Nuit de neige
La grande plaine est blanche, immobile et sans voix.
Pas un bruit, pas un son ;
toute vie est éteinte.
Mais on entend parfois, comme une morne plainte,
Quelque [size=16]chien sans abri qui hurle au coin d'un bois.[/size]
Plus de chansons dans l'air,
sous nos pieds plus de chaumes.
L'hiver s'est abattu sur toute floraison ;
Des arbres dépouillés dressent à l'horizon
Leurs squelettes blanchis ainsi que des fantômes.
La lune est large et pâle et semble se hâter.
On dirait qu'elle a froid dans le grand ciel austère.
De son morne regard elle parcourt la terre,
Et, voyant tout désert, s'empresse à nous quitter.
Et froids tombent sur nous les rayons qu'elle darde,
Fantastiques lueurs qu'elle s'en va semant ;
Et la neige s'éclaire au loin, sinistrement,
Aux étranges reflets de la clarté blafarde.
Oh ! la terrible nuit pour les petits [size=16]oiseaux ![/size]
Un vent glacé frissonne et court par les allées ;
Eux, n'ayant plus l'asile ombragé des berceaux,
Ne peuvent pas dormir sur leurs pattes gelées.
Dans les grands arbres nus que couvre le verglas
Ils sont là, tout tremblants, sans rien qui les protège ;
De leur oeil inquiet ils regardent la neige,
Attendant jusqu'au jour la nuit qui ne vient pas.
Guy de MAUPASSANT (1850-1893)
Gérard de Nerval.
Une femme est l'amour.
Une femme est l'amour,
la gloire et l'espérance ;
Aux enfants qu'elle guide,
à l'homme consolé,
Elle élève le cœur et calme la souffrance,
Comme un esprit des cieux sur la terre exilé.
Courbé par le travail ou par la destinée,
L'homme à sa voix s'élève et son front s'éclaircit ;
Toujours impatient dans sa course bornée,
Un sourire le dompte et son cœur s'adoucit.
Dans ce siècle de fer la gloire est incertaine :
Bien longtemps à l'attendre il faut se résigner.
Mais qui n'aimerait pas, dans sa grâce sereine,
La beauté qui la donne ou qui la fait gagner ?
Gérard de Nerval. &&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&&
BIOGRAPHIE DE GERARD DE NERVAL.
Gérard de NERVAL (1808-1855)
L'enfance dans le Valois [size=13]Gérard de Nerval naît sous le nom de Labrunie. Il doit grandir en l'absence d'une mère, morte peu de temps après sa naissance. C'est dans le Valois, lieu qui inspirera particulièrement ses oeuvres, qu'il passe son enfance.[/size]
Après ses études parisiennes, il s'adonne à l'écriture et, attiré par l'Allemagne, réalise une traduction réussie du Faust de Goethe. Les premières oeuvres
Durant sa jeunesse, de Nerval s'inspire des grands romantiques qu'il côtoie (Hugo, Nodier) et se lie d'amitié avec Théophile Gautier. Il participe même à la célèbre bataille d'Hernani. Dès 1836, il s'éprend passionnément de Jenny Colon, qui en épousera un autre. Nerval en fera alors l'une de ses égéries. Mais l'esprit de l'écrivain commence à défaillir.
Victime de la folie
Dès 1841, il est sujet à des hallucinations et à des crises de folie dont il s'inspire dans ses écrits. Paraissent ainsi Voyage en Orient (1851), puis les Filles du feu (1854). Dans ce recueil de nouvelles, dont chacune d'entre elles porte un nom féminin, l'auteur cherche à atteindre la figure de la femme inaccessible.
Le recueil porte également une dizaine de sonnets regroupés sous le titre les Chimères.
De Nerval est retrouvé pendu en 1855.
Après sa mort, une dernière oeuvre paraît :
Aurélia, qui marque sa volonté de fuir le réel par le rêve.
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L.H.FRECHETTE
Louis-Honoré FRÉCHETTE (1839-1908)
Février
Aux pans du ciel l'hiver drape un nouveau décor ;
Au firmament l'azur de tons roses s'allume ;
Sur nos trottoirs un vent plus doux enfle la plume
Des petits moineaux gris qu'on y retrouve encor.
Maint coup sec retentit dans la forêt qui dort ;
Et, dans les ravins creux qui s'emplissent de brume,
Aux franges du brouillard malsain qui nous enrhume
L'Orient plus vermeil met une épingle d'or.
Folâtre, et secouant sa clochette argentine,
Le bruyant Carnaval fait sonner sa bottine
Sur le plancher rustique ou le tapis soyeux ;
Le spleen chassé s'en va chercher d'autres victimes ;
La gaîté vient s'asseoir à nos cercles intimes...
C'est le mois le plus court :
passons-le plus joyeux
[size=18][/size]
Chant de Mai —
Mailied
CHANT DE MAI
Mailied de Goethe
Dans toute la nature
Quel éclat merveilleux !
Tout rit dans la verdure
À l’astre radieux !
