Poème sur la Mer
Poème sur la Mer, Sous les coiffes de lin, toutes croisant leurs bras Vêtus de laine rude ou de mince percale, Les femmes à genoux sur le roc de la cale, Regardent l' Océan blanchir l'île de Batz.
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Les hommes, pères, fils, maris, amants, là-bas Avec ceux de Paimpol, d'Audierne et de Cancale, Vers le Nord sont partis pour la lointaine escale, Que de hardis pêcheurs qui ne reviendront pas ,
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Par dessus la rumeur de la mer et des côtes, Le chant plaintif s'élève, invoquant à voix hautes L'Etoile sainte , espoir des marins en péril ,
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Et l'Angélus, courbant tous ces fronts noirs de hâle, Des clochers de Roscoff à ceux de Sybiril, S'envole, tinte et meurt dans le ciel rose et pâle. José Maria de Hérédia. |
Poème sur la Mer
Un voilier passe,
Je suis debout au bord de la plage.
Un voilier passe dans la brise du matin,
Et part vers l'océan.
Il est la beauté, il est la vie.
Je le regarde jusqu'à ce qu'il disparaisse à l'horizon.
Quelqu'un à mon côté dit : il est parti !
Parti vers où ,
Parti de mon regard, c'est tout ,
Son mât est toujours aussi haut,
sa coque a toujours la force de porter
Sa charge humaine.
Sa disparition totale de ma vue est en moi,
Pas en lui.
Et juste au moment où quelqu'un prés de moi
Dit : il est parti !
il en est d'autres qui le voyant poindre à l'horizon
et venir vers eux s'exclament avec joie
Le voilà !
C'est ça la mort !
Il n'y a pas de morts.
Il y a des vivants sur les deux rives.
William Blake .
La chansons de la rose
Viens à moi ! Viens à moi !
Le ciel joyeux se dore !
Ah ! Viens à moi ! Viens à moi !
La fleur s'épanouit
Aspire le soleil,
Tout murmure et sourit,
Tout murmure, tout aime ,
Tout aime, tout adore,
La nuit a disparu, voici le gai réveil ,
Tout aime, tout adore; voici la douce aurore ,
Tout aime ! Viens à moi !
Les abeilles déjà bourdonnent sous les herbes,
Les abeilles déjà, pour y puiser leur miel,
Butinent sur les fleurs.
Vois ! Vois comme des beaux lys les pétales superbes
Reçoivent du matin les baisers et les pleurs ,
Viens à moi ! Je te veux donner toute mon âme ,
Ah viens ! Ah ! Viens à moi !
Je veux t'appartenir dans un baiser de flamme ,
Et quand tu me fuiras, je veux mourir d'aimer ,
Je veux de mes parfums doucement t'embaumer.
Je t'aime ! Viens à moi.
Paul Jules Barbier.
POEME SUR LES ENFANTS
Les [size=16]enfants au paradis,[/size]
Sous les arbres de nard, d'aloès et de baume,
Chaque souffle de l'air, dans ce flottant royaume,
Est un enfant qui vole, un enfant qui sourit
Au doux lait virginal dont le flot le nourrit ;
Un enfant, chaque fleur de la sainte corbeille ;
Chaque étoile, un enfant ; un enfant, chaque abeille.
Le fleuve y vient baigner leurs groupes triomphants ;
L'horizon s'y déroule en nuages d'enfants,
Plus beaux que tout l'éclat des vapeurs fantastiques
Dont le couchant superbe enflamme ses portiques.
Alexandre Soumet.
Poème sur l'Amitié
[size=16]Les deux Amitiés,[/size]
[size=16]Il est deux Amitiés comme il est deux Amours.
L'une ressemble à l'imprudence;
Faite pour l'âge heureux dont elle a l'ignorance,
C'est une enfant qui rit toujours.
Bruyante, naïve, légère,
Elle éclate en transports joyeux.
Aux préjugés du monde indocile, étrangère,
Elle confond les rangs et folâtre avec eux.
L'instinct du cœur est sa science,
Et son guide est la confiance.
L'enfance ne sait point haïr;
Elle ignore qu'on peut trahir.
Si l'ennui dans ses yeux on l'éprouve à tout âge
Fait rouler quelques pleurs,
L'Amitié les arrête, et couvre ce nuage
D'un nuage de fleurs.
On la voit s'élancer près de l'enfant qu'elle aime,
Caresser la douleur sans la comprendre encor,
Lui jeter des bouquets moins riants qu'elle-même,
L'obliger à la fuite et reprendre l'essor.
C'est elle, ô ma première amie !
Dont la chaîne s'étend pour nous unir toujours.
Elle embellit par toi l'aurore de ma vie,
Elle en doit embellir encor les derniers jours.
Oh ! que son empire est aimable !
Qu'il répand un charme ineffable
Sur la jeunesse et l'avenir,
Ce doux reflet du souvenir .
Ce rêve pur de notre enfance
En a prolongé l'innocence;
L'Amour, le temps, l'absence, le malheur,
Semblent le respecter dans le fond de mon cœur.
