce qu'il mange.[/size]
[size=16]On entend çà et là les cuisines siffler,[/size]
[size=16]Les théâtres glapir, les orchestres ronfler ;[/size]
[size=16]Les tables d'hôte, dont le jeu fait les délices,[/size]
[size=16]S'emplissent de catins et d'escrocs, leurs complices,[/size]
[size=16]Et les voleurs, qui n'ont ni trêve ni merci,[/size]
[size=16]Vont bientôt commencer leur travail, eux aussi,[/size]
[size=16]Et forcer doucement les portes et les caisses[/size]
[size=16]Pour vivre quelques jours et vêtir leurs maîtresses.[/size]
[size=16]Recueille-toi, mon âme, en ce grave moment,[/size]
[size=16]Et ferme ton oreille à ce rugissement.[/size]
[size=16]C'est l'heure où les douleurs des malades s'aigrissent ![/size]
[size=16]La sombre Nuit les prend à la gorge ; ils finissent[/size]
[size=16]Leur destinée et vont vers le gouffre commun ;[/size]
[size=16]L'hôpital se remplit de leurs soupirs. - Plus d'un[/size]
[size=16]Ne viendra plus chercher la soupe parfumée,[/size]
[size=16]Au coin du feu, le soir, auprès d'une âme aimée.[/size]
[size=16]Encore la plupart n'ont-ils jamais connu[/size]
La douceur du foyer et n'ont jamais vécu !
Charles Baudelaire 1821-1867
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LES MAINS
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Les chères mains
Les chères [size=16]mains qui furent miennes,[/size]
Toutes petites, toutes belles,
Après ces méprises mortelles
Et toutes ces choses païennes,
Après les rades et les grèves,
Et les pays et les provinces,
Royales mieux qu’au temps des princes
Les chères [size=16]mains m’ouvrent les rêves.[/size]
Mains en songe, [size=16]mains sur mon âme,[/size]
Sais-je, moi, ce que vous daignâtes,
Parmi ces rumeurs scélérates,
Dire à cette âme qui se pâme?
Ment-elle, ma vision chaste
D’affinité spirituelle,
De complicité maternelle,
D’affection étroite et vaste?
Remords si cher, peine très bonne,
Rêves bénits, [size=16]mains consacrées,[/size]
0 ces [size=16]mains, ses mains vénérées,[/size]
Faites le geste qui pardonne.
Paul Verlaine 1880
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Ninnenne -[/size]