Mille fleurs gracieuses
Sortent de leur bouton,
Et mille voix joyeuses
S’élancent des buissons.
La vigueur printanière
Se répand dans mon cœur !
Terre, ciel et lumière
Tout m’invite au bonheur.
Ta beauté m’est divine
Ô ravissant amour !
Comme est sur la colline
L’aurore d’un beau jour.
Ton souffle, qui féconde
La terre de nos champs,
Déjà remplit le monde
De parfums enivrants.
Ô tendre jeune fille,
Comme je t’aime ainsi !
Oh ! que ton regard brille !
Que tu m’aimes aussi !
Comme aime l’alouette
Dans les airs son refrain,
Comme aime la fleurette
Les vapeurs du matin,
Je t’aime avec ivresse,
Je t’aime avec ardeur !
Tu donnes la jeunesse,
Le courage à mon cœur
Pour les chants, les poèmes,
La danse et ses attraits.
Ange ! autant que tu m’aimes
Sois heureuse à jamais !
(Traduit par JULES CAMUS.)
Les jardins de la poésie.
ThéodoreAgrippa d'Aubigné
Ce doux hiver qui égale ses jours
Ce doux hiver qui égale ses jours
A un printemps, tant il est aimable,
Bien qu’il soit beau, ne m’est pas agréable,
J’en crains la queue, et le succès toujours.
J’ai bien appris que les chaudes amours,
Qui au premier vous servent une table
Pleine de sucre et de mets délectable,
Gardent au fruit leur amer et leurs tours.
Je vois déjà les arbres qui boutonnent
En mille noeuds, et ses beautés m’étonnent,
En une nuit ce printemps est glacé,
Ainsi l’amour qui trop serein s’avance,
Nous rit, nous ouvre une belle apparence,
Est né bien tôt bien tôt effacé.
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Théodore Agrippa d’Aubigné
Poésie d'Arthur Rimbaud
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LES CORBEAUX.
SEIGNEUR, quand froide est la prairie,
Quand, dans les hameaux abattus,
Les longs angélus se sont tus ...
Sur la [size=13]nature défleurie[/size]
Faites s'abattre des grands cieux
Les chers corbeaux délicieux.
Armée étrange aux cris sévères,
Les vents froids attaquent vos nids !
Vous le long des fleuves jaunis,
Sur les routes aux vieux calvaires,
Sur les fossés et, sur les trous
Dispersez-vous, ralliez-vous !
Par milliers, sur les champs de France,
Où dorment des morts d'avant-hier,
Tournoyez, n'est-ce pas l'hiver,
Pour que chaque passant repense !
Sois donc le crieur du devoir,
Ô notre funèbre [size=13]oiseau noir ![/size]
Mais, saints du ciel, en haut du chêne,.
Mât perdu dans le soir charmé,
Laissez les fauvettes de mai
Pour ceux qu'au fond du bois enchaîne,
Dans l'herbe d'où l'on ne peut fuir,
La défaite sans avenir.
Arthur Rimbaud.
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Pierre de Ronsard
Gentilhomme vendômois, ainsi qu'il aimait à
le dire lui même,
Pierre de Ronsard, né en 1524, est mort en 1585.
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D'abord page du Dauphin, puis de la reine d'Ecosse,
attaché d'ambassade
aux Pays-Bas, en Ecosse et en Alsace,
il dut renoncer à la diplomatie
car atteint de surdité.
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Il devint avant de se retirer en province, l
e poète officiel de la cours de Charles IX.
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Dans des poèmes célèbres, il a chanté
avec délicatesse et profondeur,
les femmes aimées, l'amour et son souvenir.
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MADRIGAL
"Si c'est aimer, Madame, et de jour, et de nuit
Rêver, songer, penser le moyen de vous plaire,
Oublier toute chose, et ne vouloir rien faire
Qu'adorer et servir la beauté qui me nuit:
Si c'est aimer que de suivre un bonheur qui me fuit,
De me perdre moi même et d'être solitaire,
Souffrir beaucoup de mal, beaucoup craindre et me taire,
Pleurer, crier merci, et m'en voir éconduit:
Si c'est aimer que de vivre en vous plus qu'en moi même,
Cacher d'un front joyeux, une langueur extrême,
Sentir au fond de l'âme un combat inégal,
Chaud, froid, comme la fièvre amoureuse me traite:
Honteux, parlant à vous de confesser mon mal!
Si cela est aimer :
Furieux je vous aime:
Je vous aime et sait bien que mon mal est fatal:
Le cœur le dit assez, mais la langue est muette."
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Maurice Carême
L'écureuil et la feuille
Un écureuil, sur la bruyère,
Se lave avec de la lumière.
Une feuille morte descend,
Doucement portée par le vent.
Et le vent balance la feuille
Juste au - dessus de l'écureuil
Le vent attend, pour la poser
Légèrement sur la bruyère,
Que l'écureuil soit remonté
Sur le chêne de la clairière
Où il aime à se balancer
Comme une feuille de lumière.