Il traverse avec nous la saison des orages,
Comme un rayon du ciel qui nous guide et nous luit :
C'est, ma chère, un jour sans nuages
Qui prépare une douce nuit.
L'autre Amitié , plus grave, plus austère,
Se donne avec lenteur, choisit avec mystère;
Elle observe en silence et craint de s'avancer;
Elle écarte les fleurs, de peur de s'y blesser.
Choisissant la raison pour conseil et pour guide,
Elle voit par ses yeux et marche sur ses pas :
Son abord est craintif, son regard est timide;
Elle attend, et ne prévient pas.
Marceline Desbordes-Valmore.[/size]
Poème sur les phares
Le gardien du phare aime trop les oiseaux
Des [size=16]oiseaux par milliers volent vers les feux
par milliers ils tombent par milliers ils se cognent
par milliers aveuglés par milliers assommés
par milliers ils meurent[/size]
le gardien ne peut supporter des choses pareilles
les [size=16]oiseaux il les aime trop
alors il dit Tant pis je m'en fous ![/size]
Et il éteint tout
au loin un cargo fait naufrage
un cargo venant des îles
un cargo chargé d'oiseaux
des milliers d'oiseaux des îles
des milliers d'oiseaux noyés.
Jacques Prévert.
Poème sur les Moulins
La voix du vieux moulin,
Près de la Sédelle qui chante
Suivant un rythme régulier
J'écoute, en sa besogne ardente
Du moulin les bruits familiers.
Homme et cheval plein de courage
S'en vont sur d'arides chemins
Pour charger dans chaque village
Le lourd chariot de bons grains.
Le Meunier fera la farine
Avec le blé des paysans
Pour que cuise en l'humble chaumine
Le pain doré tout croustillant.
Ainsi chaque jour, sans relâche
Suivant un rythme régulier
S'accomplit une noble tâche
Dans l'amour de ce beau métier.
Mais comme tout change en ce monde,
Le vieux moulin devra mourir,
Et sa tendre musique, à la ronde,
Ne sera plus qu'un souvenir.
Maurice Pasty
Poème sur les fleurs
Les fleurs,
Des avalanches d’or du vieil azur, au jour
Premier et de la neige éternelle des astres
Jadis tu détachas les grands calices pour
La terre jeune encore et vierge de désastres,
Le glaïeul fauve, avec les cygnes au col fin,
Et ce divin laurier des âmes exilées
Vermeil comme le pur orteil du séraphin
Que rougit la pudeur des aurores foulées,
L’hyacinthe, le myrte à l’adorable éclair
Et, pareille à la chair de la femme, la rose
Cruelle, Hérodiade en fleur du jardin clair,
Celle qu’un sang farouche et radieux arrose !
Et tu fis la blancheur sanglotante des lys
Qui roulant sur des mers de soupirs qu’elle effleure
A travers l’encens bleu des horizons pâlis
Monte rêveusement vers la lune qui pleure !
Hosannah sur le cistre et dans les encensoirs,
Notre Dame, hosannah du jardin de nos limbes !
Et finisse l’écho par les célestes soirs,
Extase des regards, scintillement des nimbes !
Ô Mère qui créas en ton sein juste et fort,
Calices balançant la future fiole,
De grandes fleurs avec la balsamique Mort
Pour le poète las que la vie étiole.
Stéphane Mallarmé.
POEME SUR LES ENFANTS
Lui,
Il a bientôt deux ans. Parfois, quand je le gronde,
Il baisse ses grands yeux qu'une larme a ternis,
Et puis, avec des airs de douceur infinis,
Il relève vers moi sa belle tête blonde.
Et tout à coup,
l'enfance a ces retours bénis,
D'un sourire joyeux sa figure s'inonde;
Il jase en éclatant de rire, et sa faconde
Semble un gazouillement d'oiseaux au bord des nids.
Alors au fond de moi quelque chose remue;
De tendresses sans nom ma pauvre âme est émue;
Sous mes cils à mon tour je sens des pleurs jaillir.
Merci, mon Dieu, merci ! vous dont la pitié sainte
A mêlé ce rayon de miel à notre absinthe ,
L'enfant aimé pour nous consoler de vieillir .
Louis-Honoré Fréchette.
POEME SUR LA MER
L'Appel du large,
Un matin nous partons, le cerveau plein de flamme,
Le coeur gros de rancune et de désirs amers,
Et nous allons, suivant le rythme de la lame,
Berçant notre infini sur le fini des mers.
Mais les vrais voyageurs sont ceux-là seuls qui partent
Pour partir, coeurs légers, semblables aux ballons,
De leur fatalité jamais ils ne s'écartent,
Et sans savoir pourquoi, disent toujours : Allons .
Amer savoir, celui qu'on tire du voyage !
Le monde, monotone et petit, aujourd'hui,
Hier, demain, toujours, nous fait voir notre image :
Une oasis d'horreur dans un désert d'ennui !
Chales Baudelaire.
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