Maurice Carême
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Arthur Rimbaud
Arthur RIMBAUD (1854-1891)
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Ophélie
I
Sur l'onde calme et noire où dorment les étoiles
La blanche Ophélia flotte comme un grand lys,
Flotte très lentement, couchée en ses longs voiles... -
On entend dans les bois lointains des hallalis.
Voici plus de mille ans que la triste Ophélie
Passe, fantôme blanc, sur le long fleuve noir.
Voici plus de mille ans que sa douce folie
Murmure sa romance à la brise du soir.
Le vent baise ses seins et déploie en corolle
Ses grands voiles bercés mollement par les eaux ;
Les saules frissonnants pleurent sur son épaule,
Sur son grand front rêveur s'inclinent les roseaux.
Les nénuphars froissés soupirent autour d'elle ;
Elle éveille parfois, dans un aune qui dort,
Quelque nid, d'où s'échappe un petit frisson d'aile : -
Un chant mystérieux tombe des astres d'or.
II
Ô pâle Ophélia ! belle comme la neige !
Oui tu mourus, enfant, par un fleuve emporté !
- C'est que les vents tombant des grands monts de Norwège
T'avaient parlé tout bas de l'âpre liberté ;
C'est qu'un souffle, tordant ta grande chevelure,
A ton esprit rêveur portait d'étranges bruits ;
Que ton coeur écoutait le chant de la Nature
Dans les plaintes de l'arbre et les soupirs des nuits ;
C'est que la voix des mers folles, immense râle,
Brisait ton sein d'enfant, trop humain et trop doux ;
C'est qu'un matin d'avril, un beau cavalier pâle,
Un pauvre fou, s'assit muet à tes genoux !
Ciel ! Amour ! Liberté !
Quel rêve, ô pauvre Folle !
Tu te fondais à lui comme une neige au feu :
Tes grandes visions étranglaient ta parole -
Et l'Infini terrible effara ton oeil bleu !
III
- Et le Poète dit qu'aux rayons des étoiles
Tu viens chercher, la nuit, les fleurs que tu cueillis ;
Et qu'il a vu sur l'eau, couchée en ses longs voiles,
La blanche Ophélia flotter, comme un grand lys.
[size=13][/size]
A.LAMARTINE
Alphonse de LAMARTINE
(1790-1869)
[size=16][/size]
Le papillon
[size=18]Naître avec le printemps,[/size]
mourir avec les roses,
Sur l'aile du zéphyr nager dans un ciel pur,
Balancé sur le sein des fleurs à peine écloses,
S'enivrer de parfums, de lumière et d'azur,
Secouant, jeune encor, la poudre de ses ailes,
S'envoler comme un souffle aux voûtes éternelles,
Voilà du papillon le destin enchanté!
Il ressemble au désir,
qui jamais ne se pose, Et sans se satisfaire,
effleurant toute chose,
Retourne enfin au ciel chercher la volupté!
Jacques Prévert
SUPERBE POESIE de Jacques Prévert /
O I S E A U §
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Chanson de l'oiseleur
L'oiseau qui vole si doucement
L'oiseau rouge et tiède comme le sang
L'oiseau si tendre l'oiseau moqueur
L'oiseau qui soudain prend peur
L'oiseau qui soudain se cogne
L'oiseau qui voudrait s'enfuir
L'oiseau seul et affolé
L'oiseau qui voudrait vivre
L'oiseau qui voudrait chanter
L'oiseau qui voudrait crier
L'oiseau rouge et tiède comme le sang
L'oiseau qui vole si doucement
C'est ton coeur jolie enfant
Ton coeur qui bat de l'aile si tristement
Contre ton sein si dur si blanc
[size=16]Extrait de "Poésies" de JACQUES PREVERT §[/size]
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Victor Hugo
POESIE CELEBRE.
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Vous qui ne savez pas combien l'enfance est belle,
Enfant ! N’enviez point notre âge de douleurs,
Où le coeur tour à tour est esclave et rebelle,
Où le rire est souvent plus triste que vos pleurs.
Votre âge insouciant est si doux qu'on l'oublie !
Il passe, comme un souffle au vaste champ des airs,
Comme une voix joyeuse en fuyant affaiblie,
Comme un alcyon sur les mers.
Oh ! Ne vous hâtez point de mûrir vos pensées !
Jouissez du matin, jouissez du printemps ;
Vos heures sont des fleurs l'une à l'autre enlacées ;
Ne les effeuillez pas plus vite que le temps.
Laissez venir les ans !
Le destin vous dévoue, Comme nous, aux regrets,
à la fausse amitié,
A ces maux sans espoir que l'orgueil désavoue,
A ces plaisirs qui font pitié. Riez pourtant !
Du sort ignorez la puissance Riez !
N'attristez pas votre front gracieux,
Votre œil d'azur, miroir de paix et d'innocence,
Qui révèle votre âme et réfléchit les cieux !
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Victor HUGO
(1802-1885)
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Recueil:
odes et ballades
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Ninnenne